Clément Frison-Roche, le rayonnement et l’au-delà
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Je ne suis pas d'une famille de militaires et je me suis toujours demandé comment elles faisaient avec ça. Ça : l'engagement, comme le rappelait Georges Michel, de donner sa vie, à chaque instant, pour son pays, pour nous. Ça, cette réalité qu'ils savent, qu'ils ont intégrée, qui fait partie du contrat, du paquetage. Une signature avec ceux d'ici, leurs familles, un engagement partagé, et une signature avec l'au-delà, l'au-delà d'eux-mêmes, l'au-delà tout court. L'au-delà tout grand.
À chaque fois que l'un de ces enfants tombe, la même émotion nous submerge. Images des Invalides, et puis des cérémonies dans nos villages. Toujours poignantes. Même quand on ne connaît pas les familles. Ils sont une part de nous.
Et puis il arrive que ce jeune militaire français, comme hier, soit un nom, un visage connu, proche.
Il arrive que les hasards de l'existence vous amènent à rencontrer une de ces familles, celle de Clément. Extraordinaires, oui, au sens premier du mot. Toujours pour cet engagement rare. Pour bien d'autres raisons aussi, comme nous avons pu le découvrir en nouant une amitié forte.
Clément Frison-Roche est l'un de ces treize militaires. Clément est le fils de ces amis proches, Maguelonne et Benoît Frison-Roche, eux-mêmes officiers. Ce garçon plein d'allant. Cet adolescent prometteur, gentil, ce grand qui a tant apporté à nos grands et à nos petits. Et à nous. Cet élève unanimement apprécié de ses enseignants, que Christine, mon épouse, a eu le plaisir d'avoir en cours, et qui illumine une existence de professeur. Brillant, il savait rester modeste ; d'un grand sérieux dans ses études, il irradiait une gaieté contagieuse jusque dans les exercices les plus austères ; ses grandes qualités intellectuelles se doublaient de qualités humaines encore plus rares chez un lycéen. Ce jeune officier exceptionnel. Ce jeune mari. Ce jeune père.
La photographie que sa famille a choisi de nous confier le montre avant son départ pour le Mali : en tenue de combat, sa fille Victoire, rayonnante, dans ses bras, devant sa bibliothèque. Ainsi était le Clément que nous avons connu, que nous connaissons. Rayonnant.
Sa mère déclarait hier : « J’ai senti toute ma vie que mon mari pourrait disparaître brutalement. C’était pareil pour Clément. Je l’ai toujours eu en tête, c’était en filigrane toute ma vie. Je ne suis pas pour autant fataliste… Je suis brisée mais je savais que ça pourrait arriver. J’y ai pensé en lui disant au revoir il y a deux mois. »
Tous les souvenirs affluent, les images, les inquiétudes.
À son épouse, à ses parents, à ses frères et sœurs, nous adressons nos sincères condoléances, nous les serrons très fort dans nos bras de père et de mère. Que le rayonnement de Clément, que la foi qu'il partageait avec eux les portent dans ces journées terribles.
Gabrielle Cluzel, Georges Michel et toute la rédaction de Boulevard Voltaire qui, peut-être plus que d'autres rédactions, connaît de près cet « extraordinaire », se joignent à Christine et à moi.
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