Macron et Attal veulent-ils vraiment améliorer la formation des maîtres ?

ecole

N'accablons pas Gabriel Attal, qui semble plein de bonnes intentions, bien que, selon le proverbe, l'enfer en soit pavé. Le Figaro titre « Des cahiers remplis de fautes d’orthographe », soulignant le manque de formation d'un certain nombre de contractuels, rapidement recrutés pour pallier le manque de titulaires. Sans formation, point de maîtres compétents : sans doute, mais quelle formation ?

Pour enseigner correctement la grammaire et l'orthographe, il faut réunir plusieurs conditions : des horaires suffisants, des méthodes d'apprentissage efficaces, des professeurs qui dominent eux-mêmes les savoirs qu'ils doivent transmettre. Le seul énoncé de ces conditions montre tout ce qu'il reste à faire pour améliorer la situation. On pourrait en dire autant des mathématiques auxquelles, si l'on en croit Marianne, « les élèves de sixième ne comprennent plus rien […] et surtout aux fractions ».

Tout commence à l'école primaire.

Quand un système permet l'entrée en sixième d'enfants qui ne maîtrisent ni la lecture, ni l'écriture, ni le calcul, il les voue irrémédiablement à l'échec. Le passage systématique dans la classe supérieure – le doublement étant considéré comme traumatisant et discriminatoire – conduit jusqu'à la troisième, voire jusqu'en terminale, des élèves qu'on a bercés d'illusions et qui se retrouvent, au bout de leur parcours, bien démunis. Il est vrai que le système les a, en quelque sorte, jetés dans le vide.

Tout commence à l'école primaire, où les connaissances fondamentales sont censées s'acquérir, ce qui suppose qu'on mette un soin particulier à recruter des maîtres compétents. Ce n'est pas le cas partout, notamment dans des académies déficitaires qui peinent à recruter malgré des barres d'admission pourtant très basses, le manque de titulaires étant compensé par l'embauche à la va-vite de contractuels plus ou moins formés en quelques jours. Quant aux titulaires, ils sont endoctrinés par les INSPE (l'Institut national supérieur du professorat et de l'éducation forme les futurs professeurs destinés à enseigner à l'école), qui les déforment plus qu'ils ne les forment.

Emmanuel Macron, qui ne manque pas d'idées, même des plus mauvaises, a récemment déclaré qu'il fallait « complètement changer le système de recrutement de nos enseignants ». Il voudrait « revenir à un système qu’on connaissait par le passé, qui fonctionnait, qui est un peu celui des écoles normales ». Gabriel Attal lui a emboîté le pas sans trop savoir où il le menait. Car c'est bien beau, d'évoquer les anciennes écoles normales et les « hussards noirs », encore faudrait-il qu'on leur apprît à maîtriser les matières qu'ils enseigneront.

Les recteurs qui ont encore une formation universitaire ont dû bien rire.

Quelques jours avant, devant les recteurs, Macron avait annoncé sa décision de retrousser ses manches et de « prendre à bras-le-corps » le sujet de la formation des maîtres en inventant un « parcours ad hoc ». Sans vouloir l'offenser, ce propos ne veut absolument rien dire. Les recteurs qui ont encore une formation universitaire ont dû bien rire sous les épitoges herminées qu'ils ne portent plus ! Si Macron voulait être pris au sérieux, il aurait dû mieux se préparer et préciser sa pensée.

Il aurait pu annoncer, par exemple, qu'il instaurerait, pour les bacheliers se destinant à devenir instituteurs, un concours où seraient sélectionnés les meilleurs dans les disciplines fondamentales, en se montrant intraitable sur l'orthographe, la grammaire et le calcul (sans calculatrice). Ou, encore, que les candidats ainsi retenus seraient formés dans des écoles professionnelles où ils prépareraient une licence pluridisciplinaire exigeante. Enfin, qu'il supprimerait, par la même occasion, les INSPE qui ne sont d'aucune utilité et coûtent, selon sa formule, un pognon de dingue. On peut toujours rêver...

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

Vos commentaires

16 commentaires

  1. Encore une fois enfumage avec Macron : un jour blanc , un jour noir et au final rien que du vent , aucune action concrète et la destruction de ce pays continue .

  2. Un grand merci à Monsieur Kerlouan parce qu’il nous met au courant des incroyables problèmes qui affectent la formation de nos écoliers…J’ai, personnellement, il y a déjà quelques décennies, pu remarquer des FAUTES D’ORTHOGRAPHE dans le message écrit par un « enseignant » ( ?) sur le carnet de correspondance de l’une de mes filles . Ce qui me semblait ‘accidentel’….est devenu GENERAL !!!!

  3. De mon temps (mais j’ai 75 ans…) il y avait un concours de pré-recrutement (IPES) qui permettait aux étudiants reçus, sous réserve de signer un contrat les engageant à servir l’Etat pendant 10 ans, de devenir fonctionnaires stagiaires. Au bout de 3 ans (voire 4 pour les meilleurs) durant lesquels on avaient été payés pour pouvoir faire nos études sans soucis matériels,on passait le CAPES, voire l’Agrégation, et on était titularisés.
    Cerise sur le gâteau : quand j’ai eu 60 ans, j’ai pu prendre ma retraite sans décote, vu que ces années d’études comptaient dans le calcul de l’ancienneté, alors que mes collègues devaient faire 2 ou 3 ans de plus pour avoir une retraite à taux plein !

  4. Déjà, à l’époque où j’enseignais encore (avant 2004!) on n’avait plus le droit de faire redoubler les élèves, sans fournir une tonne de justificatif, si les parents s’y opposaient. Résultat : les enfants passaient tous dans la classe supérieure, et arrivaient en CM2 avec de grandes lacunes. Et ils allaient en 6ème!
    Il faut commencer par réformer le 1er degré, les générations abandonnées feront comme elles pourront.

    • Dans combien de réunion « parents-professeurs « , les parents entendent que leurs enfants sont nuls ? Mais le niveau de ces enfants est le fruit de l’enseignement des années précédentes ! … Et parfois avec ces mêmes professeurs.

  5. C’est de paradigme qu’il faut changer. En effet, le système actuel ne souhaite pas que les futurs citoyens maîtrisent la langue, réfléchissent, développent un sens critique, sachent calculer, mais ne soient que des consommateurs, des jouisseurs addicts à toutes sortes de jeux. En fait, qu’ils soient manipulables et serviles. Les derniers résultats aux élections prouvent que le système a gagné et qu’il est bien plus ancien qu’on ne le pense.

  6. On pourra faire toute les réformes possibles dans l’enseignement public, si l’enfant dès le début de sa scolarité et encore plus à l’entrée en sixième ne comprend pas que 2 et 2 font quatre et que B + A ça fait BA on ne s’en sortira pas.

  7. On demande aux enseignant d’avoir BAC + 5 alors qu’en fonction du niveau auquel on enseigne ce n’est pas toujours nécessaire, il vaudrait mieux demander un diplôme inférieur et donner une bonne formation aux profs avec la possibilité d’atteindre en formation continue un niveau supérieur, quand on fait 18 heures par semaine et qu’on a 3 mois de vacances minimum on a le temps de le faire comme le font certains employés ou ouvriers qui veulent gravir l’échelle sociale, mais évidemment ça demande un effort et d’avoir un but dans la vie. je peux en parler puisqu’à 55 ans j’ai fait un 3ème cycle en travaillant il me restait encore 10 ans à tirer avant la retraite quand même. A 30 ans j’avais passé de la même manière un diplôme d’ingénieur, par contre il faut mettre au point des modes de formation qui soient compatibles et si on considère que les gens qui viennent étudier et font ces efforts ont au moins retenu la moitié de ce qu’on leur a raconté, il n’y a même plus besoin de décerner des diplômes mais des attestations devraient faire l’affaire. Comme me disait un prof vous êtes moins bon que mes élèves, pour les contrôles sans doute, mais toute la journée je traitais avec succès des dossiers compliqués alors que ses élèves n’en avaient jamais vus et n’avaient même aucune idée de ce qui les attendait dans la vie active.

  8. N’importe quoi! Macron me fait penser à la technique de certains animaux se déplaçant en groupe, lorsqu’ils sont attaqués par un prédateur, s’enfuient dans toutes les directions pour dérouter l’assaillant. C’est la technique pour gouverner de Macron, lancer « en même temps » plusieurs idées dans tous les sens, dont aucune achevée, pout dérouter la population. Je ne suis pas certain qu’à long terme ça marche comme il l’espère.

  9. Voici clairement exposé la voie de la raison et du bon sens, qui malheureusement n’ont plus cours en France, il n’est qu’à voir la résistance des enseignants à la méthode syllabique, la seule qui est en harmonie avec le développement cérébral des enfants, la méthode globale étant une monstruosité physiologique, dont on voit les résultats.

  10. Certains membres du gouvernement semblent réagir ,en particulier les ministres de la justice,de l’intérieur et de l’éducation nationale,mais il ne s’agitent qu’à l’approche des européennes,et des présidentielles de 2027,tout cela n’est que de la poudre aux yeux ,Macron et ses gouvernements n’ont fait qu’accélérer la crise depuis six ans et demi ,je n’y crois absolument pas un seul instant !

  11. Il n’est plus possible de recruter des futurs enseignants (même en les formant) à l’issue du bac parce que le bac ne vaut plus rien. On voit arriver depuis bien 10 ans des professeurs des écoles qui ne maîtrisent par le combo français + maths. Ils ne sont pas responsables de l’enseignement qu’ils ont reçu, de l’absence de sélection. Si l’on veut changer les choses il faut tout réformer, remettre les devoirs, le par coeur, la sélection. Mais qui osera ?

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Revivez le Grand oral des candidats de droite

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois