Venezuela : après la réélection de Maduro, quel scénario maintenant ?

Sans surprise, Nicolás Maduro a donc été réélu, dimanche 20 mai, après une parodie de scrutin démocratique, compte tenu de l’impossibilité de l’opposition de la MUD de pouvoir présenter un de ses leaders. Avec un score (68 %) qui n’a aucun sens si on ne met pas en perspective le taux considérable d’absentions à cette élection présidentielle (53 %). Pour mémoire, en 2012, celui-ci était inférieur à 20 % ! Tout cela signe l’énorme lassitude et désillusion de la population vénézuélienne... Que va-t-il se passer, maintenant, sachant que cette élection ne réglera aucun des problèmes de ce pays, malgré les promesses électorales de « révolution économique » faites par Maduro ?

Outre le rappel des ambassadeurs des pays du groupe de Lima, dont l’Argentine, le Brésil, le Canada, la Colombie et le Mexique, et les habituelles condamnations internationales, doit-on, comme certains l’annoncent un peu vite, s’attendre à une intervention militaire américaine effectuée sous couvert de ses alliés régionaux ? Les conséquences géopolitiques pourraient être désastreuses, à même de provoquer une déflagration contagieuse, lorsqu’on sait que pas moins de quatre autres élections présidentielles (Brésil, Colombie, Mexique et Paraguay) doivent se dérouler d’ici la fin de l’année, et que le G20 doit se réunir fin novembre à Buenos Aires.

À l’appui de cette hypothèse, il est fréquent d’évoquer de manière récurrente le fameux amendement Monroe (1823) alors que le monde a, depuis, bien changé et que, de plus, jamais dans son histoire le Venezuela, le pays potentiellement le plus riche du continent, le plus stratégique sur le plan des ressources pétrolières, n’a jamais été l’objet d’une intervention militaire directe des États-Unis. Pas encore, souligneront certains, prêts à dénoncer le rôle de la CIA dans le chaos vénézuélien. Et de rappeler l’année 2002 et la tentative de coup d’État contre Hugo Chávez, la reconnaissance quasi immédiate par les États-Unis du gouvernement de Pedro Carmona Estanga, même si, à ce jour, aucune preuve tangible n’a pu être avancée pour dénoncer le rôle de la CIA.

Les États-Unis vont-ils déclencher un embargo pétrolier et durcir encore leurs sanctions économiques vis-à-vis de Caracas ? Un éventuel embargo pétrolier, même s’il pourrait faire plier Caracas (ce qui n’est pas assuré, car plus de 40 % du pétrole vénézuélien est distribué en Asie et que cette part de marché pourrait croître), devrait déclencher une onde de choc géopolitique aux répercussions imprévisibles. Que feront, alors, les alliés du Venezuela : la Chine, la Russie, l’Iran et Cuba ? Une prise de risque réelle à l’approche des élections américaines de mi-mandat de Donald Trump.

Sans compter qu’une telle mesure pourrait aussi renforcer, paradoxalement, le pouvoir de Maduro, s’imposant, dans la lignée d’Hugo Chávez, comme le pourfendeur et le dernier rempart contre l’impérialisme américain.

Doit-on, plutôt, s’attendre au renforcement de l’action des agences américaines comme la National Endowment for Democracy (NED), un organisme à but non lucratif dont l’objectif est de renforcer, partout dans le monde, les institutions démocratiques, ou encore la United States Agency for International Development (USAID) ? Toutes ces agences, sous couvert d’actions humanitaires, dispatchent leurs fonds en liaison avec le département d’État.

Leur rôle serait alors en sous-main de « susciter », y compris chez les chávistes opposés à Nicolás Maduro, l’émergence d’une solution politique pour tenter de sortir ce pays du chaos généralisé.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/01/2020 à 17:57.
Jean-Marie Beuzelin
Jean-Marie Beuzelin
Écrivain et journaliste

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