Le slogan "Macron, démission" est le plus utilisé par les gilets jaunes. À ce slogan, les macroniens, mais aussi des politiciens de droite nous expliquent que le Président a été élu pour cinq ans et que le fait que les gilets jaunes manifestent ne le contraint pas à la démission, d’autant plus que ces derniers ne représentent qu’une petite minorité des Français. Ils oublient à chaque fois de dire que 15 % des Français se disent gilets jaunes et qu’une nette majorité de nos compatriotes soutiennent et/ou ont de la sympathie pour ce mouvement social, ce qui change tout.

Certes, notre Constitution n’oblige pas formellement le Président à démissionner quand il n’est plus soutenu par une majorité des Français mais c’est pourtant ce qu'a fait Charles de Gaulle, qui s’est démis en 1969.

Ces hommes politiques devraient s’interroger sur la raison qui a poussé le fondateur de la Ve République à démissionner. Au fond, 47,6 % de Français avaient voté en faveur de la réforme, portant sur les régions et le Sénat, que le Général proposait, ce qui n’était pas une catastrophe. Mais, pour lui, le Président ne pouvait se maintenir qu’à condition d’être approuvé par une majorité nette ; en 1965, déjà, l’idée du renoncement l’avait effleuré parce qu’il n’avait été élu qu’avec 55,2 % des voix !

Pour Charles de Gaulle, l’élection du Président au suffrage direct avait pour corollaire sa responsabilité devant le peuple. Il ne suffisait donc pas, selon lui, d’être élu grâce à des circonstances exceptionnelles pour s’en prévaloir pendant cinq ans ; encore fallait-il que le lien entre le chef de l’État et une majorité de Français ne soit pas rompu. Or, notre actuel Président n’est plus soutenu que par une vingtaine de pourcents de nos compatriotes et il est détesté par une fraction plus importante, mais il s’accroche à son fauteuil avec l’énergie du désespoir, en contradiction absolue avec l’esprit de notre Constitution.

Le professeur de droit constitutionnel Francis Hamon a écrit, dans son ouvrage consacré au référendum : "À la différence de la Constitution de 1852, celle de 1958 ne parle pas d’une responsabilité du chef de l’État devant le peuple. On pourrait même penser qu’elle l’a explicitement exclue, puisqu’il est précisé que le Président n’est responsable des actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions qu’en cas de haute trahison. Mais ce qui compte, c’est l’esprit dans lequel la Constitution fut appliquée. La théorie gaulliste de l’appel au peuple a été brillamment résumée par René Capitant : “De même qu’il y a un régime parlementaire où le gouvernement est responsable devant le Parlement, on pourrait dire qu’il y a un régime populaire où le président de la République est responsable devant le peuple.” Et il en déduisait qu’en cas d’échec d’un référendum, le Président ne devait pas se soumettre mais se démettre. La démission du général de Gaulle, au lendemain du référendum du 27 avril 1969, a montré que cette théorie caractérisait bien alors l’esprit du régime."

En 1969, le général de Gaulle a organisé un référendum qui visait, d’abord, à évaluer sa propre légitimité. Il avait clairement dit qu’en cas de désaveu, il mettrait fin à son mandat. Si Emmanuel Macron était à la hauteur de son prédécesseur, il organiserait un tel référendum, mais n’est pas de Gaulle qui veut !

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09 février 2019 à 19:53

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