Elle sera sous le trône de Charles III : d’où vient la pierre du destin ?

pierre du destin

Un royaume est fait pour durer une éternité mais, comme tout édifice, sa construction commence par une pierre. Pour le Royaume-Uni, l’une de ces fondations symboliques n’est autre que la pierre de Scone, appelée aussi « l’oreiller de Jacob » ou « la pierre du destin ». Cette pierre sera placée sous le lourd fauteuil du roi durant le sacre. Élément mythique indispensable à tout prétendant à la couronne d’Écosse souhaitant se faire sacrer, cette pierre aurait des origines multiples et une histoire millénaire qui se fond avec la destinée du pays et en fait une véritable terre de légende.

À l’aide des regalia comme l’épée Joyeuse de Charlemagne pour le royaume de France ou encore la Sainte Lance pour le Saint-Empire romain germanique, chaque monarchie a tenté de renforcer son pouvoir à l’aide d’objets à l’aura fabuleuse et aux origines mythologiques.

Ainsi, la pierre du Destin serait liée aux premières peuplades celtiques du nord de la Grande-Bretagne. On raconte ainsi que ce rocher serait l’une des cinq pierres magiques ramenées par les dieux barbares. D’autres parlent d’une origine encore plus lointaine, d’un artefact ramené par une princesse de la mystérieuse Égypte. Cette femme, prénommée Scota, aurait même donné son nom à cette nouvelle contrée : Scotland. On présente même la pierre comme le rocher sur lequel le patriarche biblique Jacob, fils d’Isaac, aurait dormi à Bethel. Cette dernière version de l'histoire permettait de donner une dimension chrétienne à cet objet mentionné pour la première fois au cours du IXe siècle. Cette histoire légitime ainsi le roi aux yeux des croyants et accrédite son droit à commander. Un droit accordé par Dieu, à l’image de la Sainte Ampoule reçue par Clovis en 496 et utilisée par la monarchie française jusqu’en 1825, faisant du souverain le lieutenant de Dieu sur Terre.

L’ensemble des souverains écossais ainsi que leurs successeurs devaient être sacrés, debout ou assis, sur cette pierre. Lorsqu’elle n’était pas utilisée, la pierre reposait alors dans l’abbaye de Scone, aujourd’hui en ruine. En 1296, le roi d’Angleterre Édouard Ier, réprimant une révolte de son royal suzerain écossais John Balliol, se saisit de la pierre, l’emporta à l’abbaye de Westminster et la plaça sous son trône afin de rappeler à tous la domination d’Albion sur l’Écosse. En 1328, Édouard III s’engagea à rendre la pierre au pays de William Wallace : il faudra aux Écossais attendre plus de six siècles avant que cela ne se réalise.

En 1950, un groupe de patriotes écossais décida de voler la pierre à Westminster pour la rapatrier et la cacher en Écosse. Les voleurs estimaient que l’Angleterre, après un an de recherche infructueuse, n’oserait pas récupérer l’artefact. Ils le placèrent à la vue de tous, dans l’abbaye d’Arbroath. Londres, ne se laissant pas décontenancer, récupéra la pierre qui servit deux ans plus tard pour le sacre de la jeune reine Élisabeth II. Cette dernière accepta, en 1996, que l’objet puisse être rendu à l’Écosse au sein du château d’Édimbourg où étaient déjà gardés les Honneurs de l’Écosse, au sein de la Crown Room.

Revenant exceptionnellement à Westminster pour le sacre de Charles, cette pierre va de nouveau lier son histoire et son destin à celle de la monarchie britannique. Le nouveau souverain doit ainsi faire face, comme ses royaux prédécesseurs, aux volontés divergentes de ses peuples composant les quinze royaumes du Commonwealth et essayer de devenir un nouveau symbole d’unité face au désir d’indépendance de ses États, notamment l’Écosse.

Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

11 commentaires

  1. Cette histoire est extraordinaire. Pourquoi ne l’avoir pas raconté plus souvent ?
    Mais aussi lors de la retransmission du couronnement, TF1 s’est plus appliquée à des propos ineptes qu’à un véritable reportage.
    Léon Zitrone où es-tu ?

  2. Il convient de préciser que l’ensemble de la prestation de ce jour de CHARLES III, parait avoir, par anticipation, répondu à la question posée par la dernière phrase de cet article. l’avenir démontrera si les excellentes dispositions du nouveau souverain lui assureront le succès nécessaires.

  3. Une bien belle histoire, digne de l’épée du roi Arthur, de l’enchanteur Merlin et des chevaliers de la Table Ronde.

  4. Les pouvoirs ont souvent besoin de symboles, pour certains c’est une pierre, pour d’autres des casseroles.

  5. Profond mépris pour ce monsieur ..et dire que c,est le roi …avec pierre ou non ..pas plus de chance ..

  6. Très interessant .Ce roi qui condamne le foie et accepte toutes les fois ….ne semble pas du tout digne de ces traditions .

  7. Alors, si cette pierre a une origine égyptienne, c’et bizarre que rama yade n’en ait pas parlé !

  8. Merci pour ce rappel. Mais ce Charles semble bien peu représentatif de ces mythes fondateurs dont il semble ignorer la portée et vouloir se défaire.

    • Tout à fait d’accord
      Ce Roi n’a rien compris au sujet de son peuple qui s’est laissé envahir par des religieux qui vont le réduire à la dimmitude.

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