En France, pas beaucoup d’entrain pour prendre le train… et ça se comprend !

Le bien-pensant « bilan CO2 » de la SNCF lui est favorable. Chez nous, les lignes sont électrifiées. Or, la houille bleue, dans la doxa bien-pensante, est la plus propre. Cependant, les usagers fuient le rail ("Le train, un mode de transport en perte de vitesse en France en 2016", France Info).

C’est particulièrement vrai pour les voyages courts entre grandes villes européennes. On préfère systématiquement l’avion low cost quand il existe. Pourtant, se présenter une heure avant le départ, limiter ses bagages, atterrir dans des aéroports situés loin des centres-villes devraient en dissuader plus d’un d’utiliser le transport aérien. Mais les prix font pencher la balance : un Nice - Rome coûte 65 € par avion et 85 € en train pour un temps de transport un peu plus rapide pour l’aérien (même en tenant compte des trajets jusqu’aux aéroports).

Pour les liaisons entre villes moyennes, les Intercités, quand ils existent, sont délaissés. Leurs horaires sont peu intéressants et les prix élevés. Ils explosent quand on emprunte des TGV passant par Paris. Par exemple, il en coûte 140 € pour faire Valenciennes - Dijon (contre 80 € pour Lille - Rhodes !). On doit, en outre, changer de gare en traînant ses bagages (essayez de prendre le RER A avec deux grosses valises aux heures de pointe !). Souvent, dans ces cas-là, on préfère le bus quand il y en a, ou le covoiturage avec BlaBlaCar.

Les trains interrégionaux sont dramatiquement vides. J’ai déjà emprunté des rames où il y avait moins de voyageurs que de personnel à bord ! Ils ne subsistent que parce que les régions les subventionnent massivement (de 65 % à 85 % du prix du billet) et achètent du matériel flambant neuf (permettant à des entreprises comme Bombardier et Alstom de survivre alors qu’elles auraient dû réduire depuis longtemps la voilure, si on n'était guidé que par des principes économiques stricts).

Reste le fleuron de la SNCF : les TGV. Certaines lignes sont irremplaçables. En une heure, vous allez du centre de Lille à celui de Paris. Aucun avion, aucune voiture ne peut rivaliser en vitesse et en confort. Mais les prix sont très élevés. Comme la SNCF possède un marché captif et qu’elle n'a, pour l’instant, aucune concurrence, elle abuse de son monopole et impose des tarifs économiquement délirants. L’ouverture à la concurrence européenne ramènera peut-être un peu de sagesse dans ce marché.

La SNCF est mal gérée, non parce que ses dirigeants sont des incapables (bien au contraire !) mais parce que le poids des contraintes et des habitudes empêche qu’elle soit une société saine. Il faudrait faire table rase du passé, reprendre sur un fonds particulier toutes les dettes de la SNCF (emprunts pour construire les lignes, salaires et retraites des personnels) pour rebâtir un modèle cohérent et viable, à l’exemple de ce qu’a fait France Telecom (devenue Orange), qui est maintenant une entreprise rentable (et pourtant, les anciens salariés n’ont pas été sacrifiés).

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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