Ça va castagner contre les « gilets jaunes ». Et contre la délinquance, on fait quoi ?

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L'expression de l'autorité ne m'a jamais gêné. Il me semble même que, de l'État, on est en droit d'attendre un verbe à la fois juste et ferme.

Le ministre de l'Intérieur a averti les "gilets jaunes". "Partout où il y aura blocage, nous interviendrons."

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D'abord, on est rassuré. Ce ton mâle et impérieux est le signe d'un pouvoir qui sait ce qu'il veut et ce qu'il ne veut pas.

Puis on se demande pourquoi cette menace et cet avertissement.

Parce que la journée du 17 novembre fait peur au gouvernement ?

Parce que celui-ci ne comprend pas ce qui se passe et qui enfle ? une protestation initiale contre la hausse du carburant qui risque de devenir un immense défouloir où le président de la République sera la cible principale ? Comme si on avait attendu d'avoir un prétexte plausible pour se mobiliser en masse.

Parce que ce qui se prépare est imprévisible, coagule une multitude de mécontentements et de frustrations, répond sans doute à un sentiment de délaissement, à la détresse de territoires abandonnés, à la misère de trop de gens ?

Pourtant, on fait des concessions, le pouvoir a lâché trop tard quelques gracieusetés, donné quelques avantages. Ils ne servent à rien. Une machine est lancée qui n'a même pas pour finalité d'obtenir des résultats mais juste de s'opposer ensemble, de crier ensemble que trop, c'est trop. Pas assez d'espoir, trop de désillusion, le passé colle aux basques et le futur est incertain. Les citoyens aspirent surtout à être réévalués.

Christophe Castaner alerte les "gilets jaunes". Le bâton. "Partout où il y a blocage, nous interviendrons."

Il y a de la peur derrière cet affichage. Le ministre craint que les inévitables affrontements ne tournent en faveur des "gilets jaunes" et que l'opinion publique soit hostile même à une police accomplissant son devoir. Qu'elle prenne parti pour les révoltés quoi qu'ils fassent, même s'ils bloquent. Robin des bois collectif, le 17 novembre, qui osera s'en prendre à ce peuple ni de droite ni de gauche, un tantinet macronien mais contre Macron ?

Enfin, le citoyen n'est pas loin de s'indigner. On interviendra donc contre les "gilets jaunes" !

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Mais pourquoi pas, avec une résolution si ostensiblement affichée, contre toutes les transgressions délictuelles et criminelles, contre les incivilités, les désordres, les violences du quotidien, le trafic de drogue, les Black Blocs, pourquoi pas à l'intérieur des cités d'où le droit est exclu et où une délinquance sûre d'elle fait la loi, pourquoi pas partout où l'État républicain est mis à mal ? Faut-il donc être seulement un "gilet jaune" pour que l'autorité trouve à s'exercer ?

Partout où il y aura blocage nous interviendrons. Très bien.

Mais quand il y a pire que des blocages et qu'on vole, frappe, blesse ou tue et que la police est la première à être attaquée, on fait quoi ?

Je fais un pari ; ça va castagner contre les "gilets jaunes" mais on sera moins matamore à partir du 18 novembre.

Cette autorité qui n'a, au fond, que des ratés et se réveille le temps d'une fronde, d'une jacquerie qui sort des chemins démocratiques battus, est insupportable.

On la préférerait plus modeste mais constante.

Philippe Bilger
Philippe Bilger
Magistrat honoraire - Magistrat honoraire et président de l'Institut de la parole

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