Il est facile de comprendre pourquoi la lutte contre la PMA pour toutes, partant de prémisses mauvaises, était perdue d’avance. Il s’agissait de « l’extension » d’une loi existante de 1994 permettant un tiers donneur au sein d’un couple hétérosexuel. Or, la Manif pour tous n’a jamais distingué, dans son combat, l’AMP (assistance médicale à la procréation avec les gamètes du mari) de la PMA avec tiers donneur, remboursé par la Sécurité sociale, au sein d’un couple hétérosexuel. L’enfant jouissait donc, avec la présomption de paternité, de la filiation d’un « père social » auquel il était « apparié ». Sauf qu'en supprimant une filiation - fût-elle fictive -, cette loi, étendue à toutes les femmes, va s’avérer néfaste. Il aurait mieux valu mettre cartes sur table en s’en référant à l’association « PMAnonyme ».

Cette association mettait en ligne des témoignages nombreux d’adultes, nés de tiers donneurs avec parents hétérosexuels, recherchant leur donneur. Audrey Kermalvezen elle-même, dont la recherche de son père l’avait conduite au Conseil d’État puis à la Cour européenne, avait fait une vidéo où elle racontait la quête de son père, trouvant « insensée » l’extension de la PMA à toutes les femmes sans la levée de l’anonymat. En militant pour la PMA avec la levée de l’anonymat du donneur, l’association PMAnonyme avait le mérite de mettre en lumière les difficultés d’une pratique procréative qui conduira, inévitablement, vers la reconnaissance du « trouple » : les deux conjoints et le donneur.

Comme on manque déjà de sperme, comme l’a dit récemment Le Figaro, l'État va être obligé de payer les donneurs. Quant à la levée de l’anonymat, elle signe également la fin de « la paix des familles » pour les enfants nés d’une PMA au sein d’un couple hétérosexuel. On dira que ce principe, compromis déjà par les tests génétiques sur Internet, est, au même titre que l’adage semper mater certa est, un principe juridique démodé. Sauf qu’à ce train-là, la monogamie est démodée. Et la GPA, dans deux ans, inévitable. Une décision s’imposait, en tout cas : le déremboursement de toute PMA - hétérosexuelle et homosexuelle.

L’auteur de cet article a écrit tout cela, en 2018, dans son livre La Fabrique d’orphelins, dans le chapitre 2 : AMP et PMA, la pierre d’achoppement législative. Pendant des mois, les tenants de la loi, avec habileté, se sont gardés de parler explicitement de cette pierre d’achoppement. La Manif pour tous n’en parlait jamais, croyant qu’elle réussirait à obtenir gain de cause sans dire cette vérité-là. Ce n’est que depuis peu que les partisans de la PMA parlent ouvertement du tiers donneur. Au nom de « l’égalité des couples », le peuple a été désinformé.

Que reste-t-il à faire ? Accepter le privilège (loi privée) de la naissance et de la filiation pour certains, en lésant le principe d’égalité pour les autres ? Il faudrait ne pas promulguer cette loi et s’en tenir à un statu quo qui garantit, à l’enfant, une filiation - fût-elle fictive. Au Président de prendre sa responsabilité. Comme l’écrit, en effet, Rémy Mahoudeaux, cette loi ne concerne pas le Conseil constitutionnel.

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08 juillet 2021 à 21:07

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