GPA : la nuit où fut désaboli l’esclavage

Assemblée nationale

Le 3 octobre 2019, vers 23 h 00, une poignée de députés, principalement de La République en marche, ont voté l’amendement 1591 présenté par le Dr Jean-Louis Touraine, contre l’avis du gouvernement. Cet amendement prévoit la retranscription automatique, dans l’état civil français, de tout enfant né d’une convention de gestation pour autrui à l’étranger. Le pied est mis dans la porte pour légaliser la GPA en France, d’abord en la reconnaissant à l’étranger comme une pratique normale, avant de l’autoriser à condition de lui coller une étiquette éthique, qui ment dès le premier jour et se décollera bien vite. C’est l’histoire des transgressions que l’on normalise petit à petit (cf. l’avortement seulement dépénalisé en 1975 et que certains voudraient voir inscrit dans le marbre de la Constitution comme un droit fondamental).

Les députés de l’opposition se sont élevés avec vigueur et dignité contre le vote de cet amendement, dénonçant l’irruption de la GPA dans ce projet de loi.

Madame le ministre de la Justice Nicole Belloubet a fait savoir que le gouvernement ferait revoter cet amendement, ainsi que le règlement de l’Assemblée lui en donne le droit. Madame le ministre de la Santé Agnès Buzyn a fait savoir, dans un tweet, son opposition « à la GPA et à la légalisation automatique des enfants » (il lui faudra expliquer ce que c’est que « légaliser un enfant » et ce qu’est un enfant « illégal »). Le chef des députés En Marche ! Gilles Le Gendre tweete : « Cette disposition adoptée à la suite d'une erreur de vote ne traduit en rien la position du Groupe. »

L’amendement 1591 sera soumis au vote derechef. Gageons que les députés, dûment chapitrés, changeront le sens de ce vote. Petite remarque incidente : quand « une erreur de vote » est commise par le titulaire du perchoir, on ne revote pas. Deux poids deux mesures ?

Cet incident est cependant un révélateur de quelques faits très gênants.

Le plan de communication du gouvernement et de la direction du parti a perdu toute crédibilité, s’il en avait auparavant. Comment prétendre laisser une totale liberté de vote à ses députés sur un texte complexe, clivant, touchant à l’intime, et la leur reprendre quand ils dépassent les bornes ? La nature totalitaire « soft » du parti au pouvoir est bien, ici, perceptible.

Les digues absolues érigées avec force trémolos dans la voix pour ce qui concerne la GPA prennent l’eau avant même que la transgression d’avant, la PMA sans père, ne soit votée définitivement. Là encore, la crédibilité du pouvoir s’affale lourdement.

Sur la liberté de vote des députés, gageons que les quelques votes contre des « brebis galeuses » ne seront tolérés que si elles restent silencieuses et afin de se doter d’un alibi. Le traitement réservé à Madame le député Agnès Thill est le vrai signal.

Autre conclusion incidente : chaque fois que le gouvernement reprend la main et impose son choix aux députés, un doute légitime fait surface : le Parlement est-il toujours en mesure de contrôler le gouvernement ? La Constitution dit oui, les faits montrent que ce n’est pas évident.

Citer saint Augustin, évêque d’Hippone et docteur de l’Église semble d’actualité :

« À force de tout voir, l’on finit par tout supporter… À force de tout supporter, l’on finit par tout tolérer… À force de tout tolérer, l’on finit par tout accepter… À force de tout accepter, l’on finit par tout approuver ! »

Rendez-vous est donné à tous ceux qui sont révoltés par ces glissements anthropologiques présents et à venir : le 6 octobre à 13 h 00, place Edmond-Rostand à Paris, pour Marchons enfants. Qu’il fasse beau, qu’il pleuve, qu’il neige ou qu’il vente.

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