Bon, voilà, on a la position d’Emmanuel Macron, et donc – vous verrez - de La République en marche, sur le port du voile : « Le port du voile dans l’espace public n’est pas mon affaire. » Cela a au moins le mérite d’être clair. Déclaration faite à La Réunion. Et le Président précise : « Dans les services publics, à l’école, c’est mon affaire. Dans les services publics, il y a un devoir de neutralité. Quand on éduque nos enfants, on demande qu’il n’y ait pas de signe religieux ostentatoire. Après, ce qui se passe dans l’espace public, c’est pas l’affaire de l’État ou du président de la République. »

Passons sur la trivialité du « c’est pas mon affaire ». Autrement dit, rien à faire, pour ne pas dire plus ou pire. Rappelons-nous les propos du candidat Macron : « Il n’y a pas de culture française. » Au fond, le « c’est pas mon affaire » relève de la même philosophie : la France est une sorte d’« open space » où l’on peut vivre, s’habiller comme on veut. Traditions, us et coutumes, tout ça, c’est pas mon affaire. Venez et vivez en France comme vous êtes. Le trop subtil « pas souhaitable » de Jean-Michel Blanquer, au sujet du port du voile, n’aura pas tenu longtemps et ce qui n’était « pas conforme à la civilité », selon les mots de Macron en avril 2018 devant Bourdin et Plenel, n’est donc pas l’affaire de l’État. Dans un pays comme la France, façonné, conformé par l’État, ces propos résonnent bien curieusement. On aimerait, du reste, que dans bien des domaines, ça soit un peu plus l'affaire de l'État et dans d'autres, en revanche, un peu moins...

En tout cas, la prise de position du président de la République, que l’on peut qualifier de libérale, à l’évidence, ne peut qu’encourager le communautarisme. Ce communautarisme que, dans le même temps, il dénonce ! Mais Emmanuel Macron n’est pas à une contradiction près. En effet, que dit-il dans le même discours ? « Le voile, aujourd’hui, est utilisé dans certains quartiers, est utilisé dans certaines circonstances, par certains - qui ne sont pas majoritaires -, comme un élément de revendication, et comme un des instruments de séparatisme dans la République, de ce qu’on appelle un communautarisme. » On peut d’ores et déjà prendre les paris que, dans les semaines et les mois qui vont venir, le port du voile va se propager à grande vitesse dans le pays, après ce « c’est pas mon affaire » qui ne peut être perçu que comme un encouragement. On peut même imaginer des voiles sur lesquels seront imprimés "C'est pas ton affaire". On prend les paris ?

Emmanuel Macron ne veut pas affronter, aujourd’hui, le problème de face. Ne veut et, peut-être, ne peut. Comme l’a très bien résumé Gilles-William Goldnadel, « Bellatar plutôt que Blanquer. Trudeau plutôt que de Gaulle. La fuite plutôt que le courage. »

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25 octobre 2019 à 19:23

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