(TRIBUNE) Mettons un frein au progressisme sans bornes

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Depuis le 29 novembre dernier, la proposition de loi initiée par la députée Albane Gaillot visant à « renforcer le droit à l’avortement » est de retour à l’Assemblée nationale après un passage au Sénat. Outre l’inacceptable suppression de la clause de conscience, le texte explique qu’au nom d’une « détresse psychosociale » dont les contours restent nébuleux, il sera possible pour une mère d’avorter d’un enfant jusqu’à quatorze semaines de grossesse. Pour commencer, l’on s’étonnera que les députés socialistes s’attachent à légiférer sur l’interruption de grossesse au lieu de s’attaquer en priorité à l’explosion desdites détresses psychosociales. La crise actuelle qui s’étend du domaine sanitaire au domaine économique et politique démultiplie les problèmes de déprimes, de burn out et d’angoisses, liés parfois à l’effondrement du pouvoir d’achat, à la perte d’un travail ou d’un logement. Et la communication sanitaire anxiogène véhiculée par le gouvernement ne fait rien pour arranger ces troubles. Que nos députés s’attellent d’abord au vaste chantier touchant l’équilibre mental des Français, avant de repousser encore plus loin les limites de l’interruption de la vie. Il est probable, d’ailleurs, que cette extension de l’avortement amplifiera ces détresses psychosociales, car tout avortement constitue un drame personnel d’autant plus difficile à vivre que la société ne s’en fait jamais l’écho. Nos députés ont donc un étrange sens de la priorité.

Une autre question se pose : n’est­-il pas contradictoire de confiner, d’interdire, d’obliger toute une population à se faire vacciner, quitte à remiser nos libertés les plus essentielles au placard pour éviter une mort hypothétique à des patients et, en même temps, de pousser à la promulgation d’une loi qui autorisera la mise à mort d’enfants ? Car il ne s’agit plus de se cacher derrière la terminologie d’« embryon » ou de « fœtus » : sa tête est déjà ossifiée, il dispose d’un système neuronal, peut commencer à interagir avec le monde… Ces enfants ont-ils moins de dignité que des personnes hospitalisées à cause du Covid ? Non, bien sûr. Alors, ne soyons pas si prompts à sauver exclusivement les uns tout en condamnant les autres, et réaffirmons plutôt que chaque être humain a une dignité de sa conception à sa mort naturelle. Par ailleurs, à l’heure où les spécialistes insistent sur le déclin démographique de la France, n’est-il pas incohérent de légiférer sur cette extension qui continuera à dépeupler notre pays ? Le suicide de l’Europe est-il devenu une priorité dans l’agenda de nos députés ? Mais l’idéologie du progrès se moque bien de tous ces arguments rationnels.

Comme souvent, nous avons sous les yeux le schéma classique de pensée des tenants du progressisme pour qui la « sainte cause du progrès » ne doit jamais connaître de bornes, pour qui les opposants sont forcément « réactionnaires, passéistes, extrémistes », pour qui la possibilité de supprimer l’enfant à naître est un « droit fondamental », « essentiel pour la vie et la liberté des femmes ». Pourtant, même à gauche de l’échiquier politique – espace traditionnellement ouvert à ces lubies –, certains comme Michel Onfray pointent du doigt cette folie meurtrière qui touche nos sociétés pourtant si attachées à la vie : « Quiconque traite ainsi ses enfants – et j’ajouterais ses vieillards, c’est à peine un autre sujet… - dit quelle conception du monde il a : il tient le plus faible d’entre nous pour une quantité négligeable parce qu’il ne parle pas, ne vote pas, n’est pas susceptible d’être rentable dans le grand cirque politicien, qu’il ne peut se rebeller, se révolter, résister, combattre, porter plainte, aller en justice ou se faire inviter sur les chaînes d’informations continues pour faire valoir ses droits. » De fait, la politique actuelle ne prend plus soin ni de nos anciens ni de notre descendance. Elle sacrifie le passé et l’avenir pour les seuls besoins de jouissance des générations actuelles. Elle voit l’enfant à naître comme un droit, un article jetable ou interchangeable, un objet de consommation.

Plus que jamais, le plus faible nécessite notre protection, et nous devons être assez forts pour le mettre hors de portée des égoïsmes modernes. Il est urgent de contrer cette nouvelle offensive. Ne laissons pas le progressisme prospérer sur le terreau de notre inactivité.

Jean-Frédéric Poisson
Jean-Frédéric Poisson
Ancien député des Yvelines, président de VIA - La Voie du Peuple

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