Merci à M. Bussereau de relancer enfin le feuilleton des chamailleries LR qui avait du mal à repartir pour une énième saison en ce mois de janvier 2018. Pour les plus jeunes, petit rappel historique sur le CV chargé du personnage : 65 ans, toujours dans la roue de MM. Juppé et Raffarin, il fut ministre de 2002 à 2010 (Budget, Agriculture, Transports), député jusqu'en 2017 et, surtout, président du conseil départemental de Charentes-Maritimes depuis 2008, ce qui en fait aujourd'hui le président de l'Association des départements de France. M. Bussereau est une institution à lui tout seul.

Et il vient donc d'annoncer au JDD qu'il quittait son parti car il reproche aux nouveaux porte-parole nommés par M. Wauquiez de tenir des "propos qui pourraient être ceux du FN" (il vise notamment Guillaume Peltier, qu'il poursuit d'ailleurs d'une vieille haine recuite depuis son "Qu'il se taise !" de 2014). Autre point de désaccord : "l'absence d'amour de l'Europe". Les prochaines élections étant les européennes, en juin 2019, M. Bussereau a donc décidé de se mettre "en congé" du parti jusque-là.

Sur l'état de sa famille politique, ce juppéiste historique, ardent adversaire de toute "porosité" avec toute autre droite que la sienne, a une analyse qui mérite le détour :

Avant, c’était la CDU allemande : un mouvement rassemblant les différentes sensibilités de la droite et du centre [...] mais aujourd'hui, Les Républicains sont devenus la CSU, sa branche conservatrice et droitière.

Pas inintéressant. À condition d'apporter quelques précisions. D'abord, l'UMP puis LR n'ont jamais toléré en leur sein un mouvement comme la CSU, identitaire et conservateur. Au contraire, la ligne centriste et libérale de M. Juppé, fondateur de l'UMP, n'a eu de cesse de marginaliser et d'étouffer toute tradition gaulliste ou franchement droitière, aussi bien les idées que les hommes. Donc, non, l'UMP n'a jamais été la CDU s'appuyant sur une CSU respectée. Alors qu'aujourd'hui ce courant droitier soit parti ailleurs, c'est-à-dire au Front national, ou revienne par la fenêtre, un temps avec Nicolas Sarkozy, aujourd'hui avec M. Wauquiez, il n'y a là rien d'étonnant. Chassez le naturel...

Et puis M. Bussereau, qui semble ne jurer que par le modèle de la droite allemande, devrait justement regarder à quoi a conduit une CDU allemande qui n'écoutait plus sa CSU, justement sur les questions d'immigration et d'identité : Mme Merkel réalisa, cet automne, le plus mauvais score de toute l'histoire de son parti et elle est contrainte, aujourd'hui, de s'allier avec le SPD. Quand la CDU s'est juppéisée, elle a dégringolé... Il pourra nous dire que, pour une fois, la France avait un temps d'avance et que, chez nous, M. Macron a déjà réalisé cette grande coalition, avec un juppéiste Premier ministre et un socialiste provençal, loser dans sa région, à la tête du parti majoritaire.

Tiens, M. Bussereau va-t-il adhérer à LREM, qui correspond si bien à ses aspirations ? Il affirme ne vouloir rejoindre ni les anciens LR « constructifs », rassemblés dans Agir, ni La République en marche, mais il continuera à "travailler avec" Valérie Pécresse et son mouvement Libres !, et Christian Estrosi et son mouvement La France audacieuse. En fait, M. Bussereau adhère au club des "J'aime pas Wauquiez, je me bouche le nez dès que j'entends les mots “droite” ou “immigration” mais je reste dans ce parti nauséabond".

Car, vous l'avez compris, ce départ n'en est pas un, c'est un simple "congé". Pour le "départ définitif", M. Bussereau préfère attendre :

Je verrai au moment de la campagne des élections européennes, en fonction du choix de ses candidats et des idées qu’ils porteront, si je peux encore voter pour ma famille politique. Sinon, je passerai de la mise en congé au départ définitif.

À 65 ans, il serait peut-être temps de songer au départ définitif, non ? Mais pour le moment, M. Bussereau préfère le parti du c... entre deux chaises.

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15 janvier 2018 à 19:56

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