Dans son discours sur la sécurité devant une assemblée de hauts fonctionnaires de la police, le président de la République a dénoncé avec force "l'impuissance publique".

La nouveauté ne réside pas dans l'affirmation de ce constat qui n'a été que trop souvent relevé au fil des quinquennats par les opposants de droite ou de gauche au pouvoir et, plus généralement, par les citoyens déçus, voire désespérés par l'incurie et la passivité de l'État.

Mais dans le fait que le président de la République lui-même prend les devants. Je me demande s'il n'y a pas, dans cette anticipation, une méthode faite à la fois de lucidité et d'habileté.

De lucidité, parce que l'impuissance publique n'est pas qu'une plaie en matière de sécurité et d'ordre mais renvoie à un souci prioritaire chez Emmanuel Macron dont on pourrait résumer les propos sur beaucoup de thèmes par "Ça ne marchait pas, il faut que ça marche".

D'habileté aussi, parce que cibler l'impuissance publique face au plus haut niveau de la police sert à manifester combien le président de la République est étranger à cette dérive qui relève des pouvoirs précédents et de leur faiblesse. Nommer le pire, à l'évidence pour lui, c'est s'en exonérer.

Si son discours sur le plan de sa philosophie et de la conception qu'il développe de l'autorité - du socle de confiance et d'estime sur lequel il fait reposer l'action de la police - est irréprochable, en revanche, j'émets une double réserve sur ses propositions.

Je ne me moque pas de la police de la sécurité quotidienne à partir du moment où, en effet, elle n'encadre pas que des matchs de foot joués par des adolescents qu'il faut à tout prix occuper car, sinon, ils se laisseraient aller à des comportements petitement ou sérieusement transgressifs.

Cette police, j'en ai souvent parlé, suggérant il y a longtemps qu'on l'appelle plutôt police d'urbanité, tant elle me paraissait nécessaire pour réparer une relation dégradée entre la police et ceux qui n'aspiraient qu'à "bouffer du flic". Et les fureurs violentes de l'ultra-gauche n'étaient pas encore une triste mode !

L'objection que j'énonce tient au fait qu'aussi souhaitable qu'elle soit, elle ne sera jamais acceptée dans les lieux, dans les cités de non-droit, dans les secteurs que le trafic de drogue a construits comme des forteresses au détriment des honnêtes gens qui fuient ce qu'ils ne peuvent plus supporter et que la police n'empêche plus puisqu'elle a, de fait, interdiction d'y venir.

La police de sécurité quotidienne créera du lien, de la familiarité, rassurera dans des espaces où heureusement au quotidien le pire n'est pas encore institutionnalisé, où l'État a gardé sa place. On peut à nouveau rêver d'une avancée mais il me semble qu'il convient de se défier des illusions et d'avancer avec pragmatisme. Elle fera du bien là où il n'y a pas le feu. Pour l'incendie, un changement radical est à opérer, en particulier de soutien de la police quand, forcément, elle sera mise en cause. Qu'elle ne soit plus présumée coupable à tout coup, ce serait déjà une base de départ acceptable.

Ma seconde réserve se rapporte à ce poncif qui exigerait d'augmenter les sanctions théoriques à l'encontre de ceux qui s'en prennent aux forces de l'ordre, blessent et attaquent policiers et gendarmes. À chaque fois, c'est la même chose. Pour complaire, on durcit le principe de la répression en oubliant que les pratiques judiciaires font ce qu'elles veulent. Il ne me semble pas que la législation actuelle soit appliquée, sauf exceptions, avec la rigueur qui conviendrait. Alors, offrir, comme un cadeau, des peines plus importantes n'aura pas la moindre incidence sur le combat au quotidien des policiers et gendarmes contre la malfaisance. La magistrature aura beaucoup à mettre du sien pour que les délits et les crimes dont sont victimes ces auxiliaires de la République, ces gardiens de notre paix soient enfin condamnés à la hauteur de leur nuisance.

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21 octobre 2017 à 17:00

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