Alexandre Langlois, secrétaire général du syndicat de police VIGI, réagit au micro de Boulevard Voltaire après la manifestation des gilets jaunes aux Champs-Élysées.

Ce samedi 24 novembre, les gilets jaunes ont manifesté dans Paris. Le préfet de police de Paris avait pourtant déclaré que les Champs-Élysées seraient fermés. Néanmoins, vu l’état des Champs-Élysées, on peut supposer qu’ils étaient plutôt ouverts. Parmi des milliers de manifestants, quelques casseurs ont réussi à s’infiltrer sur les Champs. Comment expliquez-vous que les Champs aient pu être accessibles ?

Ils ont pu être accessibles parce que les gens sont arrivés très tôt le matin. Les policiers étaient déjà sur place, mais n’avaient pas encore fini d’installer tout le matériel.
Le préfet de police avait, pour une fois, fait une proposition judicieuse. Il avait proposé que le rassemblement des gilets jaunes ait lieu sur le Champ-de-Mars, à côté de la tour Eiffel. Cela aurait été dans un cadre sécurisé, digne et plutôt sympa. Il avait précisé en amont que les Champs-Élysées et tous ses abords seraient interdits. Ceux qui sont venus là venaient forcément pour en découdre et casser.

D’après Gérald Darmanin, « la peste brune » était sur les Champs-Élysées. Pour Christophe Castaner, c’était des factieux d’extrême droite. Avez-vous une idée plus précise de qui étaient ces casseurs ?

Il y avait sans doute des gens, comme on dit dans les petites cases médiatiques, de l’ultra-droite et sans doute de l’ultra-gauche, c’est-à-dire des gens en dehors de l’échiquier politique et qui pensent que pour imposer leurs idées, il faut user de violence.
On n’a pas la moindre idée de la proportion de chaque camp. On n’a pas les mêmes résultats selon qui on interroge.
En revanche, les personnes qui s’en sont prises aux forces de l’ordre, quelle que soit leur idéologie et leur orientation, étaient des délinquants, voire des criminels.

Énormément de retraités ont été violentés. Font-ils partie des dommages collatéraux ?

Les gens ne connaissent pas forcément nos méthodes de travail. Nous intervenons sur des foules complètes et n’avons pas le temps de faire de distinction. Il y a des sommations pour dire aux gens de se disperser.
Dans un premier temps, le préfet de police avait relayé des annonces dans les médias. Il avait dit que les manifestants n’étaient pas les bienvenus sur les Champs-Élysées. Ceux qui sont venus savaient déjà ce qu’ils risquaient.
Lorsque les policiers ou les gendarmes interviennent, il y a trois sommations pour disperser la foule. Ensuite, si des gens sont encore là, nos collègues chargent et utilisent des moyens pour dégager l’avenue. Il peut donc y avoir des dommages collatéraux. C’est malheureux, mais la question qu’on peut se poser est : que faisaient ces personnes à cet endroit-là ?
Cela voudrait dire qu’ils n’ont pas entendu les sommations et qu’ils n’ont pas regardé les médias. Cela fait vraiment beaucoup, c’est possible, mais c’est vraiment dommage d’en arriver là.
Les images que nous allons retenir de cette journée sont celles des personnes qui ont été violentées par des policiers ou des CRS. En revanche, on ne va ni retenir les violences faites par les casseurs venus en gilets jaunes sur les Champs-Élysées, ni le mouvement de fond. On ne va pas non plus parler des autres gilets jaunes qui ont manifesté pacifiquement et de l’entente cordiale entre les gilets jaunes et les forces de l’ordre sur différents points. On ne va finalement retenir que cet épiphénomène des Champs-Élysées ultra-violent où le préfet de police n’avait pas forcément tout bien organisé. Je rappelle que certains de nos collègues CRS ont travaillé 20 h 30 de vacations sans manger.

Votre syndicat annonce les chiffres de 150 policiers blessés et des vacations assez longues. On a pu observer vis-à-vis des consignes du préfet de police et dans la réalité une certaine désorganisation. Comment l’expliquez-vous ?

Il avait choisi de cadrer un très grand périmètre. Il faut savoir que plus c’est grand, plus c’est compliqué à cadrer. Il n’y a jamais qu’une seule manifestation dans Paris. Il faut donc diviser nos collègues à divers endroits de la capitale.
Par ailleurs, nous savions que des casseurs allaient être présents pour casser et en découdre avec les forces de l’ordre et pourtant, une fois de plus, rien n’a été fait en amont. Les interpellations ont tardé. Le dispositif a donc été désorganisé. On a oublié de nourrir nos collègues. Ils ont fait des vacations de 20 h 30. Au bout de 20 h 30 de travail, on est un peu fatigué. C’est encore plus dangereux lorsqu’on est policier, car on est armé.
C’est complètement inconscient de la part des pouvoirs publics d’avoir toléré une situation pareille. Ils ont été dépassés par les événements. Ils ont, cette fois, utilisé les canons à eau, ce qu’on leur demande souvent. Cela a été une bonne chose, mais nous aurions aimé, une fois de plus, que les casseurs soient interpellés et déférés à la justice pour qu’elle puisse prendre une décision, plutôt que de les repousser et de se faire tirer dessus pendant un bon moment.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 16/12/2022 à 10:38.

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26 novembre 2018 à 18:56

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