Les élèves sont nuls en français ? Alors, inutile de l’enseigner !

La chose est entendue : les compétences des petits Français dans l’expression écrite de leur langue sont globalement mauvaises. Le CSEN (Conseil scientifique de l’Education nationale) en convient : « Les performances des élèves français en orthographe sont loin d’être satisfaisantes ».
Avec ou sans classement Pisa, on constate que la chose s’accroît d’année en année. Que faire alors ? Ce qu’on fait pour tout dans ce pays quand la température est trop élevée : on casse le thermomètre.
La fin de l’accord du participe passé avec l'auxiliaire avoir ?
C’est ainsi que ledit CSEN, dressant cet implacable constat – il est « inutile de s’acharner à enseigner des orthographes maîtrisées par une minorité de francophones » – nous délivre ses judicieuses préconisations. Au premier chef, la suppression de l’accord du participe passé avec l’auxiliaire avoir, exercice périlleux s’il en est lorsque le complément d’objet direct est placé avant le verbe.
Eh oui ! Cette règle est une épouvantable torture pour nos cerveaux contemporains. Les chiffres le disent : si les Français sont de plus en plus crasses dans notre belle langue, « les erreurs les plus nombreuses concernent l’orthographe grammaticale, le cas le plus notoire étant celui de l’accord du participe passé avec l’auxiliaire avoir et le complément antéposé » (voir définition ci-dessus). Exemple : « j’ai mangé une pomme », mais « la pomme que j’ai mangée ».
Moins de 20 % des élèves maîtrisent cette règle à l’issue du primaire, assure le CSEN et « elle tombe en désuétude chez les adultes ». D’où cette préconisation : « avec l’auxiliaire avoir, invariabilité du participe passé et avec l’auxiliaire être, accord systématique avec le sujet ». Non seulement ce toilettage libérerait les Français d’un gros souci existentiel, mais « ces deux choix libéreraient énormément de temps en classe, qui pourrait être consacré à des enseignements portant plus généralement sur la production écrite ». En phonétique peut-être ?
Où est passé le féminin ?
A vrai dire, il y a pire que l’accord en question ici, mais c’en est sans doute une conséquence : c’est la quasi disparition de tout accord, participe passé ou simple adjectif, au féminin, cela à l’oral comme à l’écrit. Paradoxe d’un temps où les femmes n’ont jamais autant été à l’honneur, elles ont disparu du français avec l’ignorance de la grammaire.
La chose s’est tellement répandue qu’on en vient même à des aberrations : confusion des pronoms personnels (il pour elle), disparition des pronoms relatifs (laquelle, auxquelles), etc. Exemple parmi des milliers d’autres, ceci, entendu lundi matin à la radio : « L’attaque du Hamas le 7 octobre est-il (sic) aussi un choc français ? ».
C’est dans ce contexte qu’on entend répandre l’écriture inclusive, qu’on l’impose même dans certaines universités. Mais qu’importe, puisque tout cela est noyé dans le « globish », cet « étrange mélange entre le français et une sorte d’anglais mondialisé », comme écrit notre confrère Valeurs actuelles qui consacre un article au sujet.
Trop d'anglicismes
Alors qu’Emmanuel Macron vient de fanfaronner au sommet de la Francophonie, l’Académie française, qui s’alarme de l’inflation galopante des anglicismes dans « la communication institutionnelle », a publié en septembre N'ayons pas peur de parler français (Plon), un livre qui reprend les conclusions de son rapport de 2022 sur le sujet.
L’académie est allée piocher dans les ministères, administrations, SNCF, mairies, universités, écoles, organismes de formation, fondations, sites touristiques… Partout l‘anglais est préféré au français technique. Le ministère de la Transition Ecologique décline ainsi ses « agents intrapreneurs, développeurs, product owner, business developer, coach produits, UX designer ». Chez son voisin de la Santé, on apprend que la politique repose sur un concept essentiel : « One health ». Du côté de la Sécurité sanitaire, on se renseigne auprès du « Helpdesk biocides : Un service national d’assistance » ; une plateforme de documentation devenue « le sharepoint de la communauté ». Mais c’est peut-être le ministère de l’Agriculture qui remporte la palme avec sa start-up Agriloops, qui a « reçu le soutien du Food’Inn Lab d’AgroParisTech ». Quiconque a affaire avec une administration sait qu’il doit en passer par ce charabia. Si l’objectif n’est pas formulé, les conséquences sont évidentes : « une double fracture linguistique, sociale et générationnelle » ce qui est dramatique s’agissant ici des services de l’Etat.
Thématiques :
Langue française
Pour ne rien rater
Les plus lus du jour
LES PLUS LUS DU JOUR

91 commentaires
» Partout l‘anglais est préféré au français ».
Absolument partout!. Allez dans une grande surface faire vos courses (enfin chez nous en plein centre de la france)= la « musique » , programmée à un volume très fort, n’est composée que de chansons anglaises ou américaines.
Une horreur!
La France décline à grandes enjambées . Mais elle a encore quelques sursauts de survie. Ces personnages qui tentent de lui tenir la tête hors de l’eau sont bien souvent vilipendés. Tous les qualificatifs agressifs leurs sont attribués. On tire vers le bas, les raisons majeures en sont, la crainte de l’effort, l’adaptation aux plus faibles. Ainsi, les concours sont supprimés, les matières gênantes sont oubliées, on incorpore sur dossier, tous les passe-droit mis en valeur. Le mérite est honnis, il est ignoré. Et pour se ranger dans la case snobinarde, se révéler bien-pensant et paraître, on anglicise à outrance. Vous évoquez ce participe passé avec avoir, difficilement appréhendé , même par certaines belles têtes. La règle est pourtant élémentaire mais faut-il encore l’avoir apprisE et dans cet élan l’avoir pratiquéE comme on apprend le théorème de Pythagore à s’en torturer les méninges. Une autre règle est également difficilement appréhendée par certains. Ex : j’ai mangé : é accent aigu ou er ? La règle est simple : remplacer le verbe par un verbe du troisième groupe, le plus employé « mordre ». Ce qui fait : « J’ai mordre » (infinitif) ou « j’ai mordu » (participe) ? Simplement à l’oreille…. Donc « j’ai mangé : é » . Elémentaire mon cher Watson. Ce que nous apprenions dans le passé.
bonjour,
A contre-courant ici (merci correcteur!) je prône une énorme simplification de la langue.
D’abord, car j’aime les choses simples -réduire le superflu qui apporte rien la maîtrise signant juste sa classe sociale, ça pourrait éviter l’utilisation du ‘globish’ et la disparition du Français.
eg mettre tous les verbes au premier groupe sans irréguliers, suppression de genre pour objets sans sexe par « lo », doublement des lettres et plein d’autres.
On n’écrira plus « des chevaux » quand il y a plusieurs chevals !
Je vous parle d’un temps que les moins de 50 ans ne peuvent pas connaître.
Quand j’étais à l’école primaire, plus de 5 fautes dans une dictée, et on était à la limite de la délinquance.
Oui , je m’en souviens…
Plus on réforme, plus le niveau baisse , cherchez l’erreur. Et dans la presse pas un article sans un mot anglais !
En effet, avec toutes ces réformes, le niveau a beaucoup baissé donc retour aux fondamentaux qui ont fait leurs preuves .
Quand l’administration vient avec un document présenté en globish, il me semble qu’il peut être refusé.
Ce globish est répandu aussi en Angleterre, je crois…
En effet il est inutile d’enseigner le français ;c’est une langue morte…
Passons tout de suite à l’arabe.
Et la publicité qui contribue à cette mascarade n’est pas en reste.
Il faut savoir que les accords du participe passé apportent du sens à ce qui est écrit. A force de simplifier. Nous ne nous comprendrons plus, et cela peut se reporter sur la langue orale.
La malédiction de la Tour de Babel est tombée sur la France.
Il y a déjà une trentaine d’années qu’un prof de français m’avait dit qu’écrire en phonétique c’était l’avenir et que le français ne servait à rien, que Louis XIV faisait plus de fautes que ses élèves. Evidemment l’anglais est aujourd’hui indispensable parce que c’est la langue universelle, mais le français est beaucoup subtil et toutes les difficultés que présente notre langue aiguise aussi notre intelligence
Pour lire Proust, Flaubert, français exigé.
Le Bon Français disparaît comme le reste ..je résiste avec l’association Défense de la langue Française
Où est passé le temps où le Grec et le Latin étaient de mise ?
Alignez ces chères têtes blondes, mais pas seulement, devant un bâtiment au fronton classique, combien d’entre eux seront capables de lire ce qu’il y est sculpté ?
Et nombre d’adultes et d’enfants auraient plutôt dit : j’ai manger une pomme ou une pomme que j’ai manger , vous seriez surpris du pourcentage
Hélas!…. Mille fois : Hélas!
Au fil des années j’ai constaté, comme mes ami(e)s et ma famille la dégradation inexorable du parler français. Je n’ose pas parler de l’écrit. Des journalistes qui parlent à une vitesse stupéfiante enchainant les infos sans pose ni » ponctuation « . Par exemple : les trains ne peuvent rouler, mais la pluie s’arrêtera, E.M. étant attendu au Liban, si demain les agriculteurs touchent leurs subventions. Ceci est un exemple pas si loin du réel. Autre exemple : l’école m’a appris que l’on lisait de haut en bas et de gauche à droite. C’est ainsi que sur une très célèbre radio la météo est déclinée ainsi : le temps sera pluvieux sur le sud ouest, par contre le Nord bénéficiera d’un temps calme comme sur la côte d’azur. J’arrête là mais comme d’autres commentateurs de cette rubrique, je pense que tout cela c’est dégradé au fil des années par un enseignement de plus en plus dégradé.