Faut-il interdire de diffuser les noms et les photos des terroristes ?

Une quinzaine de députés LR viennent de déposer une proposition de loi pour interdire aux médias de diffuser les noms et les photographies de ceux qui sont poursuivis ou condamnés pour terrorisme. La presse pourra toujours diffuser le prénom ou les initiales. Les contrevenants risqueraient 15.000 € d’amende. Cette disposition est déjà appliquée dans le cas de mineurs qui se sont suicidés ou qui font une fugue. Il en est de même pour les clichés de personnes menottées ou entravées n’ayant pas fait l’objet d’une condamnation pénale (d’où, souvent, la veste sur la tête quand un prévenu arrive au commissariat ou au palais de justice).

Les auteurs de cette proposition de loi arguent qu’au-delà des dommages qu’ils infligent, les « fous de Dieu » cherchent la publicité. Ils prospèrent par l’exemple qu’ils donnent.

Contrer les terroristes est un objectif louable, mais en quoi cette nouvelle loi aiderait-elle à les combattre ? Connaître ou pas le nom de famille ne servira à rien, sauf à ne plus distinguer les « Français de souche » convertis des musulmans « d’origine ». (Et encore… le prénom donnera des indications !) Luttera-t-on ainsi contre les préjugés racistes qui associent minorités d’origine maghrébine ou turque à terrorisme ? Je ne pense pas qu’il s’agisse d’un des buts recherchés.

En interdisant les photos, cherche-t-on à éviter qu’on ne transforme ces clichés de pseudo-« martyrs » en poster à la Che Guevara ? Ceux qui seraient tentés par ce fétichisme macabre fréquentent sans doute les sites nauséabonds de Daech et chargeront sans problème, s’ils le souhaitent, les photos des tueurs islamiques.

Cette proposition me semble inutile. Pour noyer dans l’indifférence les crimes des terroristes et, du coup, induire leur disparition, il n’existe qu’une méthode (impossible) à mettre en place : interdire d’évoquer le moindre attentat. Les islamistes continueraient à tuer, mais personne n’en saurait rien. Ils renonceraient vite alors à leur crime. Bien entendu, c’est absolument impossible : nous sommes une démocratie, agir ainsi reviendrait à devenir un état totalitaire qui contrôle la vérité donnée à ses ressortissants, et comme les sites étrangers reprendraient les informations, devrait-on, aussi, contrôler Internet ?

Nous abordons, en fait, un sujet délicat : la censure (et la propagande) en cas de guerre. Elle est nécessaire (Napoléon III a perdu à Sedan, car les journaux ont dévoilé son plan d’attaque). Dans un conflit, comment annoncer des défaites sans démoraliser l’opinion ? Quand des Français meurent lors d’un attentat, notre pays perd une bataille. Il faut néanmoins continuer à donner les noms et les photos des tueurs, mais à chaque fois en insistant sur notre refus de capitulation. Il faut, par notre fermeté, retourner l’impact de ces informations contre les islamistes. Il faut inlassablement prendre exemple sur Churchill et annoncer « du sang et des larmes » avant une victoire certaine, mais lointaine.

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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