[MÉDIAS] Selon 20 Minutes, LFI n’a rien d’extrême

Panot Portes Melenchon

La propagande anti-RN continue. Après l’entrée en campagne de nombreux médias publics - et jusqu’à la Société des journalistes de France 3 qui a, ouvertement, pris position contre « l’extrême droite » -, c’est au tour du secteur privé de se joindre à la lutte contre le fascisme. Le quotidien 20 Minutes fait partie de ces valeureux résistants. Vendredi 14 juin, le journal gratuit a ainsi publié un article visant à réhabiliter le parti de Jean-Luc Mélenchon, principal opposant au RN. Son titre est sans détour : « Pourquoi c’est faux de dire que LFI est un parti d’extrême gauche ? » Vous l’aurez compris, il s’agit là de battre en brèche ce qui ne serait qu’une intox et présenter la secte insoumise comme un parti modéré, s’inscrivant dans une gauche classique et parfaitement républicaine.

Pour relever cette gageure, la journaliste Élise Martin avance deux arguments. Le premier, de nature juridique, lui a été fourni clés en main par le Conseil d’État. « Dans sa décision du 11 mars 2024, l’institution a tranché : La France insoumise tout comme le Parti communiste français font partie du bloc "gauche", comme l’avait décidé le ministère de l’Intérieur qui attribue les nuances politiques au moment des élections », jubile Élise, trop contente de pouvoir s’appuyer sur une instance officielle. Ce à quoi on pourrait néanmoins rétorquer que les jugements du Conseil d’État ne sont pas paroles d’évangile. Loin s’en faut. Un esprit chagrin pourrait déceler un certain biais idéologique dans nombre de décisions rendues, dernièrement, par la plus haute juridiction administrative du pays. Remontage de bretelles adressé à CNews pour un pseudo manque de pluralisme, annulation de la dissolution des Soulèvements de la Terre, avalisation du déboulonnage de statues chrétiennes, injonction faite à l’État de faire revenir en France un Ouzbek radicalisé expulsé par le ministère de l’Intérieur, quelques jours plus tôt… Autant dire que l’impartialité du fameux Conseil laisse grandement à désirer.

Mauvaise foi et négationnisme

Le second juge de paix appelé à la rescousse par la journaliste de 20 Minutes se nomme Aurélien Dubuisson. L’homme est chercheur associé au Centre d’histoire de Sciences Po. Ça en jette. Pour ce grand « spécialiste », Jean-Luc Mélenchon et ses sbires n’auraient rien, mais alors rien du tout, à voir avec l’extrémisme. L’extrême gauche, selon lui, est caractérisée par sa volonté de « rupture avec le système capitaliste tout en procédant à la critique, plus ou moins radicale, de la gauche institutionnelle ». Bien loin de cette radicalité, LFI serait plutôt « un mouvement réformiste qui ne vise pas une rupture nette avec le capitalisme mais désire plutôt, au moins dans un premier temps, l’adoption de mesures limitant les effets des formes débridées du libéralisme économique actuel ». Ben voyons !

Aurélien Dubuisson explique que la « rhétorique » d’extrémisation de LFI est avant tout liée au conflit israélo-palestinien et aux accusations d’antisémitisme faites au parti. Mais là encore, l’homme affirme que ces attaques n’auraient absolument rien de fondé. « Qualifier ce mouvement d’antisémite relève de la diffamation. Si les dirigeants et députés de LFI tenaient des propos antisémites, ils seraient, à raison, condamnés par la Justice. À ma connaissance, aucun d’entre eux ne l’a été. » N’en déplaise au chercheur, ce nouveau recours fallacieux aux juges n’épuise pas le sujet de l’antisémitisme. Le nécessaire processus judiciaire ne doit pas entraver les discours de vérité. Il ne l’a pas fait au siècle dernier - où l’on n’a pas attendu l’avis des cours de justice pour dire la nature judéophobe des nazis - et ne doit pas le faire, non plus, aujourd’hui. Nul besoin de condamnations juridiques en bonne et due forme pour dénoncer l’antisémitisme d’élus qui appellent à l’éradication d’Israël ou font l’éloge de milices pogromistes.

Vous ne serez pas surpris d’apprendre que cet article qui conteste mordicus l’extrémisme politique des Insoumis affirme, à l’inverse, que celui du RN ne fait pas l’ombre d’un doute. « L’origine [du Front national, devenu Rassemblement national], son noyau de militants et les références idéologiques diverses qui s’y côtoient inscrivent indubitablement l’histoire de ce parti dans la filiation de l’extrême droite française », affirme ainsi 20 Minutes, sans préciser quels sont les « militants » et « références idéologiques » qui relèveraient aujourd’hui d’un quelconque extrémisme. La méthode est toujours la même : on évoque la radicalité de Jean-Marie Le Pen pour fustiger celle de sa fille. Marine Le Pen a beau rompre ses liens avec son père, refonder son parti, en virer les derniers membres sulfureux, se distinguer par un comportement parfaitement républicain, mollir sur la question identitaire, rien n’y fait. Les bien-pensants continuent de la ranger dans la case extrémiste. À l’inverse, les mêmes nous jurent que l’extrême gauche séditieuse et antisémite est, en réalité, très modérée.

Des « experts » tout sauf objectifs

Ce sketch médiatique est entretenu, comme on l’a vu, par le recours à des juges politisés, mais aussi par l’intervention de pseudo-experts tout aussi orientés. C’est le cas du spécialiste convoqué par 20 Minutes. Il se trouve, en effet, qu’Aurélien Dubuisson figure parmi les signataires d'une tribune publiée en mai 2017 dans Libération, demandant la relaxe de Jean-Marc Rouillan, condamné pour apologie du terrorisme islamiste. Le même Jean-Marc Rouillan qui a cofondé Action directe, un groupe d'extrême gauche qui a marqué les années de plomb par une série de 80 attentats en France ! Rien que ça. De là à penser que notre historien fait preuve d’une grande mansuétude à l’égard d’un certain extrémisme…

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 10/09/2024 à 9:13.
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Jean Kast
Journaliste indépendant, culture et société

Vos commentaires

22 commentaires

  1. Toute la lie de la société se dévoile. Tous disposés à vendre leur âme par d’obscures raisonnements qu’un bon toutou au nez fin n’y retrouverait pas sa voie. Électeurs, nous sommes soumis aux pires imbécilité à gober. Ces politiques en suprêmes prétentions nous considèrent vraiment pour « des moins que rien  » . Bardella, dans cette tourmente, est peut-être le seul à garder un cap sérieux, bien planté sur ses assises . Tout ce qui s’oppose n’est que galéjades à dormir debout, à commencer par Macron. Dans ses discours, chacune de ses idées serait à reprendre avec un fond de vérité. Il nous insupporte de plus en plus. N’a-t-il pas évoqué « guerre civile possible » ? Dès les premiers jours de son premier quinquennat il a craqué l’allumette. N’a-t-il pas qualifié les populistes de « lépreux » ? Depuis, il ne fait qu’entretenir le feu.

    • J’approuve ! c’est effectivement toute la lie qui se dévoile, et ils nous prennent pour des bouseux illettrés.
      Ils vendent leur âme (en ont-ils une ?) au diable, vraisemblablement contre espèces sonnantes ou en nature, mais quel est leur but, au final?

  2. Superbe, la photo d’intitulé. Supprimez les écharpes (et le Noir), rajoutez une rambarde et on se retrouve au défilé du 1er mai sur la Place Rouge.

  3. C’est facile pour le président de présenter l’éventuelle victoire du RN comme déclencheur de guerre civile… Si la guerre civile ne s’est pas encore déclenchée c’est justement en raison des soumissions répétées de nos dirigeants envers ceux qui dirigent en coulisse le pays. Nos élites sont pris en otage ou consentantes, mais la paix sociale est l’enjeu brandit par ces charmantes taupes qui font la loi dans les couloirs des ministères. Des taupes que nous avons lentement laissées prendre du galon jusqu’à ne plus pouvoir les contrôler. Alors, si la guerre civile démarre le 7 juillet ce sera tout simplement en représailles de ne pas avoir suffisamment diabolisé les électeurs de droite, et non de droite extrême comme tente de les qualifier ces traitres.

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