Lors de son allocution, le président de la République a annoncé que le confinement était prolongé jusqu'au 11 mai, qu'il n'y aurait pas de tests systématiques. Ces préconisations vont-elles dans le bon sens ? Réponse du docteur Bertrand Legrand au micro de Boulevard Voltaire.

Dans son allocution de ce soir, Emmanuel Macron a annoncé que le confinement était prévu jusqu’au 11 mai. Il n’y aura pas de tests systématiques, mais uniquement des tests réalisés sur des personnes ayant déjà des symptômes du Covid-19. Les préconisations du président de la République vont-elles dans le bon sens ?

Non, pas du tout. Les tests que l’on a aujourd’hui ont une sensibilité de 0,60 et une spécificité de 0,98. Sur l’ensemble de la population, si on prend uniquement ceux qui sont suspects, on va avoir plus de faux négatifs. Par conséquent, on va libérer des personnes malades et sur-rassurer des gens malades, alors que lorsqu’on fait le même test avec la même sensibilité sur une population dont la concentration de malades est plus faible, on va avoir, à l’inverse, une valeur prédictive négative qui sera nettement supérieure et qui permettra de ne pas se tromper.
La stratégie du test n’est pas une stratégie après examen clinique. Ce n’est pas à mettre en aval mais en amont. Cela démontre qu’on ne sait pas utiliser ce test-là.

Est-il plausible que le confinement se termine autour du 11 mai ?

La date du confinement dépend de la capacité à produire des masques et des tests de masse de manière à isoler les patients positifs. Ceux qui sont symptomatiques et que le médecin détermine comme étant Covid-19 n’ont pas besoin d’être testés. L'examen clinique est meilleur que le test. Ceux qui ne sont pas symptomatiques et testés positifs doivent être mis en isolement.
Il est essentiel de savoir utiliser un test à sensibilité qui est médiocre. Il faut l’utiliser différemment de ce qu’on a l’habitude de faire en France. Quand un test n’est pas bon, il faut l’utiliser avant le médecin et non pas après.

Tant qu’on n’a pas les masques nécessaires et les tests utilisés à bon escient, toutes ces annonces n’ont aucun sens…

La seule annonce qui m’a fait plaisir est l’annonce du retour des enfants à l’école, puisque les enfants ne sont probablement pas porteurs.
Si on voulait avoir une lecture très cynique de ce discours, on pourrait imaginer qu’Emmanuel Macron fait le pari d’une unité globale et laisse donc filer tout doucement l’infection de manière à ce que l’on monte une immunité de groupe. Ce pari-là ne tient qu’à une seule donnée qui serait de faire un pari d’une immunité qui persiste. Ce n’est pas du tout une évidence, à l’heure actuelle, puisque aucune étude ne nous prouve que l’immunité persiste longtemps. Elle peut être de six mois, de cinq ans ou de trois semaines. À ce moment-là, c’est un peu plus embêtant.

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13 avril 2020 à 21:57

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