On l’apprend dans Le Dauphiné (9 juillet) : « Les parents de Deniz Karatas, ce Martinérois de 24 ans tué d’une balle en pleine tête par un policier de la BAC, jeudi 7 juillet, dans le centre-ville de Grenoble, vont déposer plainte pour "homicide volontaire", convaincus que le policier a "tiré pour tuer". » Cette conviction que le policier a tiré « pour tuer » nous interpelle.

Ce fonctionnaire d’État incriminé qui invoque la légitime défense, puisque le passager aurait pointé contre lui une arme « de type » kalachnikov, a-t-il tiré « pour tuer » alors qu’il se trouvait face à un scooter lancé ? A-t-il eu le temps, dans un geste réflexe, de viser la tête, les jambes ou le thorax comme on l’en accuse ? La justice de la République et ses experts balistiques le diront. Une chose est sûre : dans une action d’urgence, son tir – évidemment dramatique – n’a pas dévié d’une cible mouvante et potentiellement dangereuse. Plutôt rassurant pour le quidam urbain – parfois hostile –, qu’ils doivent protéger d’une pègre ensauvagée, surarmée et sans limites.

Le sage persan l’a écrit : « On éprouve moins de peine à mourir quand un fils regarde votre visage qui pâlit. » On comprendra d’autant la douleur de Bülent Karatas, le père de la victime du tir mortel – et celle de sa famille –, lui qui aura sans doute voulu l'élever dans le respect des règles morales de ses ancêtres anatoliens, et selon les principes d’une religion tranchante sur le vol. « Je demande justice, mais mon gamin, lui, est parti. Il ne reviendra plus jamais », déclare l’homme, bouleversé (JDD, 9 juillet).

Soit. Mais posons-nous d’abord cette question : qui était le « jeune » délinquant tué dans le feu de l’action ? Un perdreau de l’année face à un tireur psychopathe ? Au début de l’année 2018, Deniz Karatas avait mené trois attaques à main armée en trois jours contre trois bureaux de tabac et écopé de quatre ans ferme derrière les barreaux. Attaques « à main armée » ! La prison n’est pas une solution, disent les belles âmes. Faut croire, au vu de cette récidive qui finit mal.

Il semblerait que dans l’agglomération grenobloise – incluant Saint-Martin-d'Hères, commune limitrophe de plus de 37.000 habitants d’où est issu le défunt –, l’insécurité soit plus qu’un vague « sentiment ». Pour la seule année 2020, on y dénombrait 22.571 crimes et délits déclarés, dont 21,84 % de violences aux personnes et 62,54 % de vols et dégradations. Mais seulement 11 cas de vols à main armée, soit 0,04 ‰ habitants ; une exceptionnalité aggravante du cas du malheureux Karatas.

Son père, nous dit Le Parisien (8 juillet), reconnaît que son fils était tombé dans les trafics illégaux : « On perd nos jeunes à cause de ces trafics de merde. Deniz était pris dedans aussi », mais n’admet pas la mort qui en résulte : « J’aurais préféré qu’il passe 5 ans ou 10 ans en prison au lieu de mourir comme ça. » Et de charger le fonctionnaire : « Ils auraient pu lui tirer dans les jambes [...]. Il faut qu’il soit puni. »

Compréhensible douleur, accusations douteuses, pourtant, de ce père accablé qui ne peut concevoir, sous l'emprise du conditionnement social « anti-flic », les vraies responsabilités d’une dérive mafieuse et de son dénouement tragique. Des accusations qu’en France on peut porter, hélas, depuis qu’il est loisible d’affirmer sans risquer de poursuites que « la police tue », délibérément ! Laxisme et démission civique de l’État. Pourrissement moral, orchestré par la NUPES, qui nous mène au chaos de Babel.

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12 juillet 2022 à 13:37

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