Avec son dernier livre, Hillary Clinton aide le trumpisme

Les États-Unis ne se passionnent plus pour madame Clinton… à part quelques vieilles carnes élevées dans la morale du ressentiment des années soixante. Elle a donc bien été reçue ce dimanche par Jane Pauley, la journaliste de CBS.

Objectif : assurer la promotion de son dernier livre à consommer sur place. Dans What Happened ("Ce qui s’est passé"), Hillary Clinton fait ce qu’elle sait faire : se présenter en victime.

N’est pas Maggie Thatcher qui veut, et il est difficile de jouer à la fois dans le registre de la dame de fer et celui de la pauvre petite fille riche. Avec ce livre, Hillary escagasse tout le monde, en particulier les démocrates. À preuve ce cri du cœur d’un financier du parti autant que de sa campagne : "Shut the f*** up and go away!" (en moins grossier: "Ferme-la et dégage !").

Le donateur, repris par le Daily Caller du 7 septembre, résume : "Elle nous porte tort par son égoïsme."

Et c’est bien de cela qu’il s’agit : la reine a vécu jusqu’ici sur un grand train, sa fondation est quasi morte, elle a besoin de sous… et de revanche. Il lui faut récupérer son dû. On lui a volé cette élection dont elle était sûre d’avoir pipé tous les dés !

Or, quel que soit le sort futur de Trump (le procureur Mueller, missile des républicains #NeverTrump, veut sa peau), le pays vient de connaître un saut qualitatif brusque : la fin, à droite comme à gauche, du clientélisme identitaire.

Et c’est le retour du nationalisme économique qui renoue avec une ligne constante, de Jefferson aux Roosevelt. Une ligne rejetée par la récente expérience mondialiste qui détruit la citoyenneté américaine. Tel est, en tout cas, le point de vue de Steve Bannon, ex-président de la campagne Trump et ex-conseiller stratégique de la Maison-Blanche (CBS, "60 Minutes", 10 septembre).

Hillary ne l’a pas vue venir, et Bannon assène : "Hillary Clinton n’est pas très intelligente. Tout le monde dit qu’elle est si smart, si intelligente… Elle ne saisit pas. Elle ne saisit pas ce qui est important et ce qui ne l’est pas…"

Dans son livre et son interview sur CBS, elle n’a en effet "pas saisi". Elle persiste. Rien n’est de sa faute ! C’est la faute de tout le monde : Comey (FBI), les Russes, la Macédoine, les fausses nouvelles, la Maison-Blanche, WikiLeaks, Bernie Sanders, le Parti démocrate, la présence physique de Trump dans les débats, ses conseillers de campagne, la misogynie, la nostalgie… et surtout les Blancs !

On comprend que certains démocrates "classiques" soient agacés, au moment où ils essaient de tourner le dos au tribalisme électoral comme à l’éloge des minorités qui leur a coûté cher. Du pain blanc pour le trumpisme ! Plus Hillary Clinton ressassera son ressentiment, plus les Américains comprendront son mépris des classes laborieuses "oubliées", donc les raisons de la victoire de Trump.

Son taux d’opinion favorable est de 30 % (NBC). Et les démocrates ne voient pas la tournée promotionnelle de son livre d’un bon œil. Dans Politico (du 7 septembre), le député démocrate californien Jared Huffman résume : Ça vient peut-être au pire moment, alors que nous conduisons des batailles institutionnelles et politiques lourdes de conséquences, et que nous tentons de rassembler le parti… cela nous est difficile de voir maintenant s’ouvrir un cycle médiatique centré sur les excuses et le blâme."

Elle n’a pas "saisi" non plus qu’Obama prépare la candidature de sa femme Michelle. Sa Némésis…

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 17:38.
André Archimbaud
André Archimbaud
Consultant stratégique

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