Si l’on comprend bien la FCPE, c’est l’école, et non le terrorisme islamiste, qui serait responsable de l’assassinat de Samuel Paty ?
On annonçait, mardi, les chiffres mirobolants des nouveaux bacheliers : 90,5 % au premier tour. Avant les oraux de « rattrapage ». C’est 1,6 point en dessous de l’année dernière, qui plafonnait à 92,1 %. Devant ces résultats proprement « époustouflifiants », on a au moins eu la décence de nous épargner les cris d’hystérie des heureux lauréats : pensez, toute une classe d’âge hurlant sa joie, le vacarme aurait été insoutenable !
On ne sait pas quel qualificatif choisir : grotesque, ahurissant, scandaleux, ridicule, dérisoire, consternant, insensé… c’est tout cela à la fois.
Le mot qui vient est « mascarade ». En effet, qui peut feindre de croire que tous les lycéens ont le niveau requis pour entamer des études supérieures ? Au mieux feront-ils des études de chômeurs…
On pourrait croire que cela inquiète les fédérations de parents d’élèves, mais ce serait une erreur. Ce n’est pas, en tout cas, ce qui préoccupe la plus grosse d’entre elles, la FCPE. Avec 300.000 adhérents, la Fédération des conseils de parents d’élèves détient 40,08 % des sièges dans les lycées et collèges, et elle détient 8 sièges sur les 9 réservés aux représentants des parents d'élèves de l'enseignement public au Conseil supérieur de l’éducation. C’est dire de quel poids elle pèse.
La FCPE tenait, le week-end dernier, son congrès à Albi et sa coprésidente, Carla Dugault, a une nouvelle fois déclenché la polémique en déclarant, dans son discours d’ouverture, que « l’atroce assassinat de Samuel Paty a démontré avant toute chose que l’école, telle qu’elle est, ne répond plus collectivement à faire vivre la laïcité et des échanges pacifiés dans la communauté éducative ».
« Avant toute chose », autrement dit, ce n’est pas le terrorisme islamiste qui a armé le bras de son bourreau mais l’école. Les enseignants, donc, qui ne savent plus faire « vivre la laïcité ».
Devant la levée de boucliers, le tweet qui rapportait cette phrase a été retiré mais l’indignation demeure et l’on peut lire, dans Marianne, une tribune dénonçant « une association militante qui vient de franchir la ligne rouge ». Céline Florentino, une enseignante spécialisée, fustige « une association qui passe son temps à dénigrer les professeurs » en ignorant les assauts que subit l’école. Et si le tweet scandaleux relatant les propos de Carla Dugault a été supprimé, on ferait bien de s’intéresser au suivant, dit-elle, celui où la FCPE dénonce : « Encore trop de stéréotypes marquent les pratiques pédagogiques des enseignants, dans les apprentissages, dans l’évaluation, dans l’accompagnement à l’orientation et dans la posture professionnelle. Les préjugés ont la part belle. »
L’éducation est ainsi « dénigrée dans tous les domaines et tous les stades de la profession : les apprentissages (autant dire l'essentiel), l'évaluation (sous-entendu, inégalitaire), l'accompagnement à l'orientation et - cerise sur le gâteau - la posture professionnelle. Autrement dit, même la manière d'être est mise en cause ici. » Avec, pour finir, les « préjugés », soit une accusation à peine voilée de ces maux qu’on y accole toujours : « des qualificatifs tels que sexiste, raciste, homophobe ».
La FCPE est en pleine dérive « islamo-gauchiste » et la guerre fait rage en interne. Un « appel du 2 avril » a réuni, au printemps dernier, nombre de signataires qui, dans une tribune collective, dénonçaient une direction qui « n’hésite pas à poursuivre en justice les plus ardents défenseurs de l’école publique et de la laïcité, comme en témoigne le procès intenté – et perdu – à l’ancien inspecteur général de l’Éducation nationale Jean-Pierre Obin ». Cette offensive judiciaire, disaient-ils, « vise également les élus FCPE qui, en son sein, osent interroger cette dérive. Mises en demeure judiciaires, suspensions des mandats : nous faisons face à ce qu’il faut bien appeler une tentative d’étouffement de la démocratie interne. »
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