Ce vendredi 24 mars, à l’occasion de ses dix ans, la Manif pour tous est devenue le « Syndicat de la famille ». Explications avec Ludovine de La Rochère, sa présidente.

Sabine de Villeroché. Quel bilan tirez-vous de ces dix années de LMPT ? Et pourquoi tirer un trait ? Est-ce faute de combattants ou simplement parce que son objet (l’opposition au mariage pour tous) est dépassé ?

Ludovine de La Rochère. Nous ne tirons pas un trait sur la Manif pour tous, bien au contraire ! Le Syndicat de la famille est le prolongement, assumé et fier, de la Manif pour tous. Ce nouveau nom dit l’objectif – la famille – et les moyens : toutes les actions susceptibles d’être efficaces, donc des manifestations, mais pas seulement.

Le bilan de ces dix années est riche. Il y a eu malheureusement des échecs, bien connus. Mais il y a eu aussi des victoires, importantes et concrètes, et des fruits, nombreux. Je pense, par exemple, au retrait, par Jean-Marc Ayrault, de « l’éducation au genre » qui était prévue dans la loi de refondation de l’école, en 2013. Je pense au retrait, le lendemain de l’une de nos manifestations de 2014, du projet de loi « familles » porté par le ministre Dominique Bertinotti… Je pense aussi au renoncement officiel de François Hollande, en 2016, à la PMA sans père, ou encore à son renoncement à légaliser l’euthanasie, « à cause de la Manif pour tous », avait-il précisé.

Plus récemment, en 2021, nous avons obtenu un coup d’arrêt à la transcription des actes de naissance des enfants nés de GPA à l’étranger. Quant à la légalisation de la GPA, justement, il n’y a plus eu de proposition de loi pour la légaliser depuis dix ans. Et au contraire, il y a eu des propositions de loi pour en renforcer l’interdiction. En 2021, encore, la légalisation de la PMA pour les personnes trans et celle de la ROPA (réception des ovocytes de la partenaire, pratique revendiquée par des couples de femmes) ont été évitées. Je n’indique là que les plus importantes, mais il y en a eu d’autres.

Ainsi, imaginez un instant : s’il n’y avait pas tant de personnes mobilisées avec la Manif pour tous, depuis dix ans, nous en serions sans doute déjà à la pluri-parentalité, à l’effacement des sexes à l’état civil, etc. Alors, évidemment, nos opposants revendiquent d’autant plus fortement et ils ont fini par obtenir la PMA sans père, au bout de huit années. De fait, le combat ne cesse de se durcir et de s’étendre.

Mais je voudrais ajouter qu’une génération Manif pour tous a émergé, qui s’engage, année après année, dans des voies telles que l’associatif, l’enseignement, le journalisme, la politique… Très nombreux sont les jeunes dont les choix étudiants et professionnels changent radicalement lorsqu’ils comprennent ce qui est en cours sur les plans anthropologique et civilisationnel et qu’ils décident de prendre part au combat, avec beaucoup de générosité et d’intelligence.

Et donc non, le changement de nom n’est pas un renoncement, bien au contraire : il proclame notre objectif et indique notre détermination. Il nous projette dans l’avenir.

S. d. V. Un Syndicat de la famille, pour quoi faire ? Envisagez-vous une convergence des luttes avec d’autres mouvements protestataires ? Entendrons-nous le Syndicat de la famille sur la réforme des retraites ?

L. d. L. R. Un syndicat est une organisation qui défend, et ce, suivant divers modes d’action : il manifeste, mais aussi alerte, milite, revendique, fédère, etc. Et c’est bien notre cas : nos actions sont multiples. Or, en l’occurrence, le nom la Manif pour tous était un peu réducteur.

Bien sûr, dans le cas de la famille, on ne parle pas d’un syndicat professionnel – qui défend les intérêts des travailleurs de tel ou tel secteur d’activité - ni de droits sociaux… encore que la famille est bien un enjeu social, puisqu’elle structure le corps social et elle assure son avenir ! Le Syndicat de la famille est bien le prolongement de la Manif pour tous : il défend la différence des sexes – qui fonde la famille -, la paternité et la maternité, l’éducation, la solidarité intergénérationnelle. Ainsi, il défend les fondamentaux de la famille et, naturellement, tout ce qui met en jeu la famille. Nous sommes en effet dans un contexte où une partie des politiques ne cesse d’attaquer la famille, tandis que l’autre partie l’ignore, ce que nous ne pouvons laisser faire ni dans un cas ni dans l’autre.

Quant aux retraites, que vous évoquez, la Manif pour tous a elle-même dénoncé, ces derniers mois, dans les médias, l’aberration d’une réforme qui prétend garantir le financement des pensions mais qui n’est pas adossée à une politique de relance de la natalité et qui, par ailleurs, maltraite la maternité, les mères étant les grandes oubliées de la réforme. Sur ce dernier point, nous sommes intensément intervenus auprès des parlementaires et nous avons obtenu une petite amélioration du texte.

La Manif pour tous a ainsi souvent lancé des actions, et même des manifestations, pour défendre la politique familiale. Nos interventions au-delà du seul champ anthropologique ne sont pas nouvelles.

S. d. V. Olivier Dussopt, le ministre du Travail, dans un récent entretien au magazine Têtu, se déclare « favorable à une GPA encadrée, pas nécessairement gratuite mais encadrée ». Pensez-vous que la légalisation de la GPA, c’est pour demain ?

L. d. L. R. La GPA a toujours été l’un des enjeux de notre action. C’est une lutte pied à pied, jour après jour. Si nous n’avions pas, collectivement, assumé ce combat, la GPA aurait été légalisée depuis des années. Ses partisans, il faut bien le dire, ne lâchent pas et, comme ils ne l’ont pas obtenue, ils tentent diverses stratégies, notamment celle des « petits pas » : ainsi, ils réclament la transcription à l’état civil français des actes de naissance des enfants nés de GPA à l’étranger, c’est-à-dire la reconnaissance de fait de cette pratique. Après l’avoir obtenue de la Cour de cassation, ils ont connu un coup d’arrêt avec la loi Bioéthique de 2021. Ils tentent donc maintenant d’y parvenir via un texte de droit international privé en cours d’élaboration au ministère de la Justice. Ils cherchent aussi à obtenir cette reconnaissance aux niveaux européen et international. C’est le fameux projet d’un « certificat européen de parentalité » et celui d’un instrument juridique international que prépare la Conférence de La Haye. La GPA est donc un combat plus actuel que jamais !

S. d. V. Dans ce même entretien, le ministre du Travail évoque également « ces discriminations au travail dont seraient victimes les LGBT+ (en particulier les lesbiennes) » : est-ce un sujet pour le Syndicat de la famille ?

L. d. L. R. Oui, tout à fait, nous intervenons aussi sur ce sujet. Les entreprises, en effet, subissent également la pression woke. L’Autre Cercle, qui est une association de l’Inter-LGBT, les appelle à signer sa charte, conçue pour l’entreprise. Or, comme toujours, sous prétexte de lutte contre les LGBTphobies, il s’agit en fait d’objectifs politiques.

Ainsi, signer cette charte engage à communiquer en interne et en externe en faveur de revendications sociétales ; elle engage à « former » les cadres et les salariés de l’entreprise sur ces sujets. Et, bien sûr, à financer ce prosélytisme. Des chefs d’entreprise nous contactent donc et nous les aidons à formuler les bonnes réponses, adaptées au contexte de leur entreprise, afin de ne pas se laisser piéger.

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31 mars 2023 à 17:15

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11 commentaires

  1. … de la Famille ! On se pince. C’est extraordinaire. Plus de Ministère de la Famille ( pourquoi ? ). Je crains bien que poser la question soit… y répondre, bien sûr. Afin de tenter de compenser un peu, une telle situation, le Syndicat de la Famille aura beaucoup de travail et _ peut-être ( j’espère que non ) à subir beaucoup d’attaques…

  2. La GPA commerciale, c’est de « l’insémination-artificielle », comme pour les vaches ou les juments. C’est donc du ressort des vétérinaires et du Ministère de l’Agriculture, Département Elevage !

  3. la façon dont la « FAMILLE » est attaquée de partout, dans tous les domaines et tous les lieux pose une seule question de base:
    QUI finance toutes ces associations qui se disent « progressistes » ? La réponse est pourtant simple ! … Ce sont en grande partie des subventions qui les « gardent » en vie … Alors il faut vite , très vite les débrancher … comme l’ont été nos aînés durant cette « pandémie » qui aurait dû tuer plus de 500.000 français si rien n’avait été fait ! …
    Les « associations agissantes » sont très vindicatives … Qu’ils aillent faire valoir leurs droits dans des pays où LA femme, la famille et les « lgbt » sont pourchassés réellement en risquant leurs vies ! …
    Allez demander à marlène et à toutes ses « copines » ( la rousseau et « consœurs » ) si elles seraient prêtes à aller passer un mois à manifester dans les rues de pays comme le Liban ! …

  4. Que ce soit la Manif pour tous ou le Syndicat de la famille, Ce ne sont que des idiots et têtus de surcroit ! ils n’ont toujours rien compris. Alors je recommence (car j’ai de la sympathie pour eux.)

    Si vous voulez faire entendre votre voix, …
    c’est à Bruxelles, sur le parvis du parlement européen qu’il faut manifester et nulle part ailleurs !

    Tant que vous ne comprendrez pas cela, vous n’aurez jamais la possibilité d’avoir gain de cause . Paris n’a aucun pouvoir, ce n’est qu’une exécutante, une vassale, une fifre . Allez vous enfin saisir ce que signifie perte de souveraineté ?
    depuis 2000 c’est pourtant ce que nous avons, alors il serait temps de le comprendre, ânes têtus que vous êtes !

  5. Avec le second mandat du Président Macron, le grand remplacement des familles traditionnelles par les LGBT+++ est de plus en plus à l’ordre du jour.

  6. Si O. Dussopt pouvait s’exprimer dans un français aussi châtié que celui de Madame de La Rochère, il aurait peut-être du succès dans ses entreprises wokisées.
    Seulement voilà, tous ces hurluberlus dégenrés, voire dégénérés, n’ont que pour usage le hurlement qui vient décrédibiliser leur discours orientés.

  7. Excellente idée et très claire. Elle sera efficace car elle parle à tous. (ou au moins à 90%…)

  8. Formidable, qu’une part non négligeable des français se mobilisent depuis 10 ans pour défendre la famille c’est formidable, il faut rester vigilant face à tous ces projets décadents.

  9. Merci madame de défendre les droits de la famille , il faut du courage aujoud’hui pour sauver ces droits bafoués par de nombreux élus et autres associations .

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