Bicentenaire de l’indépendance grecque : rendons à la Grèce l’hommage qu’elle mérite

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Florence Parly se rend en Grèce, ce jeudi 25 mars, dans le cadre des cérémonies marquant le bicentenaire de la déclaration d'indépendance du pays. Elle représente Emmanuel Macron, qui ne fait pas le déplacement, trop occupé, sans doute, à jouer le commis voyageur pour vanter sa politique sanitaire. Il y aurait, pourtant, bien des raisons d'être, ce jour-là, aux côtés de la Grèce.

Il faut d'abord se rappeler que la France a joué un rôle important dans la libération de ce pays du joug ottoman. Une expédition navale, associant la Russie, la France et l'Angleterre, détruisit la flotte turco-égyptienne lors de la bataille de Navarin, le 20 octobre 1827. La France intervint également sur terre, entre 1828 et 1833, pour libérer le Péloponnèse des forces d'occupation.
Ensuite, cette fête nationale de l'indépendance est particulièrement symbolique, alors qu'il existe de fortes tensions entre la Grèce et la Turquie qui se disputent, en Méditerranée orientale, des zones où l'on a découvert des gisements de gaz naturel. La France a pris parti pour la Grèce, mais plusieurs de ses partenaires européens se montrent plus prudents : si les pays méditerranéens membres de l'Union européenne s'accordent sur ce soutien, ce n'est pas le cas de l'Allemagne. Devinez pourquoi.

On comprend mieux, dans ces conditions, la tiédeur de la réponse de la Commission européenne à Thierry Mariani, eurodéputé du Rassemblement national, qui l'interrogeait sur son intention de « s’associer à la célébration de cet anniversaire important dans l’histoire de notre continent ». Jugez-en plutôt : « […] Elle envisagera d'y participer en tenant compte de la disponibilité de ses membres et de ses fonctionnaires, ainsi que d'éventuelles restrictions en matière de déplacements en raison de la pandémie. »

Il semble bien que les considérations historiques ou géopolitiques ne suffisent pas au chef de l'État pour se déplacer en personne. Fidèle à son tempérament, il peut ainsi pratiquer son éternel « en même temps », ménager la chèvre et le chou, s'engager sans s'engager. S'il délègue son ministre des Armées, c'est surtout parce qu'elle est une bonne négociatrice des marchés d'équipements militaires. Elle a déjà vendu des Rafale à la Grèce. Paris espère maintenant lui vendre quelques frégates. On reconnaît bien là, chez Macron, le sens des valeurs véritables : les valeurs marchandes.

Beaucoup de Français préféreront rendre hommage à la Grèce, non parce qu'elle est un bon client potentiel, mais parce qu'elle est proche de nous par son Histoire et le berceau de notre civilisation. Paul Valéry définissait ainsi les peuples européens : « Tous les peuples qui ont subi au cours de l'histoire [ces] trois influences » : Rome, le christianisme et la Grèce, à propos de laquelle il précisait : « Ce que nous devons à la Grèce est peut-être ce qui nous a distingués le plus profondément du reste de l'humanité. Nous lui devons la discipline de l'Esprit. » Notons que la France a prêté à la Grèce L'École d'Athènes, tapisserie tissée d'après la célèbre fresque de Raphaël au Vatican, ce qui est culturellement plus significatif que la présence de Macron.

Relisons L'Enfant, ce beau poème de Victor Hugo, extrait des Orientales : « Les Turcs ont passé là. Tout est ruine et deuil./Chio, l'île des vins, n'est plus qu'un sombre écueil,/Chio, qu'ombrageaient les charmilles,/Chio, qui dans les flots reflétait ses grands bois,/Ses coteaux, ses palais, et le soir quelquefois/Un chœur dansant de jeunes filles. » Il nous rappelle la vérité de l'Histoire et nous incite plus à honorer la Grèce d'aujourd'hui qu'à ménager la Turquie d'Erdoğan.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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