Jean-Baptiste Djebbari quitte le gouvernement pour aller dans le privé : pantouflage ?

C’est la polémique qui a agité le monde politico-journalistique, ce lundi 16 mai. Alors que le Premier ministre, Jean Castex, n’avait pas encore remis officiellement sa démission au Président, Jean-Baptiste Djebbari lui avait déjà annoncé son départ pour le secteur privé. Enfin, c’est l’entreprise qui l’a annoncé, dès 8 h 00 du matin. Le ministre des Transports va donc devenir administrateur de l’entreprise Hopium, une start-up qui a pour ambition de fabriquer des voitures haut de gamme à hydrogène.
Une annonce qui n’a pas manqué de faire réagir l’opposition. « Ça ne choque personne ? Même plus la décence d’attendre la fin de ses fonctions de ministre… Ces pratiques jettent un discrédit sur la République. Elles doivent cesser ; la loi doit les interdire », a vivement réagi, sur Twitter, le maire LR de Chalon-sur-Saône. L’incrimination de pantouflage - faire des allers-retours entre le secteur public et privé, pouvant occasionner des conflits d’intérêts - s’est fait entendre par les détracteurs du ministre.
Ça ne choque personne ? Même plus la décence d’attendre la fin de ses fonctions de ministre… Ces pratiques jettent un discrédit sur la République. Elles doivent cesser ; la loi doit les interdire. #djebbari https://t.co/TjxIsrYXzU
— Gilles PLATRET (@gillesplatret) May 16, 2022
Pourtant, Jean-Baptiste Djebbari a reçu l’autorisation de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). « En l’état des informations dont [la HATVP] dispose, le risque de prise illégale d’intérêts peut être écarté », détaille le communiqué.
« Comment peut-on parler de pantouflage », c’est sidérant, s’agace Jean-Baptiste Djebbari auprès du journal Le Monde. « Je suis arrivé du privé en politique en 2017. Je repars dans le privé cinq ans après. Et pas dans une grande entreprise qui fait des milliards d’euros de bénéfices ! Dans une start-up qui n’a jamais reçu de subvention publique ! Où est le problème ? » La défense du ministre peut s’entendre, à moins d'admettre que lorsqu'on entre en politique, on ne puisse en sortir que les pieds devant !
Il n’en reste pas moins que, plus largement, le pantouflage est une réalité, surtout en Macronie. Le journaliste Vincent Jauvert a écrit un livre sur les dirigeants politiques et hauts fonctionnaires qui alternent responsabilités publiques et intérêts privés (Les Voraces. Les élites et l'argent sous Macron, Robert Laffont). « Le phénomène a pris une ampleur inédite depuis la dernière présidentielle », affirme le journaliste auprès de Marianne […] « Emmanuel Macron, inspecteur des finances, a travaillé chez Rothschild, et Édouard Philippe, membre du Conseil d’État, a fait du lobbying pour Areva et a été avocat dans un cabinet anglo-saxon. Le secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kohler, et le directeur de cabinet du Premier ministre, Benoît Ribadeau-Dumas, sont eux aussi des énarques qui ont pantouflé dans le privé. »
On pourrait encore citer la mythique Sibeth Ndiaye, ancienne porte-parole du gouvernement, qui est devenue secrétaire générale de Adecco France chargée « des affaires publiques, du juridique, de la communication et des solutions emploi » et membre du comité exécutif. Par ailleurs, elle est restée impliquée auprès de La République en marche. La Haute autorité pour la transparence de la vie publique s’est d’ailleurs penchée sur son cas. L’instance a demandé à l’ancien membre du gouvernement de ne pas traiter les dossiers pouvant avoir des liens avec ses précédentes fonctions politiques. Sibeth Ndiaye doit éviter « toute démarche, y compris de représentation d’intérêts (lobbying) auprès du cabinet du président de la République ainsi qu’auprès de tout membre du gouvernement qui était en fonction en même temps qu’elle », indique la HATVP.
Citons encore Brune Poirson, ancienne secrétaire d’État auprès du ministère de la Transition écologique. Elle aussi a fait son retour dans le privé. Après avoir quitté son siège de députée de Vaucluse, la jeune femme est devenue, il y a bientôt un an, directrice du développement durable du groupe Accor. Pantouflage ?
Si le passage du secteur public au secteur privé est monnaie courante depuis de nombreuses années, une nuance doit être gardée à l’esprit. « Entendons-nous bien, cumuler un mandat avec un emploi privé ordinaire ne pose aucun problème : on peut être élu tout en étant ingénieur, dentiste ou avocat », explique le journaliste Vincent Jauvert. « Le problème se présente quand ces élus sont nommés à des postes où ils peuvent monnayer leur carnet d’adresses. »
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31 commentaires
il vient du privé et il y retourne c’est normal, sinon il faudra accepter des politiciens a vie qui cultivent leur rente ou des élus majoritairement issus de la fonction publique ce qui est le cas à l’assemblé nationale. On se plein du caractère hors sol de nos politiciens alors il faut permettre l’accès au personnes au secteur privé et les laisser y retourner, ou leur trouver une place dans la fonction publique une fois leur mandat terminé.
Quelles comptences hormis son nom vont valoriser l’entreprise?
C’est la marque de fabrique du macronisme ! L’arrogance, la prétention, le mépris, …. Et certains s’y laissent encore prendre ! C’est desespérant …. Vous avez dit conflit d’intérêt ? Comme Van der Lyen et Pfizer ?
Donc il quitte la startup nation pour rejoindre la startup , à une époque il était bien vu dans certains métiers d’avoir une ligne startup dans son CV , c’était signe d’esprit d’entreprise.
Oui, mais « Hopium » bizarre ce nom ?
du peuple ?
bon c’est aussi un parfum alors irons nous jusqu’à dire qu’il est au parfum
Ces allers-retours sont, au contraire, un gage de santé démocratique où le « pantouflage » est la recherche de l’arrosage par les impôts d’une carrière, non pas de « pantoufles », mais de savates!
Derrière le pantouflage, le capitalisme de connivence qui transforme notre pays en république bananière. Le pouvoir économique, qui est largement apatride, corrompt le pouvoir politique et s’impose dans la prise de décision
Que ce petit marquis fasse ce qu’il veut ,on s’en bat l’oeil et bon vent …
D’accord avec Pounet : la loi délimite les choses permises et défendues. De plus, si vont être malhonnête, c’est possible aussi bien dans le public que dans le privé.
Sauf à considérer que l’on ne peut plus faire que de la politique une fois qu’on y a mis un ongle, il est normal, et même sain, de (re-)passer par la case « entreprise », là où se trouvent un monde du travail dont il est judicieux de partager les aléas.
Le problème n’est pas nouveau mais on en parlait peut-être moins faute d’information et la fausse pudeur faisait taire les intéressés.
Vous avez sans doute raison, mais force est de constater que la corruption était moins généralisée. Il existait encore une morale.
Maintenant, on ne croit plus ni en Dieu ni au Diable. Quoique… c’est la ruse du Diable, faire croire qu’il n’existe pas.
le fin connaisseur du coronavirus djebbari qui nous assurait que les chances de contracter le virus dans les transports en commun étaient minimes…..
Personnellement je considère que travailler dans le privé n’est pas une tare.
Bien sûr ! et même ,au contraire ! Par contre, il vaut mieux travailler dans le privé AVANT le public (sauf pour éclairer l’entrepreneur sur le maquis des normes), pour savoir ce que signifient les valeurs travail ( labeur avec enjeux ) et initiatives …
Bien sûr que non.
Mais il faut un minimum d’éthique, non ?
La vraie tare, pour moi, c’est la Macronie et quelques-uns de ses prédécesseurs.
À condition d’avoir les compétences.
Bravos pour votre commentaire, c’est bien que nos élites démontre que servir la France c’est une valeur sure pour se refaire une nouvelle virginité et s’assurer des jours tranquille avec l’assurance de ne pas avoir de soucis de fin de mois.
Il suit le modèle américain de va et vient. Il utilisera ses contacts pour obtenir des subventions et passe-droits pour son employeur. Faut pas s’étonner car nous vivons dans une démocratie capitaliste et je soupçonne que la majorité de mes concitoyens sont ailleurs sur ce sujet.
Ils osent tout, se permettent tout avec notre fric.
« Canailles, filles et hommes sans scrupules ; entrepreneurs, exploiteurs, pillards, trafiquant sans honte. Ta Mademoiselle Pinson est un monstre, avec ses amitiés sans âme, je ne sais rien de si méprisable ! » (Musset, Mimi Pinson, 1845).
Ps : on peut remplacer « mademoiselle » par « monsieur », la crapulerie est sans sexe.
Ministre des transports, pilote de ligne, et dans un start-up avec moteur à hydrogène (avions du futur) ! Cherchez l’erreur ?