Castaner progresse : il reconnaît enfin l’ultra-gauche dans les violences et du « cornecul » dans l’affaire Benalla !

Il lui a fallu trois mois, mais il a enfin réussi à identifier la mouvance à l'origine des violences des samedis : plus de peste brune fantasmée (Gabriel Attal a été chargé de reprendre ce refrain incertain), comme en novembre, mais « l'ultra-gauche » car, pour le ministre de l'Intérieur, c'est bien un « anarcho-libertaire » (mot qu'il a du mal à prononcer) qui serait à l'origine de l'incendie d'une voiture et d'un véhicule Sentinelle à Paris, samedi. Malheureusement, le journaliste avait oublié d'interroger le ministre sur l'attaque et le saccage, par une centaine d'« antifas », d'une librairie du Quartier latin. Une attaque contre une librairie et des livres, cela aurait pu rappeler les heures les plus sombres de notre Histoire, il ne faudrait quand même pas effrayer l'opinion.

Antifas ? Un autre mot difficile à prononcer pour Christophe Castaner. Encore trois mois de manifestations, pour qu'il ouvre les yeux ? Et daigne agir, interdire, dissoudre ? Tous les espoirs sont permis. Les gilets jaunes ont eu raison d'être patients et de revenir tous les samedis : excellente pédagogie pour notre laborieux ministre. Il se détend, il apprend, il arrive à prononcer : ul-tra-gau-che, a-nar-cho-li-ber-tai-re.

Et puis, pour son grand oral dominical devant France Inter, Francetvinfo et Le Monde, le ministre de l'Intérieur a tenu à réciter un autre nouveau mot joli appris et répété toute la semaine, avec un effet assuré : l'affaire Benalla ? « Une affaire de cornecul ». Vous avez bien entendu : Cor-ne-cul. Toute la France est plongée dans les dictionnaires, dans Rabelais, on ressort les thèses sur les dialectes locaux. On parle - sans trop savoir - d'un équivalent de l'« abracadabrantesque » de Chirac, ce qui est un peu embêtant, car c'était l'adjectif chargé de détourner l'attention et de noyer le poisson. On sent bien, d'ailleurs, que c'est le but. Une affaire sans queue ni tête, sans corne ni cul, quoi. On ne voit, d'ailleurs, pas pourquoi Mediapart et le tout nouveau procureur de Paris se donnent tant de mal.

Mais "cornecul" ? Si on cherche du côté de Rabelais, on trouve la proximité de Lucifer. Si on consulte le lexicographe du XVIIIe siècle Jean-Baptiste de La Curne de Sainte-Palaye, on trouve la définition suivante : "Proprement cocu jusqu'au cul." Le mot aurait-il dépassé la pensée de notre ministre ?

Alors, cette affaire Benalla, c'est du lard ou du cochon ? Pour Christophe Castaner, ce serait "plus une affaire de cornecul qu’une affaire de James Bond". Et surtout, contrairement à ce que pensent Edwy Plenel et de plus en plus de Français : "Ce n’est pas une affaire d’État, c’est l’affaire d’un bonhomme qui, manifestement, a fait n’importe quoi et continue à faire n’importe quoi."

Les mots de l'élève tout simples, débarrassés des éléments de langage qu'on lui demandait de répéter, sont nettement plus intéressants. Et assez justes : Benalla, « un bonhomme qui fait n'importe quoi ». Mais le problème, c'est qu'il le faisait déjà avant son arrivée à l’Élysée (l'altercation violente devant le siège de campagne du candidat Macron), qu'il a continué à le faire pendant et qu'il n'a pas cessé depuis son départ.

Une question : comment caractériser un candidat à la magistrature suprême, puis un Président élu, qui a embauché, soutenu, couvert un tel individu, même après l'évidence du « n'importe quoi » ?

Une véritable affaire de cornecul, c'est sûr.

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Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

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