Constitutionnalisation de l’IVG : le 25e lifting de la vieille dame

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Faire parler les morts est chose aisée, mais tant pis, allons-y. Que diraient, ce soir, le général de Gaulle et Michel Debré, pères fondateurs de la Ve République, après ce vote du Parlement réuni en Congrès à Versailles pour introduire dans notre Constitution le droit à l’avortement ? Les temps ont changé, me direz-vous, les mœurs évolué et notre texte fondamental doit suivre la course effrénée du temps. Vraiment ?

Constitution fourre-tout

Posons la question différemment : de Gaulle et Debré auraient-ils pu imaginer que cette Constitution, qu’ils avaient tant souhaitée, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, pour notre pays, afin de lui donner des institutions solides, deviendrait une sorte de fourre-tout en y intégrant des articles relevant plus du « sociétal » que de l’organisations des pouvoirs publics ? Qu’on y introduirait, un jour, un principe de précaution et une charte de l’environnement ? Merci, Chirac. Qu’on supprimerait, dans l’article traitant des conditions de destitution du président de la République, le concept de « haute trahison », qui avait tout de même de la gueule et des accents mâles de République romaine (SPQR !), pour le remplacer par celui bien fadasse de « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat ». Merci encore, Chirac. Et qu’on y introduirait le droit à l’avortement ? Merci Macron.

A-t-on dit à Mélenchon qu’on y était depuis belle lurette, en VIe République ?

Faisons les comptes : notre Ve République vient de subir son 25e lifting. Autant dire que la dame ne ressemble plus vraiment au charmant bébé porté sur les fonts baptismaux, il y a maintenant plus de 65 ans, par le général de Gaulle et Michel Debré : trois liftings sous de Gaulle, deux sous Giscard, trois sous Mitterrand, quatorze sous Chirac, deux sous Sarkozy et, enfin, un (pour l’instant) sous Macron. Il y eut, bien sûr, toutes les modifications qui consistèrent à dépouiller par petits bouts notre souveraineté nationale. On ne va pas vous faire la liste de ce lent et pénible calvaire. Mitterrand, Chirac et Sarkozy furent des agents immobiliers particulièrement efficaces de cette vente à la découpe de la souveraineté française, patiemment conquise par nos rois au fil des siècles et défendue farouchement par le grand Charles. Dilapider un patrimoine a toujours été plus aisé pour des héritiers indignes que de le constituer. Il paraît que Jean-Luc Mélenchon et ses affidés insoumis sont les défenseurs acharnés d’une VIe République. Quelle blague ! Leur a-t-on dit, à ces gens-là, qu’on y était depuis belle lurette, en VIe République ? Ah bon ? Le quinquennat et l’hyper-présidentialisation qui en a découlé… Merci encore à Chirac et aussi à Jospin.

Et maintenant, la dissuasion nucléaire dans la Constitution ?

Maintenant que le sceau de la République a été apposé sur cette nouvelle modification constitutionnelle gravant dans le marbre le droit pour les femmes (on attend les réactions à cette mesure restrictive dans un pays où, pour certains, un homme peut être enceint) à l’avortement, on peut imaginer que désormais le « champ des possibles » est résolument ouvert. Du reste, la proposition de Marine Le Pen, faite ce 4 mars, d’inscrire la dissuasion nucléaire dans la Constitution « comme un élément inaliénable de notre souveraineté » n’a rien d’incongru, bien au contraire, d'autant que les Français, depuis plus de soixante ans, ont chèrement payé cette dissuasion avec leurs impôts. À bien y réfléchir, une telle inscription a autrement plus sa place dans la Constitution que le droit à l’avortement. En effet, son article préambule ne rappelle-t-il pas que le « peuple français proclame solennellement son attachement [...] aux principes de la souveraineté nationale » ? Or, notre dissuasion nucléaire, ultima ratio regum, est la clé de voûte de cette souveraineté. Un lifting qui rappellerait à la vieille dame sa splendide jeunesse...

Mais quand Emmanuel Macron déclare, comme il l’a fait le 30 janvier dernier en Suède, que « la France a la responsabilité de mettre sa capacité de dissuasion nucléaire à la disposition de l’Union européenne », on peut avoir quelques doutes sur les chances que cette proposition de Marine Le Pen puisse prospérer tant qu’Emmanuel Macron, qui n’a à la bouche que l’expression « souveraineté européenne », sera au pouvoir.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

40 commentaires

  1. Toute cette histoire est grotesque. C’est une tempête dans un verre d’eau pour, une fois de plus, détourner l’attention des Français des catastrophes qui se produisent tous les jours depuis l’arrivée de Macron au Pouvoir. Catastrophes dans tous les domaines. Pour entretenir le feu, je suggère un nouveau Congrès dans 6 mois, pour inscrire le remboursement des préservatifs dans la Constitution. C’est primordial !

  2. La loi permet de tuer dans « l’oeuf  » l’enfant à venir alors que nous avons tout ce qu’il faut depuis le siècle dernier pour éviter une grossesse. Cette loi ne devrait s’appliquer que pour des cas très particuliers comme une grossesse à risques pour la mère et l’enfant à venir, pour une malformation chez le foetus et pour un viol. ………..

  3. La constitution de la V° République, à force de la triturer, il ne va en rester que des lambeaux. Quant à l’homme enceint, comment va t-il accoucher? Les garçons par les choux, les filles par la rose, mais pour l’homme enceint, il ne reste plus que par l’oignon.

  4. Un truc qui ne nécessiterait pas de convoquer le Congrès (malgré le quoi qu’il en coûte de rigueur pour ce genre de dépenses indispensables) : il faudrait panthéoniser Marie-Louise Giraud, guillotinée en 1943 du fait des 28 avortements qu’elle avait pratiqués et qui apparaît comme une précurseuse des « valeurs » frelatées de cette république devenue monstrueuse et assassine. En plus, cela permettrait à macron d’apparaître dans toute sa gloire à la suite de son combat victorieux contre les bébés à naître !

  5. On comprend plus ou moins cette étrange ruée pour l’adoption en Congrès du droit à l’avortement dans notre Constitution. Mais le nombrilisme malsain de Madame Panot devant l’iconique Simone Veil reste inacceptable. Madame Veil était une grande Dame…courageuse et visionnaire sur le même sujet. Oser lui faire face sur un montage photo est indigne. Tout comme l’était la réflexion d’une Sibeth Ndiaye sur son décès : « …la meuf est morte…. » ! C’est hélas à l’image de l’entourage de Monsieur Macron.

  6. Que reste-t-il de la France de De Gaulle ??
    Il doit se retourner dans sa tombe. Il fut le seul Président, jusqu’à présent, à aimer profondément la France, à la protéger et la hisser au plus haut.
    Les temps changent, certes, mais où sont les gardiens des valeurs fondamentales et authentiques ? Tout se perd et se délite dans le marasme d’une prétendue  » modernité  » , où le  » sociétal  » bouleverse tout et efface tous les repères.

    • Très juste Madame. Et nos jeunes sont ceux qui manquent le plus de repères, que nous, qui avons connu la France d’avant, n’avons pas su leur donner… Mais, il n’est jamais trop tard…

  7. Si l’on se réfère au discours de Simone Veil, elle n’aurait jamais voulu ce détournement imbécile de son texte.
    Panthéonisée, mais trahie.

  8. Il faudrait réinscrire toutes les lois dans la Constitution. Cette Constitution a t-elle été initiée pour en faire ce qui se fait actuellement ? Si oui ( ce dont je doute ) ré-inscrivons y toutes les lois. Pourquoi pas, au point où nous en sommes.

  9. Oui, Marine Le Pen a entièrement raison de vouloir inscrire la dissuasion nucléaire « comme un élément inaliénable de notre souveraineté » dans la constitution. Car, contrairement à la cause invoquée ayant constitutionnalisé l’IVG, il y a là grand danger avec nos dilapidateurs que notre seul parapluie sécuritaire pour prévenir une agression de la France soit bradé. Mais, ne nous y trompons pas, si le Rassemblement avait cru bon ne pas s’opposer à cette reconnaissance de l’IVG en grande cause nationale pour montrer qu’elle n’était plus conservatrice (oh le vilain mot), il y a peu de chance, comme vous le signalez mon colonel qu’elle soit suivie. A trop vouloir offrir un visage policé, le RN se renie et ce pour la plus grande satisfaction de l’oligarchie qui tire les ficelles.

    • Que Le Pen défende la dissuasion nucléaire française,c’est très bien.Reste que pour l’instant,elle récuse l’idée de grand remplacement et affirme que l’islam, porté par des millions de pratiquants,est compatible avec le Pays.Et là,l’arme nucléaire est totalement inopérante devant cette guerre de civilisations ,réalité qu’elle occulte également.

  10. Zemmour vite…. car tu l’avais prédit, dit et redit que la fin de la FRANCE était proche.
    Nous y sommes ,tu es la bouée de secours qui pourrait (peut-être) nous sauver.
    Merci pour ta lucidité, ton courage et ton engagement.

  11. La V République, c’était la Brigitte Bardot triomphante de 20 ans ;elle est devenue la BB de 89 ans grâce à nos politicards pourris jusqu’à la moelle.

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