[Tribune] La violence peut-elle être civique ?

Violences du 1er mai : pour Jean-Luc Mélenchon, c’est encore un coup de l’extrême-droite !

Lors de sa visite au Salon de l’agriculture, le président de la République a été interpellé par un activiste du collectif Dernière Rénovation, dont on connaît le goût pour les coups d’éclat médiatiques qui leur tiennent lieu d’arguments. Quoi qu’on pense de M. Macron, un peu de respect pour le chef de l’État contribue à ce que l’on appelle une société policée.

En revanche, la réplique de ce dernier laisse un peu songeur : « Vous êtes la démonstration d’une forme de violence civique. » Ce qui semble donner une sorte de légitimité à cette violence. Car si elle est civique, c’est que, d’une certaine façon, elle est bonne pour la cité ! La réalité, c’est que les actions de ce collectif d’activistes gavés d’idéologie climatique ont souvent consisté à « emmerder » (pour parler comme le président de la République) les citoyens, notamment en bloquant la circulation. Donc perturber la journée de ceux qui se rendent au travail ou à des rendez-vous professionnels, conduisent les enfants à l’école ou vont à l’université répondrait à une préoccupation civique !

En bonne doctrine, la seule violence légitime est celle de l’État afin de maintenir la sécurité et l’ordre publics. Encore que certaines mesures imposées durant la crise sanitaire constituaient, à l’évidence, une forme de violence illégitime. Mais ce qui est certain, c’est que la violence de groupuscules idéologiques ne saurait être considérée comme justifiée.

La formule présidentielle serait-elle une nouvelle illustration de sa rhétorique du « en même temps » ? En même temps violence privée et en même temps action civique ! Le discours présidentiel devient totalement inaudible. Le Président aime parler et semble même s’enivrer de son propre discours mais, au Salon de l’agriculture, il était pathétique dans sa volonté d’expliquer aux agriculteurs, en termes technocratiques, ce qu’ils savent trop bien dans l’exercice de leur profession : le manque d’eau, l’accroissement des coûts, l’avalanche des normes écologiques, la concurrence déséquilibrée. Et les compliments de circonstance sur le courage et le travail ne peuvent faire oublier ce que l’on retrouve trop souvent en filigrane du discours officiel : le renoncement devant une supposée fatalité. Après la sobriété énergétique, voici venir la sobriété en eau ! En fait, l’acceptation de la pénurie sans autre solution que le rationnement. Si, donc, le politique ne peut rien faire, s’il a abdiqué devant l’activisme de bobos urbains qui prétendent expliquer aux ruraux ce qu’est la campagne, à quoi sert-il donc, si ce n’est à caresser le cul des vaches ? Réserves d’eau et forages profonds pourraient aider à passer les périodes de sécheresse, mais devant les activistes repeints en vert, le gouvernement hésite et recule.

Voici donc des autorités politiques qui oscillent entre une sorte de morgue technocratique et une crainte viscérale d’exercer leur autorité à l’égard des violents et des bruyants. Fort avec les faibles et faible avec les forts, ou avec ceux qui hurlent fort. Le propre d’un système sur le déclin.

Quant aux excités de Dernière Rénovation, leurs excès n’aident en rien à la résolution d’un réel problème, celui de la rénovation énergétique des bâtiments. Qui ne serait d’accord sur l’objectif de supprimer les « passoires énergétiques », mais cela ne se règle pas en un claquement de doigts. Certains immeubles, qui ont un intérêt patrimonial évident, sont techniquement difficiles à rénover. L’isolation par l’extérieur n’est pas toujours possible et l’isolation intérieure réduit les surfaces habitables. Pour d’autres, sans intérêt architectural, la solution la plus rationnelle serait de démolir et de reconstruire, mais en ce cas ne se pose la question du relogement, qui est peu aisée à traiter. De surcroît, la question du coût est cruciale. Tous les propriétaires n’ont pas les moyens de se lancer dans des travaux onéreux et l’état des finances publiques françaises réduit les marges de manœuvres en matière d’aides.

Notre époque a trop souvent réduit la pensée politique au slogan et l’émotion a supplanté la réflexion. Ce qui est le meilleur moyen de ne rien régler, d’autant plus quand le pouvoir politique finit par revendiquer son impuissance devant les faits afin de s’exonérer de sa responsabilité. Or, gouverner, c’est d’abord revendiquer la responsabilité de ses choix et assumer de faire preuve d’autorité, l’autorité n’étant pas le caporalisme mais, au contraire, ce qui fait croître en responsabilité et en dignité. Mais ces mots ont-ils encore un sens pour la caste qui nous dirige ?

Stéphane Buffetaut
Stéphane Buffetaut
Chroniqueur à BV, élu de Vendée, ancien député européen

Vos commentaires

6 commentaires

  1.  » violence légitime  » ? Non on parle d’  »usage de la force publique »

  2. « Quoi qu’on pense de M. Macron, un peu de respect pour le chef de l’État contribue à ce que l’on appelle une société policée. »
    Lorsque ce prétentieux ose dire, dans un discours aux gaulois illettrés, des riens sur un quai de gare, qu’il veut les em**rder, pensez vous qu’il fasse partie,de fait, d’une société policée?
    S’il pense nous présenter , eh bien adaptons nous et répondons lui de façon aussi agressive, mal-élevée, vulgaire.
    Je ne fais pas et ne ferais jamais partie de la Nupes (que j’appelle la Dupes), mais je comprends parfaitement que l’on n’ai pas envie de parler poliment à une personne telle que ce malotru qui nous gouverne.
    Pour le reste de l’article, hormis quelques points de détails peu importants, je suis en accord avec l’auteur.

  3. Le gouvernement ne recule pas devant une poignée d’activistes, mais devant l’U.E !

  4. Essayez seulement de vous défendre contre une agression……………..Vous verrez de quel côté est la justice!

    • La justice ou injustice est malheureusement du coté des délinquants qu’elle protège au détriment des victimes.

    • À propos, qu’advient il de cette femme qui en se défendant a précipité l’un de ses agresseurs sur une voie de chemin de fer ?
      Cette affaire de légitime défense fait moins de bruit que celle du chat écrasé par un TGV…

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