On peut nous mettre une cagoule et « anonymiser » les procédures : tant qu’il y aura des fichiers qui circuleront librement…

Rebondissement dans l'affaire de l'assassinat du couple de policiers de Magnanville (Yvelines) : une policière a été interpellée et placée en garde à vue lundi. Elle aurait pu détenir à son domicile des fichiers donnant l'adresse du couple assassiné. Or, comme par ailleurs cette policière a hébergé à son domicile une amie de sa fille fichée S, cette personne aurait pu fouiller dans les affaires de la policière et trouver des adresses. C'est une hypothèse évoquée par Alexandre Langlois au micro de Boulevard Voltaire, responsable d'un syndicat de police.

Au-delà de cette affaire, Alexandre Langlois pointe le cas des fichiers de cartes grises (où l'on peut trouver les noms et adresses de policiers) qui sont vendues à des sociétés privées. N'importe qui travaillant dans ces sociétés peut avoir accès à ces données.

Nouveau rebondissement dans l’affaire du meurtre des policiers de Magnanville. Un membre de la police a été interpellé et placé en garde à vue. Elle aurait fourni des fichiers donnant l’adresse du couple de policiers assassinés. Qui est cette personne ?

Pour ce que nous savons actuellement, cette personne n’a pas fourni d’éléments. En qualité de délégué Alliance dans le département des Yvelines, cadre dans lequel je l’ai côtoyée, elle aurait pu avoir des fichiers chez elle. Elle a hébergé une amie de sa fille qui était fichée S et incarcérée à l’heure actuelle. Cette amie aurait pu fouiller dans ses affaires et trouver des adresses via soit des fichiers d’adhérents aux syndicats, soit des papiers de bulletin d’adhésion.
Il reste encore une dernière possibilité, mais elle n’est a priori pas la piste retenue. Puisqu’elle siège en commission administrative paritaire pour les mutations et l’avancement, elle aurait pu avoir aussi des documents à la maison sur ces dossiers-là. Mais les deux collègues qui ont été malheureusement assassinés n’étaient, semble-t-il, pas concernés.
Le fait qu’elle l’ait donné volontairement n’est a priori pas retenu. Une négligence reste possible, mais dans ce cas, elle serait involontaire.

Est-il possible que des centaines d’adresses de fonctionnaires de police soient en balade dans la nature et puissent tomber entre de mauvaises mains ?

Malheureusement, c’est possible. Ce n’est pas la première fois que cela arrive. Il y a une mutuelle police et un autre syndicat de police qui s’étaient fait pirater, sur Internet, leur fichier adhérents avec des centaines, voire des milliers d’adresses. On ne sait, d’ailleurs, pas où se trouvent ces adresses.
Au-delà de cela, les fichiers des cartes grises, avec le nom, prénom et voitures des fonctionnaires de police, sont vendus à des sociétés privées. N’importe quelle personne travaillant dans ces sociétés peut avoir accès au nom, prénom et adresse des fonctionnaires de police. Il suffit de se balader à côté d’un commissariat, de prendre les plaques en photo et de les passer dans le fichier.
On peut anonymiser nos procédures ou nous mettre une cagoule : tant qu’on aura des fichiers qui circuleront librement, avec l’aide de l’État de surcroît, nous ne serons pas en sécurité.

Mediapart a révélé que les renseignements tenteraient de surveiller les membres des forces de l’ordre, qu’ils soient militaires, gendarmes ou policiers, ayant un possible lien avec l’extrême droite radicale. Nous avons constaté des reproches sur les réseaux sociaux, et notamment dans l’opinion, comme si la priorité, aujourd’hui, n’était plus vraiment les djihadistes mais toute forme de radicalisation. Partagez-vous cette position ?

À l’heure actuelle, nous n’avons pas les moyens de tout faire. On est dans un jeu de communication en disant que la priorité du moment, c’est cela, pour des besoins politiques en général, alors que notre mission devrait être de surveiller tous les gens qui sont potentiellement dangereux, quelle que soit leur dangerosité et le motif de leur dangerosité. On nous dit, aujourd’hui, de travailler sur l’extrême droite. Avant cela, on nous disait de travailler sur l’extrême radical. Et, encore avant, sur l’extrême gauche.
On ne devrait pas prioriser les dangers, mais tous les suivre.
La différence entre un plan communication politique et le travail du policier est là. Malheureusement, ce sont les politiques qui nous donnent le budget et qui nous empêchent de faire correctement notre travail.

Est-ce un problème de moyens ?

J’ignore les raisons de cette communication. En revanche, il est certain que nous avons un problème de moyens. Nous ne pouvons pas tout faire en même temps. Ce n’est pas normal dans un pays comme la France.

Alexandre Langlois
Alexandre Langlois
Secrétaire Général du syndicat de police VIGI

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