Taxis : les raisons de la colère

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Après les pêcheurs, les paysans, c’est désormais au tour des taxis de se révolter. D’où ces blocages ayant paralysé les entrées de nos grandes villes, ce lundi 29 janvier. Au cœur de leurs revendications ? Il y a évidemment le bras de fer qui oppose les principaux syndicats de la profession à la CNAM (Caisse nationale d’assurance maladie).

Déjà, « une revalorisation des tarifs pour 2024 à la limite de l’insulte (un à deux centimes par kilomètre en finalité) », lit-on dans le communiqué de la Fédération nationale des artisans du taxi (FNAT), auquel sont également associées la Fédération nationale du taxi (FNT) et la Fédération nationale des taxis indépendants (FNTI. Mais surtout, le transport des patients pour leurs consultations dans les hôpitaux voit disparaître le plafonnement de la remise des taxis (16,5 % de taux moyen). Tout comme il est exigé des mêmes chauffeurs de pratiquer le covoiturage.

Une profession prise à la gorge…

Cédric L., taxi dans les Yvelines, nous révèle ainsi : « Dans ce département, cette remise est de 19 %. C’est-à-dire que sur une course de 100 euros, je ne peux facturer que 81 euros à la CNAM. Mais le véritable scandale, c’est que la CNAM exige que nous paraphions cette convention, alors que les négociations ne sont pas encore terminées et que le déplafonnement de notre remise est toujours à l’ordre du jour. En d’autres termes, on nous demande de leur signer un chèque en blanc… » Ce que confirme la FNAT : cet « avenant tarifaire valable un an se transforme donc en convention valable cinq ans » !

Et Cédric L. de poursuivre : « Nous sommes pris à la gorge, car si nous refusons les conditions de la CNAM, nous risquons de nous retrouver déconventionnés et donc privés de ce marché qui, à la campagne, peut représenter plus de 80 % de notre activité. Autant dire que nous sommes nombreux à risquer de mettre la clef sous la porte. Sans compter qu’on nous brandit toujours la menace des taxis Uber et de leur concurrence déloyale. Quant à ce covoiturage auquel on veut nous contraindre, ça peut éventuellement fonctionner en milieu urbain. Mais ici, à la campagne, c’est parfaitement irréaliste. Et pendant ce temps, les charges augmentent et le prix du carburant explose. »

Le rôle social des taxis

Un malaise que résume fort bien le communiqué plus haut évoqué : « Nous ne pouvons plus tolérer de travailler au rabais. Malgré tous les éléments tangibles apportés par la profession, malgré toutes les tentatives de discussions constructives, les explications sur les réalités économiques de nos entreprises, rien n’y fait. La profession est méprisée. » Tout comme est méprisé le soutien moral que certains chauffeurs de taxis apportent souvent aux malades transportés, tel qu’en témoignent les propos de ces deux chauffeurs de taxis, cités par France 3 Auvergne-Rhône-Alpes : « Notre action va bien au-delà du transport », explique Bilal Bouammar, qui travaille en région lyonnaise. Son collègue, Abdelatif Grine, ajoute : « On ne fait pas que transporter les gens d’un point A à un point B. On les aide à remonter chez eux, ils nous offrent parfois un café, ceux qui sont très seuls nous demandent de remplir des documents… Nous avons une action sociale, et nous sommes tous bénévoles, pour cela. »

Un rôle social que nous confirme Cédric L. : « C’est encore plus vrai dans la France des champs. Nous connaissons tous nos clients et prenons encore plus soin de ceux qui sont malades. Nous ne faisons pas que transporter, nous accompagnons, aussi. Cette dimension humaine est primordiale. On essaye toujours de les consoler, de les rassurer quand ils ont peur d’une opération. C’est plus facile pour moi, car il y a quarante ans que je vis dans mon village. Mes clients me connaissent tous. Ils m’ont tous connu gamin… » Et quand on évoque avec lui les malheurs des paysans, il répond : « Nos combats ne sont pas les mêmes. Mais la tonalité est la même… » Il y a ceux qui nous conduisent, ceux qui nous nourrissent. Et le mépris de l’État, là encore, est le même.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

24 commentaires

  1. Il existe aussi des abus dont j’ai été témoin: un vsl qui prend en charge plusieurs patients et qui facture plein tarif. Je ne sais pas où est la solution mais au moins on parle du problème

  2. Nous vivons dans un monde totalement déshumanisé où ceux qui osent encore en faire preuve sont condamnés à disparaître. On ferme des hôpitaux, on ferme des bureaux de poste mais on paie le facteur pour exercer un lien social et dans le même temps on prévoit de retirer le permis de conduire aux plus de 65 ans. Mais dans quel monde de fou vivons nous. Reprenons le pouvoir vu que ceux qui nous dirigent prouvent tous les jours de leur incompétence.

  3. Guerre à l’EST, troubles intérieurs graves, j’ai l’impression de revivre 1958. Pourvu que les gens ne soient pas amnésiques.

  4. Autant les agriculteurs sont sympathiques, enthousiasmants même, autant là je suis sceptique: arrivant il y a un an avec femme enfants et bagages sur un petit aéroport de province isolé, le taxi m’a dit: « Ce sera tarif hôpital ou rien car ça me prive d’une bonne course ». Résultat 45€ pour huit kilomètres jusqu’à l’hôtel. Pareil au retour. Monopole; pas le choix. Refait. Ils ne me font pas pitié, et si celui-là ternit la réputation de son métier, qu’ils règlent ça avant de réclamer des augmentations.

  5. Un taxi n’est pas une ambulance et il y a beaucoup d’abus dans ces bons de transport. J’en ai été témoin durant ma vie professionnelle. « Revenez me chercher dans deux heures car je vais en profiter pour faire quelques courses » et cette patiente qui profitait de son bon de transport pour emmener ses copines « en ville » faire des courses. Et ce ne sont là que deux exemples…Beaucoup de ces « patients » ont des voitures et conduisent, ou pourraient être emmenées à leur RdV.par des tiers…

  6. Pour faire des économies, il faudrait peut-être déjà commencer par arrêter de prendre en charge, « gratuitement », tous les étrangers, immigrés, clandestins et autres qui viennent se faire soigner chez nous car rien n’est gratuit, il y a toujours quelqu’un qui paie, NOUS, les con-tribuables qui travaillons et payons nos cotisations et mutuelles.

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