Génération Benoît XVI

benoit xvi

Nombreux sont ceux qui se souviennent ce qu’ils faisaient, où ils étaient, le 2 avril 2005 : probablement chez des amis, chez leurs parents, au bar, puisque ce n’étaient alors que des jeunes, âgés de 18 à 30 ans, qui apprirent ce soir-là que Jean-Paul II venait de mourir. Karol Wojtyla, l’athlète de Dieu, avait formé une génération à son image. Élu très jeune, venu de l’Est, il était « Le Messager » pour Jean-Pax Méfret, « L’Homme en blanc » pour Pierre Bachelet. Il était médiatique et charismatique, et offrit, jusque dans la déchéance et la maladie, le spectacle de l’héroïsme catholique sous des caméras impitoyables.

Jean-Paul II mort, les médias se mirent à faire des pronostics. Beaucoup d’entre eux souhaitaient, vous vous en souvenez peut-être, la victoire du cardinal Martini, un progressiste. Le soir de l’élection du souverain pontife, le 19 avril 2005, et pour paraphraser un auteur célèbre, « soudain, joyeux, ils dirent "Martini" ! C’était Ratzinger ». Joseph Ratzinger était réputé plutôt conservateur par les vaticanistes. Il dirigeait la Congrégation pour la doctrine de la foi, était âgé de 78 ans et imposa directement un style radicalement différent de celui de son prédécesseur. Impeccablement vêtu, comme il sied à un pape en fait, attaché à l’usage deux fois millénaire du latin, il était « en même temps » particulièrement humble et doux, se définissant lui-même comme un « humble travailleur dans la vigne du seigneur ».

Son amour de la grandeur et de la majesté du rite, de la fonction, en même temps que la simplicité et la bonté de son témoignage, serait désormais celui d’une génération - quoique le terme soit un peu galvaudé pour les sept ans, presque huit, de son pontificat. Dès les Journées mondiales de la jeunesse, à l’été de son élection, il montra l’importance qu’il accordait à l’adoration eucharistique ainsi qu’à la beauté des célébrations. Il enfonça le clou avec le motu proprio Summorum pontificum, dans lequel, après Ecclesia Dei, signé par Jean-Paul II, il faisait, avec une bienveillance toute paternelle, un nouveau pas vers les « tradis ».

En parallèle, avec beaucoup d’humilité mais surtout beaucoup d’intelligence, Benoît XVI prononça le discours de Ratisbonne dans lequel, prouvant l’articulation entre foi et raison, il renvoyait dos à dos les laïcards (qui disent que la foi ressort exclusivement de l’irrationnel) et la violence (irrationnelle par essence) que certaines religions (on se demande bien lesquelles) peuvent déployer furieusement contre les prétendus mécréants. Malgré les protestations, le pape tint bon - et les années suivantes se chargèrent de plaider en sa faveur.

Sa renonciation, en 2013, prit de court la génération qu’il avait formée à son image. Beaucoup se souviennent également, comme pour la mort de Jean-Paul II, de l’endroit où ils ont entendu ou vu le discours, prononcé par le pape dans un latin évidemment impeccable, avec une ombre, désormais familière, d’accent bavarois. Les spéculations allèrent bon train, sans qu’on puisse, aujourd’hui encore, comprendre ce qui poussa un si bon pape à renoncer au trône de Pierre, presque dix ans avant sa mort.

Sa mort révèle, par contraste, l’étendue immense de son héritage spirituel, immatériel : des prêtres dynamiques et embrasés par la charité, dans le sillage du cardinal Sarah, désormais bien seul pour écoper la barque de Pierre ; des églises traditionnelles pleines, pleines de jeunes foyers féconds et souriants, heureux d’avoir pu se réconcilier pleinement avec l’unique Église ; des militants pour la vie qui ne désarment pas, malgré un manque total d’illusions sur une victoire terrestre rapide ; des chrétiens, aujourd’hui âgés de 30 à 45 ans, qui se forment, qui essaiment et qui sont prêts à se battre.

La génération Benoît XVI n’en est qu’à ses débuts : elle a grandi et mûri depuis l’époque où « Génération Benoît XVI » n’était qu’un floquage sur un polo. Et elle a, envers celui qui l’a formée, une dette d’infinie gratitude.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

9 commentaires

  1. Je souhaite aussi l’arrivée d’un vrai pape comme le serait le cardinal Sarah mais il n’est plus tout jeune et si les mondialistes arrivent à placer un antipape comme ils ont fait, on peut juste croiser les doigts.

  2. En cette nouvelle année pleine d’appréhensions et de craintes nous souhaitons force et santé au cardinal Sarah ét nous prions pour que sa voix se fasse entendre . Nous avons perdu un pape d’une grande érudition et d’une grande intelligence dont les œuvres écrites n’ont pas fini de nous étonner. L’Eglise connaît actuellement une grande crise mais elle en sortira comme à chaque épisode de son Histoire il faut garder foi et confiance et ne jamais désespérer.

    • Oui, j’ai toujours rêvé que le Cardinal Sarah devienne le nouveau pape.
      Hélas, à la place nous avons un guignol mondialiste, qui semble, de plus, être non chrétien.
      Je souhaite, comme vous  » force et santé au cardinal Sarah et je prie pour que sa voix se fasse entendre »

  3. N’ayant jamais eu -et pour cause- l’occasion de m’entretenir directement avec Dieu , j’ai fait de la tradition mon guide. Depuis le naufrage du Concile j’ai sentiment que le Pape actuel est un people et la doctrine une course éperdue après le monde (quand ce n’est pas Le Monde !) . Ceci m’insurge et devrait m’éloigner des lieux de culte ou du culte même . Singulièrement François n’est pas la phare dans ma nuit mais simplement une espèce d’Abbé Pierre à l’échelle mondiale

  4. Un grand homme s’en est allé. Nous avons eu la chance d’avoir un très grand Pape en la personne de Benoit XVI. Sa renonciation fut une épreuve douloureuse pour nombre de catholiques, mais chacun savait qu’il était toujours là. Puisse t’il veiller sur nous.

    • Et qu’il dise à Jésus ce que François est en train de faire de Son Eglise éternelle , de Ses églises qu’il vide.

      • Hélas : Jésus le voit bien , ce qui se passe sur terre ! Quand le sursaut viendra-t-il ? Benoit ( Joseph) est parti se reposer et se faire consoler; Il a fait et accompli tout son possible pour lutter contre la chienlit sur terre..

  5. Très beau discours de Ratisbonne en 12 principes … « Ne pas agir selon la raison est contraire à la nature de Dieu ». Humilité et Droiture les valeurs des plus grands. On

    A ces « laïcards » endoctrinés, il leur faudrait aussi un peu lire du Bergson, qui savait que sans l’intuition de sa condition humaine à tenir bien haut*, l’intelligence ne peut pas grand chose. Cela leur éviterai de nous lancer leurs sempiternelle slogans stériles. C’est toujours la Foi en ce qui nous dépasse qui déplace les montagnes.

    Je reste convaincu que si Benoît XVI, avait put garder son ministère après le 11 février 2013, nous n’aurions pas eu tous les évènements à partir de 2014 dont nous en constatons les effets aujourd’hui.

    * A tenir bien haut, sans produit dérivé (de type stupéfiant), ni artéfact (Puce dans le cerveau).

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