1er septembre 1715 : le crépuscule du Roi-Soleil

louis xiv

En cette fin d’été 1715, plus un bruit ne résonne dans les couloirs du château de Versailles. Tous les courtisans et aristocrates sont réunis au sein de ce palais devenu le mausolée d’un auguste mourant. Chacun retient son souffle et attend que Louis XIV rende son âme à Dieu.

Roi tout-puissant, Louis XIV avait pourtant démontré pendant l’entièreté de son règne sa robustesse, sa force et sa bonne santé. Mettant en scène sa vie, il fit des arts un moyen d'immortaliser sa vigueur en le présentant en souverain conquérant, guerrier et vainqueur. Mais usé par un long règne de 72 ans, le corps du Roi-Soleil ne peut plus suivre les volontés de son esprit royal. Ce dernier est affaibli tant par les peines personnelles et politiques qu'a subies le monarque au début de ce XVIIIe siècle. Tous ses enfants et héritiers, frappés par la maladie, ont succombé les uns après les autres. La défaite de la guerre de Succession d’Espagne a également porté un terrible coup aux projets politiques du monarque français.

Une mort mise en scène

C’est ainsi, dans un Versailles endeuillé, que Louis XIV se retire pendant le mois d’août 1715. Sentant une douleur lui monter à la jambe et l’affaiblissant dans la conduite de ses obligations royales, le roi doit s’aliter. Dès lors, le pire est à craindre car « le roi a un ennemi plus redoutable que la maladie, c’est la médecine », nous rapporte François Bluche, dans son livre Louis XIV. Les médecins se trompent de diagnostic et pensent que le monarque français ne souffre que d’une simple sciatique. En vérité, la jambe royale commence par être dévorée par la gangrène et aucun soin n’est apporté afin d’endiguer ce mal. Quand, le 24 août, le chirurgien du roi, Georges Mareschal, se rend compte de l’erreur, il est déjà trop tard. Toute intervention est désormais inutile.

Louis XIV, conscient de son destin, va alors lancer le dernier acte de sa vie : mettre en scène sa mort. Roi très chrétien, il demande à recevoir les derniers sacrements administrés par le cardinal de Rohan. Dans un second temps, il organise ses adieux à la cour : tous les grands défilent devant le lit du roi afin de lui rendre un ultime hommage. Il finit par recevoir son arrière-petit-fils et héritier : le futur et jeune Louis XV. Le monarque mourant lui livre ses derniers conseils : « Vous allez être un grand roi, mais tout votre bonheur dépendra d'être soumis à Dieu et du soin que vous aurez de soulager vos peuples. Il faut pour cela que vous évitiez autant que vous le pourrez de faire la guerre : c'est la ruine des peuples. » Et de lui intimer comme ultime avertissement : « Ne suivez pas le mauvais exemple que je vous ai donné sur cela ; j'ai souvent entrepris la guerre trop légèrement et l'ai soutenue par vanité. Ne m'imitez pas, mais soyez un prince pacifique, et que votre principale application soit de soulager vos sujets. » Ses derniers devoirs de roi désormais accomplis, Louis XIV peut maintenant rejoindre son divin créateur, dont il fut le lieutenant sur terre.

Le souverain français tombe dans une douloureuse agonie, le 30 août, avant de s’éteindre le 1er septembre. En cette journée résonne dès lors, dans tout le château de Versailles, la traditionnelle proclamation : « Le roi est mort, vive le roi ! » Dès le lendemain, la dépouille mortelle du souverain est embaumée après avoir été autopsiée. Le corps sans vie de celui qui incarnait le royaume de France est alors présenté le temps d'une semaine dans le salon de Mercure. En ce lieu, chaque sujet livre ses derniers hommages à son défunt roi. Le 8 septembre, Louis XIV entame son voyage funéraire vers la basilique Saint-Denis. Dans cette ultime et éternelle demeure des rois de France, il repose en paix jusqu’aux profanations de la Révolution française.

Mais tous dans le royaume ne pleurent pas la perte de leur souverain. Roi guerrier aux ambitions architecturales parfois démesurées, Louis XIV fut la source de beaucoup de souffrances pour les plus humbles de ses sujets. C’est ainsi qu’au sein de la Sainte-Chapelle, en décembre 1715, Jean-Baptiste Massillon rappelle, dans une oraison funèbre dédiée à ce souverain, que « Dieu seul est grand ».

Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

6 commentaires

  1. Dans le temps nous pouvions parler de rois, aujourd’hui nous pouvons parler que de racaille et de bouffon. Triste France.

  2. Passé l »enfance Je me suis vite demandé : » Mais Pourquoi l’homme a t’il toujours besoin d’un roi , d’un dieu , d’un président , d’un chef ..??? à suivre aveuglement «  »
    L’homme serait donc incapable de faire ou de penser par lui même sans être le sempiternel mouton derrière « un chef » spirituel ou non , qui de toutes les façons le trahira , l’exploitera , l’enverra se faire tuer pour servir sa propre vanité et servir ses propres intérêts économiques et politiques !!!
    L’homme ne serait donc né que pour se rendre esclave car il ne cesse de s’enchainer lui même à des idées qui lui sont soufflées….finalement l’homme n’a que ce qu’il mérite ..le mépris de ceux qui le dirige …

  3. En cette fin d’été 2023, plus un bruit ne résonne dans les couloirs de l’Élysée. Tous les courtisans, ministres, conseillers, députés, sénateurs, hauts fonctionnaires, sont réunis au sein de ce palais devenu le mausolée du roi Ubu démissionnaire. Chacun retient son souffle et attend que Ubu, alias Jupiter, descende de son trône, ouvre la porte et s’évapore dans les brumes du Paris automnal. Caché derrière un pilier de marbre blanc, un petit homme au sourire mielleux guette son départ en se frottant les mains. « Le roi est mort, vive le roi », s’écrie-t-il en son for intérieur.

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