Palais Rohan à Bordeaux, rocade de Toulouse : qui a vraiment mis le feu ?

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Gabrielle Cluzel avait raison de voir dans les amas des tonnes d'ordures parisiennes l'allégorie du grand affaissement de la capitale et de la France depuis trop longtemps livrée à la gauche, l'arc de la gauche, comme disent les politologues patentés, un arc qui va d'Hidalgo à Macron. Mais depuis jeudi, une autre image fait le tour des écrans, et du monde, une image suffisamment forte pour avoir pesé dans la décision d'annuler la visite officielle du roi d'Angleterre qui devait, précisément, se rendre à Bordeaux : l'incendie de la porte séculaire du palais Rohan, l'hôtel de ville de Bordeaux. C'est, par exemple, l'illustration qu'a retenue Courrier international dans son édito-revue de presse de vendredi. Tout « mouvement social » - pour parler comme Laurent Berger -, toute révolution se construit et se nourrit de telles images.

Et celle-ci risque bien de rester comme le symbole de la colère anti-Macron, à moins que, par malheur, d'autres, plus dramatiques, ne viennent la supplanter dans les prochains jours. Si elle a ainsi marqué, plus ou moins consciemment, les esprits, c'est qu'elle touche à l'imaginaire passé et l'actualité récente. Le palais Rohan est l'un des joyaux architecturaux de l'Ancien Régime, tout juste achevé à la veille de 1789. Une Bastille à prendre, pour certains nervis d'extrême gauche. Il est toujours, aujourd'hui, l'un des symboles du pouvoir. Certes, le nouveau pouvoir qui l'habite est vert et rouge, de ces mêmes Verts et Rouges qui sont les plus enragés à souffler sur les braises de la révolte, notamment dans les universités. Et il est intéressant de relire la réaction du maire de Bordeaux Pierre Hurmic : « Je suis extrêmement peiné, choqué, indigné qu'on puisse s'en prendre à l'hôtel de ville, la maison de tous les Bordelais. » Et de pleurer sur « une porte historique du XVIIIe siècle qui marque l'accueil des Bordelais et des Bordelaises dans leur mairie. C'est ce qu'on a voulu souiller, qu'on a voulu endommager, qu'on a voulu détruire. » Comme tous les révolutionnaires qui accèdent au pouvoir, en bon homme de gauche, en digne héritier d'un Lénine ou d'un Mitterrand, il feint d'oublier que le pouvoir, même entre leurs mains, reste le pouvoir. Le maire de Bordeaux feint aussi de ne pas voir qu'à force de promouvoir systématiquement, jusque dans sa politique urbaine et culturelle, la saleté, la provocation, le refus de la tradition et des grandes œuvres au profit de la création spontanée et destructrice, il fait en quelque sorte le lit des saccages et des vandalismes qui émaillent désormais ce mouvement.

Comme l'image a choqué et qu'elle inquiète, qu'elle menace aussi de rendre moins populaire la révolte, la gauche se devait d'allumer un contre-feu : une telle violence sauvage, qui s'en prend au patrimoine et aux symboles républicains, ne serait-elle pas, en fait (vous me voyez venir ?), le fait de l'extrême droite ? Il fallait y penser. Un certain Étienne Guyot, dans Rue89 Bordeaux, l'a fait : « Des casseurs d’extrême droite derrière la tentative d’incendie de la mairie de Bordeaux ? » Vous lirez l'article : aucune preuve. Pire : les premières informations émanant de sources policières ne vont absolument pas dans ce sens et, d'après Sud-Ouest, « deux des majeurs, nés entre 2000 et 2006, sont connus de la Justice pour avoir été condamnés, l’un pour outrages, usage de stupéfiants et port d’arme, et l’autre pour vol, outrage à personne dépositaire de l’autorité publique, recel et usage de stupéfiants, fait aussi savoir le parquet. » De l'insécurité ordinaire, quoi, celle que ne veut pas voir la gauche et qui, quand le climat devient insurrectionnel, donne l'incendie de cette porte historique.

Il est regrettable que la presse de gauche et d'extrême gauche ne se soit pas rendue, ce même jeudi 23 mars, à Toulouse, vers 6 h 30, dans le quartier de l'université Jean-Jaurès, au Mirail, où un groupe d'une trentaine d'étudiants - de ceux qui occupent, saccagent, pillent - est allé allumer des feux de poubelle sur la rocade au niveau de La Faourette, en toute impunité, la même qui les protège dans leurs saccages sur le campus depuis deux semaines. Une épaisse fumée noire s'est rapidement élevée ; l'incendie et les barricades ont bloqué le périphérique dans la matinée.

Pierre Hurmic a déclaré, ce vendredi, qu'« il ne faut pas laisser aux casseurs le dernier mot ». Il faudrait peut-être aussi que la gauche qu'il représente arrête de leur donner le premier et cesse sa complaisance à l'égard des casseurs et des incendiaires, notamment dans les universités.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

Vos commentaires

15 commentaires

  1. Ce matin sur C-News à 8h j’entendais une « cheffe » de gendarmerie nous expliquer que ses troupes avaient « résisté » aux manifestants contre les « bassines »… Je suis surpris d’apprendre que la gendarmerie ne soit plus à même de garantir l’ordre et la sécurité dans ce pays, et qu’elle se cantonne à un rôle de résistance plutôt que de maintien de l’ordre. Cet étonnant concept semble aujourd’hui considéré « normal » mais indique une dérive des forces de l’ordre quant à leur mission régalienne. Elles sont visiblement dépassées et reculent devant les hordes de casseurs qui sont déterminés à les attaquer avec des armes létales alors qu’elles n’ont d’ordre que celui de résister… Les blessés graves que compte la gendarmerie après cette manifestation en dit long sur l’inefficacité de nos forces de l’ordre (CRS, police et gendarmerie). Nos protecteurs ne sont en effet plus à même de prendre l’initiative dans ces manifestations et le chaos ne peut que s’installer. A ce stade de gravité, le gouvernement ne peut que mettre l’armée en action et décréter l’état d’urgence et le couvre-feu. Comment peut-on en effet espérer rétablir l’ordre si les casseurs sont plus nombreux et mieux armés que nos forces de l’ordre ?

  2. Il ne se rendent pas compte à quel point ils sont ridicules… ce sont des casseurs d’extreme droite qui se sont mêlés au cortège des manifestants de Paris, pour mettre le feu aux poubelles… ce sont des casseurs d’extrême droite qui ont mis le feu à la porte de la mairie de Bordeaux… ce sont des casseurs d’extrême droite qui ont bloqué la rocade de Toulouse et ce sont des casseurs d’extrême droite qui se sont payés du flic ce Week-end End dans les Deux Sèvres… et c’est bien sûr parce qu’ils font peur aux Français que les sondages nous disent qu’en cas de dissolution, c’est l’extrême droite qui remporterait le Jack pot… Maso les Français.

  3. Macron essaie de mettre en oeuvre les conseils de Machiavel. Envoyer des racailles pour mettre à sac la ville jusqu’à ce que les habitants qui restent vivants appellent à l’aide leur ennemie vue alors comme la fée salvatrice. C’est démentiel mais la sinistre réalité. Car enfin comment donner des leçons de « démocratie » à la terre entière et ne pas être capable de maintenir l’ordre chez soi? C’est comme si un cul de jatte était entraineur de course à pieds, un manchot était entraineur de javelot, un nain famélique était entraineur de lancé de poids ou une victime agueusique et anosmique de la covid était chef d’une brigade de cuisinier. Je crois que tous nos ministres sont fous mais qui a bien pu les recruter sciemment en choisissant les meilleurs fous ?

  4. L’incendiaire, mais tout le monde le connait, c’est le lider maximo, celui qui dit, entre autres, que les policiers sont des barbares et que la police tue, celui qui prétend être la République à lui tout seul, celui que tous les autres du gouvernement et de l’AN laissent parler sans protester !
    Et concernant Bordeaux, j’ai tout spécialement apprécié que des anarchistes de l’ultra-gauche mettent le feu à un bâtiment occupé par une municipalité tout autant d’ultra-gauche. Au moins ils doivent pouvoir se comprendre au même titre que des terroristes musulmans qui s’en prennent à d’autres musulmans.

  5. Les seuls qui pourraient s’en réjouir sont, comme pour Notre-Dame de Paris, les artisans ébénistes que la France la chance d’encore conserver, pour combien de temps, pour la reconstruire et la sculpter à l’identique. Mais, entre nous soit-dit, au lieu d’un maire écolo-bobo-gaucho qui se lamente mais emmerde tout le monde avec sers idées farfelues à coucher dehors, il eut mieux valu pour Bordeaux un maire à poigne capable d’assurer la sécurité des biens et des personnes dans sa ville et au moins pour ses propres bâtiments municipaux.

  6. Si on avait vraiment voulu faire un coup de filet, en rase campagne c’était facile on pouvait encercler la zone (y compris avec l’aide de l’armée). Car ils ne sont pas venus à pied ! Mais on voit bien que Macron ne le veut pas. Pour quelles obscures raisons ? Devinez

  7. c’est étonnant que personne ne soupçonne macron et ses rampants d’être à la manoeuvre derrière tout çà.
    Les briseurs de grêves, vous ne connaissez pas?

    • Tout à fait : les soi-disant antifas (qui sont en fait les vrais fachos depuis toujours) et autres blacks blocks sont les idiots utiles, véritables nervis du gouvernement, manipulés pour briser dans la violence toutes contestations du peuple (milice qui a réussi à disloquer le mouvement des GJ). Macron va jouer le pourrissement de la situation jusqu’au moment où la bourgeoisie apeurée et son camp du bien vont lui demander de faire respecter l’autorité et l’ordre. A voir si ça va marcher cette fois-ci

  8. La Bretagne, la Loire Atlantique sont devenues des terres d’extrême gauche où il y règne un terrorisme politique. Bordeaux commence à subir le même sort. Lyon et les villes où les maires sont escrologistes ou d’autres partis de gauche deviennent des territoires d’antifas.

  9. Ce qui est grave c’est que sur la « 5 » (« c’est à vous ») hier soir des journalistes se sont permis de relayer cette « information », venu un « média » d’extrême gauche, sans aucune réserve…
    Décidément quand on ne sait pas, cest forcément « l’extrême droaaaate » qui comme chacun sait commence ou fini « l’extrême gauche » !

    • Eh oui, l’eau mouille et le service public est gangrené par la bien- pensance!
      So, what’s new pussycat?

  10. Hurmic ne sait pas ce qu’il veut, lui qui ne voulait pas du « bois mort » d’un arbre de Noël. La porte de sa mairie, ce n’est pas du bois mort depuis deux siècles et demi ? Il devrait dire « bon débarras » !

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