Et maintenant, la gestation par mère porteuse… morte !

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Le principe d’indisponibilité du corps humain présente l’immense défaut de ne pas être inscrit explicitement dans notre droit positif français, par exemple dans notre Constitution fourre-tout ou dans une Déclaration des droits de l’homme qui serait applicable. Certes, celle de l’ONU de 1948, dite universelle, énonce à son article premier que « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits », et cette dignité ontologique sert de fondation à cette indisponibilité du corps humain. Mais il faut bien admettre que la philosophie du droit anglo-saxon aurait plutôt tendance à considérer le contrat comme plus important qu’un principe abstrait comme la dignité humaine. Ainsi, en France, nous avons (et c’est heureux !) des juges qui condamnent les lancers de nains consentants, mais nous sommes un peu seuls. Il est, hélas, ici d’autres occurrences où ce principe passe par pertes et par le profit des autres.

Puisqu’un don d’organe peut sauver des vies, pourquoi ne pourrait-il pas aider à en créer ? C’est l’idée remise au goût du jour par le Dr. Anna Smajdor, professeur de philosophie qui surfe sur une récente publication « scientifique ». Elle propose que l’utérus des femmes en état de mort cérébrale et qui y auraient consenti soit utilisé afin d’y implanter un embryon. Elles pourraient être maintenues en survie artificielle et se transformer en autant d’incubateurs biologiques pendant la durée de la gestation. S’il existait une métrologie du glauque, la finale serait très disputée pour la graduation maximale avec l’ectogenèse des incubateurs imaginés par Aldous Huxley dans Le Meilleur des mondes. En gros, c’est une gestation pour autrui (GPA) avec une esclave-gestatrice morte. Reste à déterminer, pour les cupides du marché de la reproduction à tout prix, si le coût de maintien en vie pendant la grossesse sera inférieur à celui de la mère porteuse ukrainienne, russe, indienne, nigériane ou d’Asie du Sud-Est. Ils auront, en outre, beau jeu d’argumenter que le risque encouru par la gestatrice est nul, puisqu’elle est déjà morte. Pauvre enfant qui franchirait les neuf premiers mois de sa vie ainsi, sans la symbiose permanente avec sa mère vivante et celle plus rare et plus lointaine de son père.

Les réactions de rejet quasi unanimes qui se lisent sur les réseaux sociaux ou en commentaires des articles nous disent, certes, que le bon sens et le respect de la dignité de l’Homme, avec un grand H, n’ont pas entièrement disparu (même si, en l’occurrence, il s’agit de Femme, avec un grand F). Mais il est, hélas, possible de percevoir autre chose : la fenêtre d’Overton vient juste d’être ouverte, nous n’en sommes sans doute qu’au stade très précoce de l’impensable. D’autres étapes suivront : idée radicale, puis acceptable, ensuite raisonnable et, avec un bon marketing à grand coups de pathos et sirupeux de bon sentiments, elle franchira le seuil du populaire avant de devenir une politique publique.

Des dystopies modernes nous présentent l’avenir des femmes comme une inéluctable aliénation reproductive. Pensons à Margaret Atwood et à sa Servante écarlate ou à Amin Maalouf et son Premier Siècle après Béatrice. Qu’il soit permis, ici, à un vieux représentant honni de l’hétéropatriarcat caucasien et catholique de crier halte au feu ! Nos désirs d’enfanter n’ont pas à être jugés par d’autres, mais tous les moyens pour y parvenir ne sont pas acceptables. François Rabelais a encore une fois raison : « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme. »

Vos commentaires

40 commentaires

  1. Werber avait raison. La société humaine se dirige lentement vers la fourmilière avec une « pondeuse » alimentée par des « ouvrières » et qu’on a « ensemencée » à partir d’une « spermathèque ». Les fourmis n’ont pas de problème de « genre » : elles sont asexuées……. (comme les futurs humains ?)

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