Meloni et Tolkien : une prédilection qui horripile à gauche

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Le 6 octobre dernier, France Culture consacrait une émission sur « la récupération de Tolkien par Giorgia Meloni, un exemple de marketing politique ». Pour illustrer cette chronique, Vincent Ferré, professeur de littérature à la Sorbonne, était invité à s’exprimer sur le « vrai » sens de l’œuvre de Tolkien dont le message serait aux antipodes de la pensée politique de Giorgia Meloni. On pouvait s’attendre à un entretien, somme toute, assez convenu ; ce fut une caricature.

Pour ce professeur de littérature, Giorgia Meloni, « dans une logique de marketing politique, utilise Tolkien... » Il ajoute : « Mais c’est assez choquant parce que tout ce qui est dit va à l’encontre à la fois des convictions de Tolkien comme personne et des messages du livre du Seigneur des anneaux, aussi pluriels que soient ces messages. Il y a une double confusion volontaire de la part de cette responsable politique, je m’en tiendrai à l’aspect littéraire, je ne vais pas la juger en tant que leader politique. »

Il va - évidemment - faire le contraire tout au long de cette chronique, et de littérature il ne fut point question. Jugez-en.

« Certains lecteurs voient une allégorie de la Seconde Guerre mondiale dans l’histoire de ce combat de peuples libres contre un tyran. C’est un peu paradoxal parce qu’explicitement, il a comparé la lutte des alliés contre Hitler à la lutte des peuples libres, les Hobbits, les Hommes, les Elfes, les Nains contre Sauron, […] donc c’est un petit peu gênant pour Meloni et l’extrême droite italienne parce que, sauf erreur de ma part, Mussolini n’était pas du côté des alliés, pendant la Seconde Guerre mondiale. » Certes, Vincent Ferré n’est pas professeur d’histoire, mais amalgamer, dans une même phrase et sans même prendre le temps de respirer, Meloni, Hitler et l’extrême droite italienne, c'est aller un peu vite. Il fallait oser. Il l’a fait.

Ce distingué universitaire, tout à sa lecture, rappelons-le non politique mais exclusivement littéraire, poursuit : « Les lectures politiques les plus compatibles du Seigneur des anneaux avec la cohérence du texte sont progressistes […] ce qui a été valorisé, c’est le rapport des Hobbits à la nature, l’éloge de la forêt contre la destruction industrielle, et on sait que le Seigneur des anneaux a joué un rôle important dans la naissance de Greenpeace... » Les Hobbits sont donc en quelque sorte les ancêtres de nos écolos, mais là, il n’y a pas de récupération politique qui tienne : vous l’aurez compris, tout ce qui est à gauche est invariablement dans le camp du Bien, dans une sorte de non-dit explicite qui vaut évidence intrinsèque.

Cependant, Vincent Ferré explique plus loin que l’œuvre de Tolkien « est une réflexion sur le rôle de la communauté et, dans le texte, il y a une grande méfiance à l’égard du pouvoir totalitaire, c’est un roman antitotalitaire... » Tolkien ne peut donc pas être récupéré par la droite italienne. CQFD.

Or, s’il s’était intéressé à l’histoire de Giorgia Meloni, il aurait su que le sens de l’appartenance à une communauté, politique et nationale est déterminant dans ses choix. Et s’il s’était penché sur l’histoire politique italienne récente, il aurait su que, depuis dix ans, plusieurs des chefs de gouvernement italiens qui se sont succédé n’étaient ni désignés ni consacrés par le vote démocratique et que le peuple italien l’a vécu comme une confiscation du pouvoir, ce qui explique en partie le résultat des dernières élections…

D'ailleurs, l’attrait de Giorgia Meloni et plus largement de la droite italienne pour Le Seigneur des anneaux ne date pas d'aujourd'hui. Dans son autobiographie sortie, ces jours-ci, en France, aux Éditions Chora, Giorgia Meloni explique que, dès le début de son engagement en politique, il y a une trentaine d’années, « pour nous, ce livre était déjà un mythe à l’époque, bien avant que le cinéma n’en fasse un phénomène médiatique ». Elle raconte également que les associations de jeunesse regroupées au sein de son mouvement organisaient des carnavals pour les enfants où les militants, déguisés en personnages de Tolkien, racontaient et jouaient des scènes du livre. La lecture de Tolkien est pour Giorgia Meloni et ses compagnons militants d’alors une part importante de leur formation intellectuelle qu’ils entendaient partager et transmettre.

Il y a déjà vingt ans, elle concluait un de ses discours par une citation : « Il ne nous appartient pas cependant de régler toutes les fortunes du monde, mais de faire ce qui est en nous pour le secours des années où nous sommes placés, d’extirper le mal dans les champs que nous connaissons, afin que ceux qui vivront après aient une terre saine à cultiver. » Depuis, bien plus qu’un slogan de marketing politique, il semble que ce fut pour elle le moteur de son action politique.

Marie d'Armagnac
Marie d'Armagnac
Journaliste à BV, spécialiste de l'international, écrivain

Vos commentaires

14 commentaires

  1. Qu’un professeur de la Sorbonne soit de gauche pourrait prouver son opportunisme. Qu’il soit intellectuellement malhonnête est par contre inadmissible.

  2. Discourir sur France Culture a t’il encore un sens tant cette radio ne représente plus que la sphère du politiquement correct. Ce qui est inadmissible c’est que cette radio comme toutes les chaines publiques distillent un discours totalitaire payé avec nos impôts.

  3. Les livres qui dérangent le pouvoir tels 1984 ou encore Le Meilleur des Mondes seront un jour utilisés par les médias qui les présenteront comme des ouvrages qui dénoncent la démocratie, tout se fait à l’envers maintenant.

  4. Un professeur est nommé par ses pairs. Il ne saurait être que maître de conférence s’il n’est pas de gauche. C’est ainsi malheureusement.

  5. « Il fallait oser. Il l’a fait. » Ils font, tous, ça ! A l’AFP, sur BFM et même dans le Figaro. Ils ne connaissent rien de l’Italie rien du fascisme. Où sont les Starace, les Farinacci, l’huile de ricin, les manganelli, les squadre ? L’assassinat de Matteotti ? Meloni, et sa coalition ont été élues par le Peuple Italien, conformément à la Constitution de la République Italienne. Les institutions fonctionnent régulièrement et le Président Mattarella exerce ses pouvoir le plus légalement du monde. Seulement voilà quand le les sénateurs élisent le président du Sénat les menaces de mort viennent des nostalgiques des Brigate Rosse (Les amis de Battisti ; les cousins des Black Blocs). Où sont la violence et le terrorisme politique ? Qui sont les vrais fascistes ?

    • « De nos jours », parce qu’il y a eu des décennies et des jours ou la Sorbonne n’était pas vérolée par la gauche?

  6. Les italiens ont eu droit aux discours, aux promesses, au baratin. Bientôt on verra ce qu’il en reste et de ce qu’il en est.

  7. L’universitaire, fonctionnaire bêtement gauchiste, sensé remplir le rôle de caution intélectuelle et d’une mauvaise foi sans limite. Rien de nouveau.

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