« Ça souffle à feu doux dans la Cocotte-Minute™… Il y a un non-dit formidable qui, le jour venu, au moment de la décongélation, va craqueler la croûte glaciaire et tonitruer. Car la décongélation va libérer des forces insoupçonnables, de colère contenues, d’indignations rentrées, de ressentiments accumulés », prévenait Philippe de Villiers, il y a quelques semaines.

Les Français muselés derrière leur masque et contraints de supporter les gestes barrières depuis plus d’un an, voyant Emmanuel Macron en campagne serrer des mains à tout bout de champ, ne sont plus dupes de cette mascarade. La gifle donnée à la fonction présidentielle déjà abaissée témoigne de cette violence qui gronde. Alors Thomas et Damien - dont les prénoms ont été immédiatement révélés par la presse ne prenant aucune pudeur quand les deux suspects interpellés sont proches des gilets jaunes et de l’extrême droite - ne sont que la partie immergée de cet iceberg dont les commentateurs s’accordent à reconnaître que cette campagne ne ressemblera à aucune autre.

Sans le minimiser, l’Élysée cherche à dédramatiser ce geste symbolique, préférant miser sur « l’optimisme » et « l’ambiance de reprise ». Emmanuel Macron a appelé, en Conseil des ministres, à « relativiser, car cela ne participe pas d’un climat social particulièrement délétère ». Dans Le Parisien du 10 juin, un proche de Macron nuance : « La France, ce n’est pas que ça. »

En effet, la France, c’est aussi, comme le rappelait Christian Vanneste hier, « 187 nuits d’émeutes (plus d’un jour sur deux) qui ont émaillé la vie d’un pays », ce sont les forces de l’ordre prises pour cible, ce sont ces églises profanées ou incendiées, ce sont ces zones hypocritement rebaptisées « de reconquête républicaine », où l’insécurité ne s’arrête plus à la porte des villes mais a bien gagné les campagnes, et où la nature de la criminalité a évolué. Ainsi, le délégué général de l’Institut pour la justice Pierre-Marie Sève dénonçait, dans Le Figaro, « la relative baisse des vols et autres violences crapuleuses, et l’augmentation parallèle des violences dites gratuites. Ainsi, pour exemple, sur la longue période 1984 à 2000, les condamnations pour vols et recels ont baissé de 33 % tandis que les condamnations pour coups et blessures augmentent de 37 % et celles pour agressions sexuelles de 84 %. En clair, parmi les délinquants d’aujourd’hui, moins de voleurs de pommes, plus de personnalités ultra-violentes. »

Complaisante ou aveugle ? Une partie de la classe politique ne cible que les violences d’extrême droite sans mesurer le ras-le-bol des Français d'être méprisés sur leur « sentiment d’insécurité ». Et ce n’est pas en rouvrant les lieux de culture, les terrasses ou annonçant la fin du port du masque en extérieur cet été que la paix sociale reviendra. Emmanuel Macron voulait prendre le pouls des Français, il a eu sa réponse.

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10 juin 2021 à 15:41

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