Bernanos, reviens ! Ils sont devenus fous…

Je prenais connaissance, hier, sur Boulevard Voltaire, des ravages faits par le vote blanc catholique sur les résultats de l'élection présidentielle. Énormes ! Cette "chose"-là, mes amis, relève plus d'une grande frilosité que d'un refus de choisir.

On ne franchira jamais le Rubicon si on continue à pratiquer ainsi cette sorte de masturbation intellectuelle qui finit par assécher pour de bon les canaux de réflexion en les encombrant de toutes sortes de débris le plus souvent auto-fabriqués par la mauvaise conscience. C'est ce que le grand Georges Bernanos appelait "la grande peur des bien-pensants". Des états d'âme empruntés au complexe de repentance judéo-chrétien, mâtinés d'une écoute de l'autre devenue maladive à force de privilégier cet Autre comme étant le confesseur de tous les errements et pourvoyeur infaillible de la repentance absolue.

C'est à ce moment-là que le doute s'installe et que les velléités qu'on a secrètement construites à l'abri des regards indiscrets, parce que politiquement incorrectes, partent en fumée. L'Église postconciliaire a une grande part de responsabilité dans toute cette histoire, à force de privilégier la défense de tout ce qui ne représente aucun risque pour sa place dans la société et de montrer d'un doigt accusateur tout ce qui n'est pas dans l'air du temps.

En ces temps, précisément, où on est désigné à la vindicte populaire par des Fouquier-Tinville modernes dignes des pires moments de la Terreur, l'incorrection politique est terriblement difficile à cultiver. Il y a, certes, dans les trois millions de bulletins blancs de la dernière consultation électorale beaucoup qui ont refusé de choisir en leur âme et conscience parce qu'aucun des deux candidats restés en lice ne représentait de réelle garantie à leurs yeux.

Mais quid du reste ? De ce troupeau mené par des Panurge à la solde de la mauvaises conscience, mère de tous les refus de choix qui nécessitent une certaine audace ? Ils se réfugient le plus souvent dans des explications bancales auxquelles personne ne comprend rien, si ce n'est cette peur de tout qui mine et détruit les peuples et leurs civilisations.

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Jean-Pierre Lenoir
Journaliste et écrivain mauricien

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