Nommera ? Nommera pas ? Nommera quand ? Remaniement, le sketch !

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Donc, la France passera la nuit sans Premier ministre ; c’est l’hypothèse la plus probable, ce lundi soir, ce qui ne traumatisera personne. Élisabeth Borne s’en va sans gloire, politiquement usée, non sans dire clairement officiellement que le président de la République lui a demandé de partir. Gabriel Attal la remplacera-t-il ? La probable nouvelle a occupé toute la journée sur les plateaux de télévision et des rédactions.

La fermeté face à ceux qui s’attaquent à la France paye

Et pourtant… Les Français ont compris depuis longtemps que le futur Premier ministre de Macron ne changerait rien au destin de la France. Le seul fait qu’on évoque le nom de Gabriel Attal, dont l’expérience de ministre n’atteint que quelques mois, en dit long. Quels sont les critères du président de la République ? Au ministère de l’Éducation nationale, Attal a rompu avec un prédécesseur particulièrement nocif, notamment sur l’abaya. Gabriel Attal en a retiré une gloire immédiate dans l’opinion et un joli bond dans les sondages. Ce qui montre que la fermeté face à ceux qui s’attaquent à la France paye.

Avec quelques mesures d'autorité simples, le ministre de l’Éducation a réinventé le positionnement du centre macroniste, si flasque et si perdu que personne ne savait plus où il était, Macron moins que personne. Ce qui lui vaut cette carrière explosive. Ce centre, par simple bon sens et pragmatisme, Attal l’a tiré vers la droite, comme le demandent les Français. Eurêka, voici l’homme de la situation ! Si Macron avait voulu montrer et démontrer sa qualité de démagogue, gouverné comme la girouette du clocher par le vent des sondages d’opinion, il n’aurait pu trouver mieux que cet épisode de changement de gouvernement qui tient davantage du sketch improvisé façon stand-up que de la stratégie déployée avec réflexion dans l’intérêt de la France et des Français.

Vers un potentat entouré de faire-valoir

Attal est brillant sans doute, mais inexpérimenté, donc malléable, aura pensé Macron. Il suffit de l’entourer de solides macronistes plus technos que lui. Et puis, la jeunesse est une valeur en elle-même pour le jeune Président Macron. Cela aussi, c’est bon pour la télévision, donc bon pour les sondages. Macron refuse de comprendre que lorsqu’il aura suffisamment déteint sur son jeune ministre, l’aura suffisamment coiffé, écrasé, piétiné, exposé, comme il l’a fait avec ses prédécesseurs, lui-même sera à nouveau seul face au peuple français qui se désespère.

Il ne voit pas non plus que, ce faisant, il bouscule les barons et déstabilise son gouvernement. Comment un Le Maire, autrement plus expérimenté qu’Attal, peut-il accueillir cette rumeur ou cette décision qui porte au-dessus de lui dans la hiérarchie gouvernementale un homme jeune qui fut sous sa responsabilité ? Il y a, chez Macron, une fibre particulière, un réflexe d’enfant roi qui veut casser ses jouets et n’accepte pour amis que ceux qui acceptent une autorité quasi despotique.

C’est le glissement classique du pouvoir vers un potentat entouré de faire-valoir. On ne tient pas longtemps, à Matignon, dans cette configuration et sous une telle autorité. C’est comme si l’expérience d’Édouard Philippe, qui fut plus populaire que le Président, avait été traumatisante pour Emmanuel Macron. Après Philippe, c’en sera fini des personnalités fortes. Jean Castex est la figure même du régisseur d’autrefois, travailleur, dévoué à son maître sans autre ambition que de le servir. Élisabeth Borne a le profil d’une gestionnaire d’entreprise d’État, pas vraiment menaçante. On le sait : les grands chefs choisissent des personnalités d’exception, quitte à ce qu’elles leur fassent de l’ombre. Les petits chefs s’occupent, au contraire, longuement que personne d’autre ne prenne la lumière. Qu’importe l’impact sur le projet, en l’occurrence sur la France. Défaut de jeunesse ?

L’âge, la sagesse et l’expérience, étaient prisés depuis les Grecs et en France jusqu’à peu : de Gaulle meurt en 1970 peu avant ses 80 ans, 18 mois seulement après avoir quitté le pouvoir. Mitterrand part de l'Élysée à peine plus jeune, Chirac lâche la présidence à 74 ans. Mais l’âge, longtemps synonyme de sagesse et d’expérience, ne fait plus recette.

En France, un Président de 46 ans s’apprêterait ainsi à choisir un Premier ministre de 34 ans ! Qu'importe. L'important, c'est de changer, de tenir la France en haleine, de montrer qu'on détient encore la foudre des nominations, de bouger, de susciter l'intérêt, d'occuper la scène coûte que coûte. Le sketch continue.

Marc Baudriller
Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

52 commentaires

  1. Seul l’égoïsme (ou plutôt l’égocentisme) du décideur peut expliquer ce choix ridicule : le jeune Ministre de l’Education Nationale a entrainé une adhésion quasi générale par la fermeté de ses prises de position à la tête de ce Ministère : il était plus que souhaitable, nécessaire, de le laisser poursuivre son travail de redressement de l’Ecole en France plutôt que de l’en déplacer ‘car tel est le bon plaisir ‘ d’un Maitre capricieux et sans projet autre que de soutenir sa propre gloire …!

  2. « Pierre Corneille, fait dire à Rodrigue, dans Le Cid : « Je suis jeune, il est vrai ; mais aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années ». Il voulait exprimer le fait que le talent et les dons innés n’ont pas besoin d’attendre les années de maturité pour s’exprimer. »
    Attendons pour voir si ces vers sont d’actualité dans ce cas d’espèce !
    Victorine31

  3. Et bien voilà, Attal vient d’être nommé 1 er ministre . Quand on lui presse le nez il en sort du lait . Il va faire une magnifique paire avec Macron . C’est à pleurer !

  4. Çà y est le petit dieu vient d’être nommé et , à en croire les commentaires tous plus dytirembiques les uns que les autres, le club des finalistes de la pédale picarde peut être créé.

  5. Quoi qu’il en soit , le mal est fait . Il aura beau changer et rechanger de 1er sinistre , rien n’y changera . La catastrophe est bel et bien là . E.Borne la dame aux 23 49/3 , quel mépris pour le peuple FRANCAIS .Macron a tiers mondialisé la FRANCE . La seule chose que veut ce cuistre c’est la présidence de cette europe mortifère afin qu’il puisse terminer son oeuvre ; la destruction de la FRANCE .

  6. Attal débute -bien- à l’éducation nationale, et on le retire ? ça, c’est du « gouverner, c’est prévoir » !!!

  7. Que ce soit Attal où un autre , rien ne changera tant qu’il mènera la politique voulue par le monarque .

  8. A quand une bonne dictature qui envoie toutes ces équipes aux bancs des accusés ,et pourquoi pas à une forme d’échafaud en leur supprimant avec effet rétroactif tous leurs acquis, biens personnels et retraites incluses.

  9. Malheur au pays dont le roi est un enfant, disait le poète !
    On a pourtant encore en tête, la catastrophe de Fabius à Matignon en 84. Entre le sang contaminé, les époux Turrenge, les morts suspectes de Coluche, LeLuron et Balavoine, sans oublier son débat raté en clown blanc hyper-grimé face à Chirac.

  10. Très bonne analyse.
    Pour moi, Macron, depuis le début de son deuxième quinquennat n’a qu’un seul objectif :succéder à Von der Leyen. C’est pour cela qu’il la caresse frénétiquement dans le sens du poil.
    Il se prend pour James Bond, à qui le monde ne suffisait plus. A son niveau, la France ne lui suffit plus, elle ne lui sert que de marchepied.

    • À force de la caresser dans le sens du poil elle va tous les perdre et va se retrouver…à poils. Sauve qui peut!

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