En politique, c’est comme pour les rillettes : « Nous n’avons pas les mêmes valeurs ! »

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« Nous n’avons pas les mêmes valeurs », disait la dame des rillettes, coincée dans son tailleur et son fauteuil de velours rouge. À comprendre, « nous ne sommes pas du même monde » : il y a vous et il y a nous, il faudrait voir à ne pas confondre.

Allégorie de la rillette ou du pâté qui se tartinent chez les "sans-dents", comme disait François Hollande quand il pétait dans la soie de l’Élysée.

C’est drôle, d’ailleurs, cette récurrence de la charcuterie pour désigner les classes qui, souvent, ne sont plus laborieuses mais chômeuses : le peuple qui ne sent plus la sueur sent encore le pâté. Passons.

Reste que, définitivement, La République en marche et celle qui piétine ne sont pas du même monde. Même pas de la même galaxie. La preuve, s’il en fallait encore une, par Élise Fajgeles, député LREM de Paris. Aux prises avec deux gilets jaunes sur le plateau de CNews, dans "Morandini Live", elle a admis ne pas connaître le montant du SMIC. Plus qu’énervé, l’un de ses interlocuteurs a quitté l’émission.

On peut ignorer le montant du SMIC… à quelques dizaines d’euros près, peut-être, mais pas quand on est député de la majorité qui gouverne, encore moins quand on est invité sur un plateau de télé face à des gens qui dénoncent, justement, la distance qui les sépare de leurs élus.

Le plus grave est que madame Fajgeles n’en éprouve aucune honte. Elle a répliqué à son interlocuteur outré : « Alors, je vais vous dire, vous me faites une colle en effet, je ne connais pas le niveau du SMIC, mais je sais que c'est difficile de vivre avec le SMIC. » Ça ne l’a pas satisfait, le gilet jaune en question, alors il a insisté : « On devrait vous faire passer un CAP pour être député. » Réponse de la dame : « Je suis en train de travailler sur la réforme de la Justice, et je connais parfaitement ce sujet-là. » Heureusement. Et le gars en face connaît peut-être tout de la soudure à l’arc ou du béton armé. Simplement, ça n’est pas le problème.

Quelques heures plus tard, madame Fajgeles s’est défendue sur Twitter : « Ne pas arriver à dire le montant du #SMIC sur un plateau télé est une faute. Ce n'est ni mépris ni condescendance envers ceux qui galèrent. Je me suis moi-même retrouvée seule avec mon petit garçon au RMI il y a quelques années. Ça ne vaut pas les menaces de mort que je reçois. »

Tout est dit de la folie de ce temps, entre une élue dont Emmanuelle Ménard disait hier, ici même : "Cette députée m’apostrophe régulièrement dans l’Hémicycle quand je prends la parole parce qu’elle me reproche de parler d’immigration… Elle refuse le sujet » (http://www.bvoltaire.fr/emmanuelle-menard-ce-texte-de-loi-sur-la-fessee-est-sans-queue-ni-tete/), et des crétins hystérisés qui brandissent la menace physique à la moindre occasion.

Comment sort-on de tout cela ? Comment fait-on pour rapiécer le tissu de ce pays qui se déchire et s’en va en lambeaux ?

Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

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