8 mai 1945 : la fin d’un monde et la naissance d’un autre

Le 8 mai 1945, dans un bâtiment austère d’un Berlin dévasté, l’Allemagne nazie capitule enfin face aux puissances alliées. Après six années d’un conflit mondial d’une brutalité inédite, cette signature marque l’effondrement total et définitif du IIIe Reich. Plus qu’un acte juridique, cette capitulation scelle la fin d’un monde façonné par la guerre et ouvre une ère nouvelle, celle de la reconstruction, de la justice mais aussi d’un nouvel ordre mondial bipolaire.
Une mise en scène soviétique pour la fin de la guerre
La capitulation allemande avait été initialement signée le 7 mai 1945 à Reims, mais l’Union soviétique, désireuse de mettre en scène sa propre victoire au cœur de la capitale ennemie, exige une seconde signature. Staline considère que seule une reddition formellement entérinée à Berlin, dans la zone d’occupation soviétique, rendra justice aux immenses sacrifices consentis par l’Armée rouge. Le maréchal Gueorgui Joukov, commandant suprême des forces soviétiques, organise donc une cérémonie solennelle dans le quartier berlinois de Karlshorst, au sein d’un ancien mess de la Wehrmacht converti en quartier général soviétique.
Dans la nuit du 8 au 9 mai, à 23h01, les derniers représentants du haut commandement allemand, le feld-maréchal Wilhelm Keitel, l’amiral Hans-Georg von Friedeburg et le général Hans-Jürgen Stumpff apposent leur signature sur l’acte de capitulation. Ce document, rédigé en allemand, russe et anglais, consacre alors l’arrêt immédiat de toutes les opérations militaires. Aux côtés de Joukov, les représentants alliés Tedder pour le Royaume-Uni, Spaatz pour les États-Unis et le Vendéen de Lattre de Tassigny pour la France signent également l’acte, consacrant symboliquement l’unité des Alliés dans la victoire.
La capitulation sans condition
Le document signé à Berlin ne laisse aucune ambiguïté : il s’agit d’une capitulation totale pour ceux qui voulaient une guerre totale. Cette exigence avait été affirmée dès la conférence de Casablanca, en janvier 1943, par Roosevelt, de Gaulle, Staline et Churchill : aucune négociation, aucun compromis et aucun traité ne sera fait avec l’Allemagne qui devra reconnaître sa défaite totale, désarmer sans délai et remettre son destin aux mains des Alliés.
Cette clause sans équivoque visait non seulement à empêcher toute tentative ultérieure de révision ou de négociation, comme en 1918, mais aussi à permettre une prise de contrôle complète du territoire allemand et de ses institutions. Les Alliés entendaient juger les responsables, dénazifier la société, et poser les bases d’une nouvelle société.
À ce sujet — 7 mai 1945 : Reims, la capitulation oubliée
Les effets immédiats de la capitulation
À peine deux semaines après la signature de Berlin, les Alliés dissoudront, le 23 mai 1945, le gouvernement de Flensbourg formé autour du grand-amiral Karl Dönitz après la mort de Hitler. L’Allemagne cesse alors d’exister comme État souverain. Divisée en quatre zones d’occupation (américaine, britannique, soviétique, française), elle se retrouve administrée directement par les forces alliées.
Sur le terrain, des millions de soldats allemands encore actifs sont désarmés, internés ou livrés aux autorités. La Justice commence également à se préparer : dès l’été, les grandes puissances planifient les procès de Nuremberg, qui s’ouvriront en novembre 1945. Pour les civils allemands, c’est l’abîme : famines, déplacements de population, destruction des infrastructures et chaos social deviennent le lot quotidien des Allemands. L’ordre nazi, omniprésent depuis 1933, s’est évaporé et avait même préparé ce néant, Hitler ayant lui-même jugé que le peuple allemand était indigne de survivre s’il n’arrivait pas à vaincre.
La dénazification s’impose aussi, rapidement, comme une urgence. En effet, il faut extirper l’idéologie hitlérienne de l’enseignement, des médias, de l’administration, de la magistrature mais aussi, et surtout, des esprits afin de rebâtir une nouvelle société allemande.
L’héritage du 8 mai
En Allemagne, le 8 mai fut longtemps une date empreinte d’un profond malaise : symbole d’une défaite, d’une occupation et d’une honte nationale. Il fallut attendre le discours historique de Richard von Weizsäcker, en 1985, pour qu’un président allemand qualifie clairement le 8 mai de « jour de libération », une reconnaissance tardive mais essentielle.
À l’échelle internationale, le 8 mai marque l’amorce d’un monde nouveau. L’Europe est partagée en deux et l’Allemagne elle-même est bientôt divisée entre la RFA et la RDA. L’URSS et les États-Unis, unis contre Hitler, deviennent également adversaires dans une guerre froide qui durera près d’un demi-siècle.
Aujourd’hui encore, la commémoration du 8 mai révèle le deuil et les fractures de la mémoire européenne. Si elle célèbre la fin d’un régime criminel, elle rappelle aussi l’ampleur du traumatisme allemand et le caractère funeste d'une paix imposée. L’acte de capitulation de Berlin, dans sa rigueur formelle, fut autant une fin qu’un point de départ : celui d’un nouvel ordre géopolitique ainsi que d’un long travail de justice, de mémoire et de réconciliation.

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6 commentaires
Comparativement, Sortir l idéologie woke, l’islamisme de l enseignement ; des médiats, de la magistrature et surtout des esprits ; c est donc possible
Heu…c’est bien les allemands qui on gagné la guerre non ? Parce que si c’est nous ça ne se voit pas beaucoup.
8 mai , merci Papa de t’être engagé et battu pour que je puisse naitre et vivre Français .
Intéressant
Et la capitulation du 9 mai 1945 , les 17 millions de morts russes , on les passe sous silence ? Le plus explosif , dans tous les sens du terme : quand , le 12 avril 1945 , le seul survivant des 6.000 enfants juifs exterminés à Auschwitz a livré à Eisenhower , Bradley et Patton la pièce manquante du Projet Manhattan : le détonateur atomique .
bien vu. Ceci dit les russes leur ont bien rendu la monnaie de leur pièce en avançant jusqu’à Berlin. Pillages, destructions, massacres, viols ( obligatoire pour les soldats russes!), ils ont tout rasé sur leur passage.