« Pensée complexe » : une brillante étude démonte cette obsession contemporaine

Capture d'écran
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Le concept était dû à Edgar Morin, un de ces penseurs qui maîtrisent remarquablement l'art de capter l'air du temps et d'inventer des formules qui marqueront leur époque. Il a fait florès depuis 1990 : tout le monde trouve tout « complexe », mais aussi « hybride » ou « liquide ». C'est ce que constate, avec une inquiétude mêlée d'humour, un très récent rapport de Sophie Chassat pour la Fondapol, intitulé « Complexité, critique d'une idéologie contemporaine ». Dans ce court texte (une trentaine de pages), téléchargeable en ligne, tout est dit, et bien dit. Avec un sens aigu de la précision et de l'ironie, Mme Chassat montre que, désormais, on peut consacrer des travaux de sémiologie à « la méta-complexité chez Emmanuel Macron », tandis que sont reconnus comme « complexes » des sujets aussi divers que le climat, le tri des bagages à Roissy ou l'entraînement du PSG.

Le XXe siècle était, certes, celui de la complexité. L'armée américaine avait même inventé un acronyme pour caractériser le monde de l'après-guerre froide : VUCA (en français, VICA : volatilité, incertitude, complexité, ambiguïté). Sophie Chassat énumère ces mots pompeux auxquels nous nous sommes habitués pour excuser nos péchés habituels, sur lesquels elle revient en détail. Nous nous repaissons de choses « systémiques », nous sommes des êtres « hybrides », qui conduisent des projets « transverses ». Les conséquences de cette fascination pour la complexité en tant qu'idéologie (c'est-à-dire présumée irréfutable, comme les autres fausses sciences que sont la psychanalyse et le marxisme) sont très nombreuses et tristement contemporaines : confusion mentale que l'on ne cherche pas à ordonner (« c'est complexe ») ; refus de la distinction par des mots précis et choisis ; fin de la hiérarchie des valeurs ; prétexte à l'inaction ; refus de s'engager ; refus de chercher la vérité, qui est présumée inaccessible...

Face à ces menaces que nous avons tous, inconsciemment, identifiées depuis longtemps, l'auteur (auteure, autrice ? Encore de la complexité !) démontre que la complexité perçue n'est souvent qu'une projection de notre propre incapacité à raisonner, et que c'est un confort intellectuel de cuistre, en plus d'être une invitation à accepter le chaos et à se satisfaire du statu quo. Pour vaincre cela, les solutions de ce texte, décidément brillant et plein de bon sens, consistent à retrouver deux notions : le « simple » et surtout le « crucial ». Qu'est-ce qui est grand ? Qu'est-ce qui compte ? Quel est le sens que nous voulons donner à telle ou telle chose ? Ce salutaire rappel qui nous est fait, à nous, simples citoyens, résonne comme une véritable provocation à l'égard d'un gouvernement qui a obligé les Français à se calfeutrer chez eux en 2020, qui les prend pour des imbéciles en faisant mine de croire que la révolte du peuple vient d'une mauvaise compréhension, et qu'il faut donc de la « pédagogie ».

Le goût de ce qui est simple, clair et crucial nous vient de ce que nous avons connu de meilleur : la concision spartiate, la rigueur athénienne, la frugalité romaine, la netteté apollinienne du Grand Siècle sont nés dans des périodes « complexes », mais dont les héros ne disaient pas d'une voix doucereuse « c'est complexe », préférant faire de vrais choix, des choix simples - en quelque sorte, débroussailler à la machette les forêts putrides de la complexité. On peut télécharger ici ce petit bijou de bon sens et l'on ne saurait trop le recommander à notre président de la République, dont la « pensée complexe » pourrait n'être qu'un signe de confusion mentale plutôt que de puissance intellectuelle.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

39 commentaires

  1. Macron/jupiter est au bout du rouleau, usé, inefficace si tant est qu’il l’ait jamais été, même son arrogance et son mépris habituels sont moins perceptibles ! Il devrait dégager et faire une cure de repos ! On ne le regretterais pas une seconde !

    • Même après une longue cure de repos, il sera toujours le même. Avez-vous déjà réussi à transformer une citrouille en un carrosse ?

  2. Il n’y a rien de plus insupportable que d’entendre des responsables politiques déclarer d’un sujet « c’est compliqué » Spécialité politicienne qui souhaite surtout rien faire et mettre la poussière sous le tapis et , ainsi, s’exonérer de toute action pour laquelle ils ont été élu.

  3. Enfin quelques clairvoyances dans ce monde de satisfaits ! L’exemple le plus typique de cette confusion mentale est cet appel continuel au déni . Un déni qui n’est que le constat conscient que la vérité qui nous est adressée, que nous n’avons pas perçue, que nous ne voulons pas reconnaitre , nous la recevons comme un coup de poing au visage marqueur de notre nullité. Ainsi vont nos politiques, d’autosatisfactions à la triste réalité, le constat qu’ils sont nuls. Confusion mentale du premier de cordée ! Il est dit intelligent mais nous démontre le contraire dans le choix de ses ministres ou dans les directives qu’il leur donne. Un chef qui ne commande pas, qui se satisfait des dérives qu’il constate, effets de son impuissance, et qui en vient à en reconnaître les méfaits, sur le bout des lèvres. Macron n’est pas un chef. Un comédien, un verbeux, outrecuidant très certainement, en confusion assurément.

  4. « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement ». Avec la phrase macronesque – embrouillée à l’extrême, sans ossature, ajoutée de vocabulaire « english », de mots détournés de leur sens initial, imprécis, employés n’importe comment, pompeux pour se faire « mousser » et faire croire que l’on est un génie supérieur, un Jupiter omniprésent – on est loin de la pensée classique qui s’énonce avec clarté et sobriété. Cela dénote un esprit confus qui a les pires difficultés à se faire comprendre, un discours soi-disant complexe que l’on est obligé de traduire comme une langue étrangère, qui en fait participe d’une diarrhée verbale, d’une logorrhée de camelot de foire pour vendre son absence d’idées, son incapacité à prendre des décisions sensées et raisonnables.
    En résumé, nous avons à subir une exhalaison du néant, extrêmement toxique pour les intelligences et les âmes sensibles. Ces péroraisons qui torturent, martyrisent la langue française, participent d’une autre forme de violence, plus imperceptible, mais non moins dévastatrice et féroce pour les cœurs simples et sages.
    Ces allocutions sont prononcées d’une voix doucereuse, mentholée et crémeuse, bourrée de chantilly bon marché, parfumée de la plus triste des hypocrisies mielleuses et gluantes.

  5. Pauvre Macron, déjà catégorisé comme pervers narcissique par un psychiatre, le voilà dans la confusion mentale. Ce ne serait pas un cas de destitution. Il faut consulter le conseil constitutionnel de suite.

    • Absolument ! « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement ». Soyons simples et francs, et tout irait mieux de par le monde.

  6. C’est quoi « la pensée complexe » ? La pensée machiavélique, ce machiavel qui a été le sujet d’un mémoire de fin d’étude de jupiter et qui semble tellement l’inspirer ? La pensée complexe est peut-être le célèbre « en même temps »., signe d’indécis et/ou de confusion. On m’a toujours dit « ce qui est clair s’énonce clairement ». Et oui, un bon de bon sens serait bien utile nos politicards tellement déconnectés de la réalité.

  7. confusion mentale ! tous les français le voit de plus en plus, et en allant voir l’analyse du psychiatre italien Adriano Sagatori de notre président vous comprendrez que la France est dirigé par un malade !!

  8. Trouvez moi quelque chose qui ne soit pas complexe en France. Refaire ses papiers d’identité est en cette période le meilleur exemple. La seule chose simple pour nous c’est lorsque nous devons payer les lourds impôts, ça roule tout seul.

  9. Il n’est rien de plus efficace, ni de plus difficile que la simplicité, qu’une pensée simple. Exemple : « aimez vous les uns les autres ». C’est simple, limpide, on comprend de suite ce que çà signifie. Si on met cette pensée en application, si chacun fait l’effort d’aimer son prochain, si les Ukrainiens aiment les Russes et les Américains aiment les Chinois, si les musulmans aiment les chrétiens au lieu de les égorger, il ne reste plus aucun problème dans le monde. Mais c’est si simple que c’en est extrêmement difficile. Nous en avons la preuve tous les jours.

  10. Macron pense à appliquer la feuille de route de ses maîtres comme d’ailleurs Edouard Philippe promu dans les médias. Je ne l’écoute plus 2018.
    L’article ne pourrait pas être compris par les élèves, sauf ceux du privé.

  11. « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement. Et les mots pour le dire arrivent aisément » Nicolas Boileau.
    Au siècle dernier un homme politique français disait : quand en politique un problème vous embarrasse , embrouillez le , embrouillez le .

    • le meilleurs exemple rescent de cette maxime de Boileau sont les propos tenus par le fameux « HENRI » – et tout le monde à pu constater lors des divers interview que les interviewer étaient très loin de cette simplicité, de cette expression limpide et clair –

  12. « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément », je pense que tout est dit.

    • Bien entendu ! Et les « mots pour le dire » doivent aussi sortir aisément, franchement, et à temps, que ce soit par parole explicite sans agressivité ou par écrit, et le tout sans circonvolutions, intermédiaires, bouderies ou jeux de devinettes: Ouh là là ! faites ce que je dis mais pas ce que je fais .Toutefois, il existe des cas de figure complexifiés ( par le temps et l’absence de réponse à temps) qui bloquent la pensée et l’expression, le tout générateur de chaos, néant ou embrouillamini dont on ne peut sortir que par le grand j’m’en foutisme, à l’image de notre France actuelle ( comme ça, on est à la mode et dans l’air du temps ; problèmes de timing ..

  13. Bizarrement dans certains domaines la pensée complexe n’a pas cours; les choses sont extrêmement simples, il y a le camp du Bien et celui du Mal. D’un côté les élites éclairées, mondialistes, européistes et progressistes; de l’autre la lèpre populistes, les ploucs qui votent RN, qui fument des clopes et roulent au diesel. Bref, tous ceux qui n’ont pas compris cette pensée complexe parce qu’ils ont la compréhension difficile et qu’on ne leur a pas assez expliqué.

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