« Comme en 18 » : Pierre Desproges vous vaccinera, si vous n’aimez pas le foot
« Comme en 18 ! » a claironné L’Équipe au lendemain de la victoire des Bleus contre l’Allemagne… Ça y est, c’est parti : pendant près d’un mois, il ne sera plus question que de cela… Je n’arrive pas à comprendre l’enthousiasme autour du football, c’est un sport qui a tout pour attiser les réactions les plus primaires, si j’en juge par le titre revanchard du quotidien sportif qui conforte mon opinion. La une de L'Équipe « Comme en 18 » suscite, d’ailleurs, moult réactions sur les réseaux sociaux et journaux, comme par exemple dans L'Obs où le docteur en histoire moderne Benoît Carré fait état de sa consternation et de sa « honte » : « La une de L’Équipe ou comment bien gâcher la fête, casser l’ambiance, humilier l’adversaire, rater une "blague", surfer sur un sentiment national bien dégueulasse… »
Je n’ai jamais beaucoup aimé le foot, le m’as-tu-vu arrogant de ses chochottes de joueurs, la morgue prétentieuse de ses entraîneurs et dirigeants, encore moins l’hystérie braillarde de quelques-uns de ses supporters qui pourront à nouveau venir envahir les stades ou, bravant le couvre-feu, semer la pagaille dans les rues commerçantes…
Ça ne s’arrange pas, décidément, sur la planète foot... si j’en juge par les derniers soubresauts de l’actualité du onze tricolore avec l’intégration de Benzema et, pour l’hymne de son équipe, le choix d’un rappeur, un quelconque brailleur qui ne mérite même pas que l’on retienne son nom. Quelque chose, décidément - c’est un euphémisme -, ne tourne pas rond au royaume de la « balle au pied » que le regretté Pierre Desproges – rendons-lui hommage – avait flingué dans un texte d’anthologie, « À mort le foot », un pamphlet au vitriol que je vous avais déjà présenté il y a quelque mois au plus fort du hooliganisme sur les Champs-Élysées.
Je ne résiste pas au plaisir de vous en rappeler quelques extraits qui vous vaccineront si vous n’aimez pas le foot :
« Voici que les gens normaux, j'entends les gens issus de la norme, avec deux bras et deux jambes pour signifier qu'ils existent, subissent à longueur d'antenne les dégradantes contorsions manchotes des hordes encaleçonnées sudoripares qui se disputent sur le gazon l'honneur minuscule d'être champions de la balle au pied. Voilà bien la différence entre le singe et le footballeur. Le premier a trop de mains ou pas assez de pieds pour s'abaisser à jouer au football.
Le football. Quel sport est plus laid, plus balourd et moins gracieux que le football ? Quelle harmonie, quelle élégance l'esthète de base pourrait-il bien découvrir dans les trottinements patauds de vingt-deux handicapés velus qui poussent des balles comme on pousse un étron, en ahanant des râles vulgaires de bœufs éteints. […] Quand j'étais petit garçon, je me suis cru longtemps anormal parce que je vous repoussais déjà. Je refusais systématiquement de jouer au foot, à l'école ou dans la rue. On me disait : « Ah, la fille ! » ou bien : « Tiens, il est malade », tellement l'idée d'anormalité est solidement solidaire de la non-footabilité. Je vous emmerde. Je n'ai jamais été malade. Quant à la féminité que vous subodoriez, elle est toujours en moi. Et me pousse aux temps chauds à rechercher la compagnie des femmes. Y compris celles des vôtres que je ne rechigne pas à culbuter quand vous vibrez aux stades. » Pouf, pouf…
(Extrait de Pierre Desproges « Chroniques de la haine ordinaire – À mort le foot »)
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