La dissolution : Macron à bout de souffle ?

assemblée nationale

C’est l’histoire d’un berger qui, pour faire une blague, criait au loup… Au risque de rabaisser le niveau du débat, cette fable que chaque enfant connaît a le mérite de résumer l’ambiance qui règne au sein du palais Bourbon, tandis que vient de l’Élysée une nouvelle menace de dissolution de l’Assemblée nationale « avant 2027 ».

Déjà, en septembre dernier, la menace avait été brandie dans une ambiance de 49.3 à répétition, pour faire passer le budget de l’État. Une manière comme une autre de faire rentrer dans le rang les députés récalcitrants. Mais la menace peut-elle fonctionner sur le long terme ? Le député Renaissance de l'Hérault Patrick Vignal hésite : « L’intérêt d’une dissolution pour la majorité serait de passer de relative à absolue, mais si elle a lieu demain… je ne suis pas certain que ce soit le moment », réagit-il par téléphone. Dans tous les cas, le calcul est vite fait pour la majorité. À l’heure actuelle, celle-ci ne bénéficierait pas d’une majorité à l’Assemblée pour voter la réforme des retraites. La faute à un groupe LR de plus en plus récalcitrant, et surtout à des députés de la majorité qui renâclent. « Avec l’accord passé entre Ciotti et Borne, il y a eu un retour en circonscription », glisse, amusé, un ténor du palais Bourbon. Patrick Vignal, lui, s’il ne se définit pas comme frondeur, note que « l’immense majorité de [ses] collègues Renaissance ont été élus grâce à Emmanuel Macron… mais que « si on a perdu 100 parlementaires [par rapport à la législature de 2017, NDLR], c’est bien à cause de cette réforme ».

Alors la menace de dissolution, signe d’une majorité aux abois ? « La menace ne sort pas de nulle part. Ils craignent un capotage général de la réforme », juge le député RN de Vaucluse Hervé de Lépinau. Pour l’élu provençal, en cas de dissolution prochaine, le premier perdant sera « la majorité relative et ses alliés ».

Le spectre de la cohabitation

L’hypothèse est sérieusement envisagée. « LFI donne l’impression d’avoir la main en permanence sur le bouton nucléaire, ils n’ont pas abandonné l’espoir de mettre Mélenchon à Matignon », affirme Patrick Vignal. Clin d’œil volontaire, le président du RN Jordan Bardella avait, lors de sa conférence de presse de rentrée, affirmé que le Rassemblement national était prêt à toute éventualité de dissolution : « On a mis au point un plan Matignon visant à nous assurer une majorité à l’Assemblée nationale », avait prophétisé le jeune président du parti. « Une dissolution ? Chiche ! », riaient les députés du groupe RN sondés à l’époque. Mais maintenant ?

« Une cohabitation ? Si c’est Mélenchon, il mettra le pays à feu et à sang. Si c’est Marine, elle en sortira affaiblie pour 2027 », s’alarme un député du groupe qui craint une victoire à court terme, pour une défaite à l’horizon.

LFI a la main lourde !

S’ils ont mis un point d’honneur à snober leurs collègues du Rassemblement national, à l’image de Louis Boyard refusant de serrer la main de ses collègues à la tribune, les députés de La France insoumise ne se privent pas de faire subir le même sort à leurs collègues de la majorité. « LFI a sorti le casque à boulon et ne l’enlève pas », grince le député Vignal, qui se dit lassé de cette « guerre permanente dans et hors de l’Hémicycle ». Si la secrétaire nationale des écologistes avait juré de faire de l’Assemblée une ZAD, le pari semble réussi, mais davantage du fait de La France insoumise. « On pourrait se réjouir d’avoir un Hémicycle représentant presque proportionnellement toutes les sensibilités, mais quand vous avez un groupe qui se met hors de l’institution, c’est franchement intenable », regrette un député de la majorité.

Pour LFI, néanmoins, le risque se situe ailleurs. Alors que le RN et la gauche ont chacun déposé une motion référendaire, le tirage au sort a désigné celle du groupe de Marine Le Pen, obligeant la NUPES à retirer la sienne. Une situation qui provoque la colère de la cheffe de file insoumise Mathilde Panot : « Choisir son opposition de confort qui ne combat ni dans l’Assemblée ni dans la rue le jour d’une énorme mobilisation populaire : LA HONTE ! », a-t-elle tweeté. Dans les faits, la NUPES est face à ses contradictions : rester fidèle à sa position dogmatique de ne rien voter qui provienne du RN ou s’associer avec l’ennemi juré pour se donner une chance de faire passer cette motion. Ainsi, si cette motion référendaire passe (ce qui paraît peu probable), le Sénat aura trente jours pour se prononcer. Et en définitive, la décision reviendra à Emmanuel Macron d’y donner suite (ou pas).

Alors, la dissolution, ultime levier pour Emmanuel Macron ? « Il pourrait y avoir un remaniement massif avant d’en venir à cette solution », croit savoir un membre influent de la Macronie. Dans les faits, le gouvernement d’Élisabeth Borne a la réforme la plus impopulaire de ces dernières décennies à faire passer. Et on peut raisonnablement penser que quel que soit le résultat, il n’y survivra pas.

Marc Eynaud
Marc Eynaud
Journaliste à BV

Vos commentaires

49 commentaires

  1. Si Mélenchon devenait 1er ministre, il est probable qu’il serait beaucoup moins turbulent.
    Il est vraisemblable qu’il consacrerait toute son énergie à combattre la « peste brune » et deviendrait ainsi officiellement l’allié objectif de Macron, ce qu’il est déjà en refusant de voter quoi que ce soit avec le RN.
    En fait, il redeviendrait ce qu’il a toujours été : un bon gros bourgeois de gauche.

    • Macron-Mélenchon, même combat ! c’est de plus en plus évident. Leur programme est : Europe mondialiste, immigration plein pot, haine du blanc et du Gaulois, de la culture française, soumission , soutien au wokisme. Tout cela fait un beau mélange, une soupe indigeste.

  2. La dissolution devait être le plaisir ultime de Macron plus tard juste avant la fin de son mandat; une dissolution maintenant sera hasardeuse et produira un prolongement du désordre permanent depuis le début de la présidence de Macron. Qui a envie de voter pour les macronnistes, les LR, le RN, les écolos? Une minorité de militants . les LFI garderont leurs fiefs des banlieues islamisées. Le poids des retraités aisés votant pour Renaissance risque de diminuer si abstention minime. C’est à espérer une percée de Reconquête au détriment du RN si les électeurs finissent par comprendre que le RN et Marine ont favorisé la réélection de Macron.

  3. La dissolution devait être le plaisir ultime de Macron plus tard juste avant la fin de son mandat; une dissolution maintenant sera hasardeuse et produira un prolongement du désordre permanent depuis le début de la présidence de Macron. Qui a envie de voter pour les macronnistes, les LR, le RN, les écolos? Une minorité de militants . les LFI garderont leurs fiefs des banlieues islamisées. Le poids des retraités aisés votant pour Renaissance risque de diminuer si abstention minime. C’est à espérer une percée de Reconquête au détriment du RN si les électeurs finissent par comprendre que le RN et Marine ont favorisé la réélection de Marine.

  4. Il était clair, et depuis plusieurs années déjà, que L. F. I. et le R. N. étaient désormais devenus les seules instances représentant à la fois un poids électoral suffisant et une cohérence suffisante sur le fond pour prétendre au pouvoir.
    Or, nous constatons à l’usage que L.F.I. présente une conception par trop outrancière, brutale et désordonnée du pouvoir pour y être admise.
    Nous constatons d’autre part que l’évolution du R.N. vers une modération plus acceptable du propos et vers la technicité indispensable au pouvoir a été accomplie au détriment de la crédibilité de son opposition à l’hégémonie mondialiste.
    Nous constatons enfin que les autres micro-partis d’opposition de gauche sont bons à rien (Cf. « parti socialiste » ) et que les autres partis d’opposition à droite seraient peut-être plus crédibles mais s’obstinent dans des comportements de gamins égocentriques boudant dans leur coin.
    Trois conclusions :
    a) L’hégémonie mondialiste servie par Sarkozy/Macron a encore de beaux jours devant elle.
    b) Les neuneus militants de tendances de Hollande/M. Aubry/Bayrou/Ciotti et consorts, Etc., qui n’ont toujours rien compris au film, sont probablement irrécupérables.
    c) La France va se réveiller à court terme dans la situation de serve de l’Europe et par consequent, du monde occidental, avec les inconvénients que cela représente (Cf. Emploi/Retraites/ Santé publique/Justice/Défense Nationale, Enseignement… Etc. ETC.)

  5. Si dissolution, si cohabitation, si Melenchon, résultat destruction. On ne peut pas tomber plus bas et le président antifrancais nommera Melenchon rien que pour avoir le plaisir du chaos final. Mais attention à une révolution qui pourrait entraîner une vraie guerre civile. Pauvre France.

  6. La crainte d’une cohabitation avec Mélanchon ne plaide pas en faveur d’une dissolution., mais actuellement on a le sentiment que quoi qu’il soit décidé le peuple ne sera pas satisfait et tout peut arriver. C’est L’impression pour le citoyen lambda d’être un pion manié sans précautions et qui sera de toutes façons perdant. Ce monde se délite sans nous et cette sensation d’impuissance peut conduire à des extrémités dangereuses.

    • Il est effectivement « grand temps » que les français réagissent ! … La gestion de cette « pandémie », la gestion des fonctionnements de tous les pans régaliens ET surtout ce qui se passe au sujet de la souveraineté énergétique de l’électricité nucléaire française prouve qu’il faut faire sauter ce « premier de cordée » et son ‘gouverne-et-ment » de façon démocratique au plus vite ! …
      Tel un bulot, ce coucou politicard s’est incrusté dans les ors de la république depuis trop longtemps et surtout il a un passif plus désastreux que tous ses prédécesseurs réunis depuis Pompidou ! …
      Avec vonderlayen, il est à genou devant les mondialistes, l’OTAN et biden … Il se prépare à achever sa sale besogne d’atomisation de la nation FRANCE en intensifiant son idéologie « vas-en-guerre » en soutenant zelensky tout en fracassant l’Armée française
      Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines?
      Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu’on enchaîne?
      Ohé, partisans, ouvriers et paysans, c’est l’alarme
      Ce soir l’ennemi connaîtra le prix du sang et les larmes

      • « Ce soir l’ennemi connaîtra le prix du sang et les larmes »
        C’est ce que j’espère.
        Ce n’est pas très chrétien, mais tant pis.
        Encore que : “Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive.” Matthieu 10, 34

  7. La motion référendaire ne passera pas , les LFI par pur dogmatisme ne la voteront pas , les LR en ordre dispersé . Pourtant les Français n’en veulent pas de cette réforme, mais comme des moutons ils continuent de voter pour Macron .
    L’exemple de Meloni , devrait pourtant les inspirer, l’Italie a t elle sombrée dans le chaos ? Non, alors ?

  8. Voilà le nouveau joujou de cette assemblée pour amuser le petit peuple une dissolution!!!! diantre et au petit peuple à nouveau d espérer comme il avait espéré lors de la mise en place de cette assemblée cela devait etre mieux puisque le pouvoir n était plus aux mains d un seul parti mais que nenni chaque jour on peut mesurer le niveau pitoyable des débats les groupes parlementaires faisant croire au petit peuple qu ils oeuvrent pour lui … Tout cela n est que faux semblant et marché de dupes tous ces politiques nous enfument de gauche de droite d extrême ou pas ils nous enfument car au fond ils ne sont que les marionnettes d un système de privilèges qui les unit tous…. Alors une dissolution !!!! laissez moi rire
    je prend le pari il n y en aura pas

  9. Je pense en ce qui me concerne que Macron tire la leçon du deuxième tour de dimanche dernier qui a vu perdre la candidate RN dans une circonscription où elle avait été élue par hasard, pour Macron il est évident qu’il pense que le RN a profité d’une occasion UNIQUE pour avoir ses 88 députés, occasion qui ne se reproduira pas, en cas de dissolution dans le climat actuel, seule la Nupes sortirait renforcée, mais je peux me tromper.

  10. Chateaubriand : »Levez-vous orages désirés, qui devez emporter (???) dans les espaces d’une autre vie ! » Si EM échoue sur les retraites il pourrait dissoudre. Quel député voudrait revenir devant ses électeurs après avoir voté la réforme de la durée de vie au travail ? Il fera un nombre de députés inférieur encore et le RN supérieur : il ne lui restera qu’à démissionner et attendre les juges. Alors, à la présidentielle, de 2024, un second tour Wauquiez /Bardella ?

  11. Le déficit du régime des retraites est insignifiant au regard des Mds d’euros engagés dans le « quoi qu’il en coûte » et des chèques en blanc (élections obligent) qu’a distribué depuis deux ans le gouvernement Macron … Ce léger déséquilibre est généré par les régimes spéciaux et par la fonction publique,… mais silence radio, tabou dogmatique et clientélisme, n’en dîtes rien …, Bruno Lemaire s’autorise bien à chaque nouvelle loi de finance un déficit budgétaire de 150 Mds d’euros rapprochant la France du grand précipice … chronique d’une faillite annoncée … La marge de manoeuvre dont disposaient Mitterand , Chirac ou Sarkozy est anéantie … La priorité actuelle en matière de réformes se situe ailleurs que dans une pseudo réformette des retraites, la priorité c’est la réforme de l’Etat .

  12. Pays au bord du gouffre. Merci macron. Et toujours dans le sens du chaos. Tout se tient et cela avec une fulgurante accélération depuis la fameuse intervention avant covid :  » nous sommes en guerre ». Le chaos indistinctif pour tout détruire et reconstruire un système hyper libéral marié à une dictature de surveillance avancée sur le peuple.

  13. Démissionner et quitter ce pays pour notre bien à tous .Qu’ils se rassurent l’histoire ne les oubliera pas , les pires que ce pays ait eu .

    • Oui, vous avez raison, et l’Histoire ne les oubliera pas, mais ce ne sera pas en leur faveur.
      Destitution du premier puis fuite de notre pays vers un autre (peu importe lequel, le plus loin possible serait l’idéal) de tous ces pitres de l’A.N. (hormis quelques uns, et encore!)

    • Qui auront nous à sa place? La gravité du problème est là, la classe politique est minable (à part quelques uns) les partis inexistants,impuissants.

      • c’est exact , absence d’une offre politique crédible, avec l’espoir d’un virage à 180 ° et de la remise du pays sur les rails …. mais ce constat doit être dépassé , la politique du pire pour un changement futur .

    • Oui je pense que cette fois il faut prendre le taureau par les cornes . Quitter l’Europe n’est pas chose simple . A minima et à mon âge je pense partir habiter sous peu dans un département français très marqué par le nationalisme.

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