Une avant-veille d’un Noël de plomb : trois gendarmes tués
Dans la nuit de Noël, veillée du 24 décembre, la lettre de saint Paul apôtre à Tite nous appelle à la vie et nous enseigne : « La grâce de Dieu s’est manifestée pour le salut de tous les hommes. Elle nous apprend […] à vivre dans le temps présent de manière raisonnable, avec justice et piété, attendant que se réalise la bienheureuse espérance. »
L’avant-veille au soir, à Saint-Just, petit village du Puy-de-Dôme, Frédérik Limol, 48 ans, qu’on dit « survivaliste », a commis l’irréparable : il abat trois gendarmes venus porter secours à sa compagne violentée, s’enfuit puis se suicide d’un tir à la tempe. Geste du temps présent, déraisonnable, injuste, défaut d’espérance. Délire schizophrénique et dépressif poussé à son paroxysme. Trois hommes assassinés, quatre morts dans une déraison absurde : dommages collatéraux de l’an I du Covid ?
Alors que le sociologue Bertrand Vidal, spécialiste du survivalisme, considère que « des problèmes familiaux ou des antécédents peuvent provoquer ce genre de comportements » (Marianne du 24 décembre) et rejette la thèse d’une agression de type « survivaliste » contre les gendarmes, l’explication, presque téléphonée, n’a pas tardé dans la presse et sur les réseaux. Titre du Dauphiné : « Surarmé, survivaliste, catholique extrémiste : le “profil inquiétant” du forcené du Puy-de-Dôme. » Le journal du Dimanche le décrit comme « catholique extrémiste ». Sur Europe 1, Jean-Luc Boujon reprend : « Il était catholique très pratiquant, presque extrémiste, tendance survivaliste, c'est-à-dire persuadé que la fin du monde était proche. » On pourrait multiplier les citations à l’emporte-pièce, copier-coller de la seule information qu’on veut distiller en cette veille de Noël : catholique pratiquant !
Pourquoi ? Ne s’agit-il pas d’orienter l’opinion, éventuellement choquée, vers un mobile qu’on voudrait évident et qui permettrait d’éluder toute autre perspective d’élucidation de cet acte fou ? L’appartenance religieuse du forcené expliquerait son passage à l’acte criminel. Et, pour les journalistes de la bien-pensance, voilà un moyen commode pour établir le parallèle implicite entre cette tuerie et les actes terroristes commis sur notre sol, au nom de l’islam, ces dernières semaines. Avec deux objectifs simples mais percutants . 1) Les catholiques « extrémistes » seraient potentiellement aussi dangereux que les musulmans « radicalisés » pour notre société. 2) La pratique religieuse mène au crime. Voilà un sale coup médiatique de plus, porté contre ceux qui se dévouent et s’évertuent contre vents et marées liberticides à défendre et à expliquer le message de Noël comme une force de vie, d’espérance et témoignent de sa valeur civilisationnelle contre tous les projets de barbarie !
Or, mercredi, dans l’urgence et face à la soif médiatique des réponses immédiates, Éric Maillaud, procureur de la République de Clermont-Ferrand, demeurait quand même plus prudent au cours de sa conférence de presse : « Il faudra qu’on vérifie son comportement […] il se disait catholique très pratiquant […], il semblerait également qu’il était persuadé de la fin du monde prochaine. » « Il se disait », « il semblerait » ! Mais, en ajoutant maladroitement cette considération personnelle, encore non étayée de preuves : « On pourrait dire presque extrémiste. » Le procureur a permis que s’emballe très vite, hélas, la machine journalistique à casser du catho !
L’enquête révélera les motifs réels de ce « coup de folie ». Car, pour l’instant, que savons-nous exactement de Frédérik Limol ? Rien de très précis ; sinon qu’il fut, en d’autres temps, aspirant de l’armée française et qu’il eut donc, peut-être, un idéal, qu’il a vécu, comme tant d’autres, dans une société dont le délitement orchestré par nos élites mondialistes de pouvoir – politiques, intellectuelles, spirituelles – ne peut qu’entraîner craintes, questionnements, ruptures, une société fracturée, sciemment individualisée qui ne peut que broyer les plus fragiles … ou les mener au pire.
En ce Noël de plomb, nous ne savons pas – et ne saurons sans doute jamais – si Frédérik Limol a cru livrer son combat d’Armageddon. Mais nous savons, hélas, qu’il a mené le pire. Contre ceux dont la mission est de nous protéger des autres et de nous-mêmes.
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