Contrairement au premier confinement, les catholiques de France ne se sont pas laissés surprendre par le reconfinement et n’ont plus joué abusivement de la carte de l’obéissance aveugle. Au printemps dernier, l’interdiction du culte est arrivée sans prévenir, et bien que, déjà, cela sentait l’autoritarisme, bien peu de gens osaient y croire. Pâques, la fête chrétienne par excellence, s’en est trouvée confinée elle aussi.

Le déconfinement lui-même avait des allures d’allégeances républicaines. Imposer le masque aux fidèles semblait déjà aberrant pour un lieu comme l’église. On inventa, en mai, une sorte de tenue réglementaire, et un protocole imposant, aux allures de rituels, alors que tant de prêtres peinaient déjà beaucoup à respecter le simple rituel liturgique. Certains prêtres ont ainsi été piqués d’un zèle républicain à faire tout ce qu’il fallait pour ne pas subir la sentence du reconfinement.

Bien mal leur en a pris, eux qui espéraient les faveurs politiques pour avoir été gentils, respectueux, obéissants - et naïfs, en définitive. La mécanique qui interdit nos messes aujourd’hui était déjà lancée lors du premier confinement, puis du déconfinement. L’occasion, pour la République, n’est-elle finalement pas trop belle de mettre à genou l’Église, qu’elle n’a jamais complètement perdue de son viseur ? Les faits sont là : beaucoup de fidèles ne sont pas retournés à l’église, les finances viennent à manquer, des chrétiens eux-mêmes songent plus à respecter le port du masque ou la distanciation sociale qu’à se tourner vers Dieu et son prochain, masqués ou non.

En définitive, cette histoire de confinement-déconfinement-reconfinement est assez simple. On ne peut reprocher à l’Église de mépriser son prochain. On ne peut, par son histoire même, lui reprocher de ne rien savoir à la prise en charge des malades. Elle était experte dans ces domaines avant que l’État laïc n’existât ou ne gérât un seul hôpital - qu’elle a inventé. Pourtant, c’est désormais César qui explique à Dieu comment faire. L’hôpital laïc, en plein délabrement, vient se moquer de la charité chrétienne. Mais à la différence de l’État, l’Église n’a jamais perçu ni l’hôpital, ni les malades, ni ce monde sans la messe. Elles ont toujours été de pair. Elles sont les deux faces d’une même prise en charge, alliant la souffrance des corps à la consolation des âmes. L'Église donne aux soignants la dimension complète de l’accompagnement. À ce titre, elle est bien plus experte en humanité que la médecine aux allures de scientisme qui opère depuis dix mois.

Quand on interdit la messe, c’est qu’on a déjà sapé beaucoup des libertés fondamentales. La « liberté de culte », qui est en réalité une « liberté d’assemblée », est la liberté du plus pauvre et du plus fragile. Il y a une incompatibilité de nature entre protéger les plus faibles et les priver de ce sacrement. Pour le chrétien fervent, c’est une évidence. Pour l’État laïc, c’est justement un rappel essentiel qu’en ayant tout fait pour préserver les corps des gens dans un principe de précaution extrême, on les coupe alors de toute transcendance. Au même titre qu’on ne vit pas uniquement dans un corps sain, mais aussi de partage, de festivités, de relations et de tout un tas de choses qui sont les prémices de la transcendance, et dont nous sommes aussi privés en ce moment. Pour la nature humaine, ceci est une violence en soi.

À ce titre, quand ni le gouvernement ni le Conseil d’État n’ont donné gain de cause à la liberté de culte, le gouvernement révèle alors combien il s'est coupé de sa fonction première - servir le bien commun - pour un Veau d’or.

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08 novembre 2020 à 16:17

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