Le petit Molière et le grand Py
Olivier Py, le créateur et directeur du Festival Py d’Avignon, quintessence de l’art officiel et du conformisme bien-pensant, est un Turlupin culturel, toujours prêt à lancer un nouveau tour ou une affirmation fantaisiste, et l’on se souvient comment, il y a quelques année, alors que le Front national pouvait l’emporter aux municipales dans la cité des papes, face au danger que représentait l’arrivée du fascisme, il avait voulu déplacer le festival dans une autre ville, mais l’on n’a jamais su comment il l’aurait appelé : Festival d’Avignon hors les murs ou Festival résistant ou Avignon libre ou Festival d’Avignon à Tarasconcon ou à Beaucaire…
Plus récemment, un entretien de ce directeur avec la presse nous apprend qu’il a un amour de plus que Joséphine Baker - qui, elle, en avait deux seulement, son pays et Paris -, à savoir Homère, Shakespeare et Proust. Il aurait pu citer Hésiode, Cervantès et Céline, ou Maurice Chevalier, la marquise de Ray Ventura et Johnny Hallyday, nous n’aurions été ni plus ni moins avancés, mais s’agissant d’un Turlupin, il ne sert à rien d’essayer de comprendre quelque chose et il vaut mieux rire sans savoir pourquoi que savoir et ne plus pouvoir rire ensuite.
Donc Homère, Shakespeare et Proust, et surtout pas Molière. Car voilà que poussant plus avant la turlupinade, le bel Olivier s’en prend à l'auteur de référence du théâtre classique, connu et célébré dans le monde entier et symbole de l’esprit français, le grand Molière qui, selon lui, est un « petit auteur du XVIIe siècle ».
Et l’on se demande ce que notre Jean-Baptiste national lui a fait. Peut-être ne lui pardonne-t-il pas d’avoir si bien moqué les Trissotin et les pédants de son temps, ces ridicules dont Olivier est aujourd’hui la réincarnation ? Ses interminables logorrhées théâtrales ou romanesques, aussi illisibles qu’injouables, et dont il remplit presque tous les ans une ou deux salles d’Avignon, à l’intention d’un public de spectateurs maso-culturels, n’ont certes pas la simplicité d’une pièce de Molière, mais ce petit auteur a conquis tous les publics, et même les plus populaires et populistes, et elles sont jouées depuis quatre siècles, alors qu’Olivier n’a guère subjugué que les critiques de Télérama et les chercheurs de la Sécurité sociale en quête de somnifères culturels subventionnés et remboursés. Petit auteur, mais de pièces qui sont des monuments de notre théâtre.
Le contraire des programmations du Festival Py d’Avignon où, cette année encore, dans l’accablante chaleur des rues et des places, le festivalier avide de souffrance pédagogique retrouvera les sempiternelles adaptations, les mises en scène, les mises en commentaires, en pièces ou en charpie, les monologues sur la féminitude, les engagés de la scène contre la résurgence du fascisme, le rabâchage d’un répertoire à revisiter et, barbotant sur cette mare aux canards sans plumes, quelques grands auteurs ministériels et intempestifs sortis de la collection Petits Papiers et créateurs de cet improbable qui conclut toujours les annonces des plaquettes de programmation.
Ah ! si le petit auteur Molière voyait ça, quelle grande pièce il écrirait sur la bêtise humaine, lui qui faisait dire à l’un de ses personnages :
« Les hommes la plupart sont étrangement faits !/Dans la juste nature on ne les voit jamais […]/Et la plus noble chose, ils la gâtent souvent/Pour la vouloir outrer et pousser trop avant. »
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