Euthanasie : la manipulation des mots 

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Depuis plusieurs semaines, à la demande d’Agnès Firmin-Le Bodo, ministre délégué auprès du ministre de la Santé, un comité « d’experts » planche sur une réflexion lexicale sur la fin de vie. L’objectif ? Adoucir et neutraliser le débat à venir. Face à ce combat lexical, les opposants à l’euthanasie appellent à la vigilance.

Un flou sémantique

« Ce n’est pas la première fois que je remarque combien, en France particulièrement, les mots ont plus d’empire que les idées. » Alors que s’ouvre le débat sur la légalisation ou non de l’euthanasie, les mots de George Sand sont d’une étonnante actualité. Missionnés par Agnès Firmin-Le Bodo, ministre délégué en charge de l’Organisation territoriale et des Professions de santé, des experts – écrivains, professionnels de santé et juristes - travaillent à l’élaboration d’un lexique sur la fin de vie. L’objectif affiché : expliquer aux Français les termes et expressions du débat comme « suicide assisté », « aide active à mourir », « sédation profonde »… Mais derrière cette visée pédagogique se cache un autre objectif non avoué : adoucir la terminologie, la rendre plus neutre voire la dénaturer pour rendre impossible tout débat.

Tout d’abord, le mot « euthanasie », pourtant pièce maîtresse du débat à venir, semble poser particulièrement problème. Emmanuel Macron lui-même reconnaissait, après une visite pontificale, « ne pas aimer le mot euthanasie ». Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, confiait à son tour, sur le plateau de France 2 : « Le mot "euthanasie" n’est pas un joli mot. C’est un mot qui est connoté dans la langue française. » Plutôt que d’employer la terminologie exacte – euthanasie signifie littéralement, selon le site du Sénat, « l'administration délibérée de substances létales dans l'intention de provoquer la mort » -, l’exécutif privilégie désormais l’expression plus floue mais moins cruelle de « fin de vie ». L’autre terme qui inquiète les partisans d’une légalisation de l’euthanasie est celui de « suicide ». Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) relevait ainsi, dans son avis 139« la charge émotionnelle négative qui est rattachée à ce terme ». Et d’ajouter que même si « le suicide assisté constitue bel et bien un suicide », rien n’oblige « nécessairement à le qualifier comme tel ». Autrement dit, le CCNE se soumet à des revendications militantes et accepte de dénaturer le lexique de l’euthanasie. Le flou sémantique ainsi créé inquiète les opposants à une légalisation de l’euthanasie. Tugdual Derville, délégué général d’Alliance VITA, appelle à la vigilance face à cette novlangue qui est en train de voir le jour. Malgré ce nouveau lexique aseptisé, la réalité restera la même : l’euthanasie se généralisera et la France connaîtra les mêmes dérives que son voisin belge.

Un lexique aux mains de militants

Ce nouveau lexique inquiète d’autant plus que, si le ministère de la Santé assure respecter « un pluralisme d’opinions » (Le Monde), force est de constater l’orientation militante de certains de ses membres. Mené par l’académicien Erik Orsenna, ce comité d’experts compte dix membres engagés sur les questions de fin de vie. On trouve ainsi la sœur de Lionel Jospin, Noëlle Châtelet, écrivain et fille de la cofondatrice de l’Association pour mourir dans la dignité (ADMD), qui est ouvertement favorable à l’euthanasie. De même que Martine Lombard, juriste, qui appelle, elle aussi, à une légalisation de l’euthanasie. Après avoir lancé une convention citoyenne dont les conclusions du gouvernement sont déjà connues, l’exécutif souhaite donc créer un lexique dont on soupçonne l’orientation. « La bataille des mots de la fin de vie est déclenchée. Si nous laissons faire, en toute logique, prononcer le mot euthanasie nous sera interdit explicitement ou implicitement », avertit Tugdual Derville sur son compte Twitter.

Peu importe les périphrases que le gouvernement emploiera, avec cette bataille des mots, il tentera d’empêcher tout débat. Car comme l’écrivait George Orwell dans son livre prophétique 1984, « nous détruisons chaque jour des mots. Nous taillons le langage jusqu’à l’os. À la fin, nous rendrons littéralement impossible le crime par la pensée, car il n’y aura plus de mots pour l’exprimer. »

Clémence de Longraye
Clémence de Longraye
Journaliste à BV

Vos commentaires

63 commentaires

  1. Et ca vous étonne????? cela fait plus de 70 ans que c’est ainsi et que la droite utilise le vocabulaire de la gauche!!! Prenons « fachiste » lisez la fiche wikipedia de mussolini, ou mein kampf, et dites moi ce qu’il y a de droite? mais personne ne dit rien depuis 70 ans! L’école libre, cela vous rappelle quelque chose??? Tout le monde parle maintenant de « Privé »!! maintenant on a la GPA! l’achat d’un être humain c’est pourtant la definition de l’esclavage, Qui ose utiliser ce mot? (un papa, une maman! cela ne semble pas très efficace!) Et maintenant on a les migrants esclaves eux aussi ( importation de main d’oeuvre pas chère: allez vers 8:00 à proximité d’un magasin de bricolage: il sont tous là attendant un boulot pour la journée!) Pourquoi personne n’ose dire ce mot qui fâche! La gauche à compris depuis longtemps, la droite avale sans réagir tous le vocabulaire qu’ils veulent nous imposer! Pourquoi s’arrêteraient ils??? dans 2 mot les mot euthanasie, sera censuré par la droite au profit de « fin de vie! » tout comme GPA et Migrants on remplacé le mot Esclavage!!! Manque de courage, toujours?? Alea jacta est!

  2. Il n’ont qu’à employer les termes: »Exécution sommaire de bouches à nourrir inutiles à la société. » Au moins, cela aura le mérite d’être on ne peut plus clair!

  3. Oui, méfions-nous des mots dénaturés, qui évacuent les débats sur le fond :
    – euthanasié = tuer (que l’on soit d’accord ou non avec la légalisation de l’euthanasie)
    – décédé = mort ( il a causé de décès de… Non, il l’a tué)
    Dans l’autre sens, si je puis dire, des mots sont employés à toutes les occasions, en les déformant :
    – droite, ultra-droite : je ne connais de parti de droite en France que Renaissance et les macronistes (car, politiquement, dans l’imaginaire des gens, « droite » a une notion d’élitisme, ce que promeut Renaissance avec la mondialisation). Et aucun d’extrême-droite. Et je ne connais qu’un seul mouvement d’extrême-droite en France = les antifas (qui prônent la violence pour faire taire ceux qui ne pensent pas comme eux).
    – fascisme : dictature résultant d’une dégénérescence du socialisme, comme le communisme et le nazisme (qui ajoute l’horreur du racisme à l’horreur de la dictature). A leurs origines, tous ces partis étaient de gauche, socialistes. La pire dictature actuelle, qui fait vivre son peuple en enfer : celle de la Corée du nord (communiste).

  4. Non et non à l’euthanasie…que ce gouvernement cesse de vouloir zigouiller les vieux et les malades …l’horrible individu allemand est mort depuis uncertain temps ..voilà donc que cela va recommencer …….la tuerie .

  5. Rappelons qu’une personne euthanasiée demande sa mort.
    Quand ce n’est pas le cas c’est un homicide.
    Quand on a tout mis en oeuvre pour y arriver, c’est un assassinat.

    Empêcher une hospitalisation d’une personne âgée et malade, interdire son médecin de le soigner (ou soulager), l’intuber quand son état empire (donc provoqué par l’absence de soins) et le traiter au rivotril (complètement contre-indiqué pour les maladies respiratoires), c’est n’est pas une euthanasie. Devinez donc ce que c’est…

    • « Rappelons qu’une personne euthanasiée demande sa mort.
      Quand ce n’est pas le cas c’est un homicide. »
      Si, celui (ou celle) obligé de pousser la seringue est parfaitement conscient de tuer une personne qui, si elle étai bien prise en charge, ne voudrait pas mourir.
      C’est donc un meurtre, avec, pire, le fait que le bourreau n’est, dans 99% des cas, absolument pas d’accord pour le faire, mais est acculé par chantage, souvent devant les yeux du prescripteur, qui lui, ne veut pas se salir les mains.

  6. ‘es mots sont essentiels, toutefois la bataille des mots n’ est pas essentielle, elle risque de masquer les réalités et les débats sincères.
    Le sujet c’est tout de même les manipulations médicales pour maintenir en vie et en souffrance des personnes. Jusqu’où ne pas aller?
    C’est aussi les risques de dérives conduisant au mépris de la vie pour des raisons inavouable.

    • « Jusqu’où ne pas aller? »
      C’est le but des réunions des Comtés d’éthique.
      Dans certains cas, on arrête les traitements inutiles, tout en gardant les anti-douleurs et la nature reprend alors ses droits, ce sans la douleur physique associée.

    • Oui, parfaitement.
      Et aussi la peine de morts pour ceux qui obligent le personnel soignant à provoquer la mort de leurs patients.

    • Dans certaines pratiques médicales  » courantes », on y est à la limite.. heureusement qu' »on  » délègue la responsabilité des  » incidents », soit à l’anesthésiste, soit à la faible résistance de la carcasse confiante, n’est ce pas ?

    • pourquoi  » braves gens » ? ceux qui lisent et obeissent aux directives anticipées, contrairement à ceux qui se croient supérieur à tout et en tout ???

  7. Tricherie et mensonges, c’est la ligne de conduite de la macronie. Il est facile de toucher à la sémantique et d’ainsi faire disparaitre des mots qui dérange pour en créer de nouveaux dans lesquels le bon sens se perd.

  8. Euthanasier , comme avorter , c’est tuer , tout simplement . La gravité n’est pas liée au mot employé , cependant chaque mot a un sens propre . Nommer les choses est de première importance en tout débat .

  9. Le gouvernement n a pas hésité a euthanasié les vieux dans les EHPAD sans aucun recours ni lois ni responsabilité. Je ne vois pas ce qui l arrêtera pour se débarrasser de ces vieux qui coûtent. Pas les héritiers en tous cas!

  10. La manipulation des mots est à l’oeuvre particulièrement quand les promoteurs d’une réforme ont bien conscience qu’ils touchent à un domaine sensible, quand l’emploi du terme adapté risquerait de trop bien mettre en évidence le caractère pas anodin de l’acte, le meilleur exemple étant l’emploi du sigle IVG pour nommer l’avortement.

  11. Ne plus appeler les choses par leurs noms pour commettre les pires atrocités en se donnant bonne conscience est la spécialité de ce gouvernement .

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