Bellamy, Bella Ciao !

François-Xavier Bellamy

L'heure de vérité pour LR est enfin arrivée. Et c'est M. Bellamy qui a incarné cet événement historique. Jordan Bardella parlait de « façade », d'autres de « tête de gondole ». En tout cas, la mayonnaise que l'on nous servait n'a pas pris. Cette mayonnaise a, d'ailleurs, curieusement été favorisée par les médias qui se sont bien gardés de le diaboliser : si Bellamy pouvait mordre un peu sur l'électorat RN et rabattre les derniers centristes vers LREM, il pouvait être utile. L'opération a été en partie déjouée. Si les sondages montrent que les centristes et les libéraux LR ont bien rejoint LREM, qui se vidait du côté Verts (c'est dire la liquidité et la plasticité du mouvement macroniste, et sa force future), les électeurs de droite n'ont guère cru au leurre Bellamy. LR est un astre mort dont M. Bellamy fut certainement la dernière riante lumière. Ce parti, miné par des tendances irréconciliables, s'est peu à peu vidé au fil des ans, vers le RN pour sa frange gaulliste, patriote et populaire, vers le centrisme macronien pour l'autre tendance.

Cette déroute historique (LR faisait 20 %, il y a cinq ans et il y a encore deux ans, malgré les affaires que l'on sait) sera lourde de conséquences.

On peut s'attendre à de nouveaux règlements de comptes comme ce parti nous en a souvent servi : les Pécresse et Larcher voudront la peau de Bellamy et de son mentor Wauquiez. Pour M. Bellamy, ce sera « Bella Ciao! » Dès lundi, son propre directeur de campagne, Geoffroy Didier, a lancé les premières flèches. Laissons-les finir de s'autodétruire. Leur électorat, âgé, meurt lui aussi à petit feu. Trop d'abandons, trop de trahisons. Quant à M. Bellamy, l'épreuve devrait lui déciller les yeux sur son propre parti. On verra jusqu'où sa cohérence le conduira ou s'il n'était, en fait, aussi, qu'une façade pour lui-même.

Pour Emmanuel Macron, cet anéantissement assez radical de LR n'est pas forcément une bonne nouvelle : il n'a plus rien à gagner de ce côté et désormais, à droite, il n'y a plus qu'un seul pôle attractif, le RN. Pour asseoir une domination et contenir l'ennemi, rien de mieux qu'un État-tampon vassalisé : cet État LR bien commode est mort. Quant aux électeurs de droite, lents à le comprendre, ils devront intégrer cette nouvelle donne. Par ailleurs, si une droite Pécresse reprend la maison en faillite, elle pourrait grignoter l'électorat parti chez LREM. C'est tout le problème des formations liquides : ça va, ça vient, ça coule. Vivement Pécresse, donc ! À moins que tout ce beau monde - carrière oblige - ne rejoigne d'une façon ou d'une autre leurs amis Darmanin, Philippe et Le Maire, qui leur ont ouvert la voie. La clarification à droite est en voie d'achèvement et les électeurs qui ont eu la lucidité de saborder le vieux rafiot ont été plus courageux et plus rapides que les dirigeants.

Mais la recomposition à droite n'est pas terminée et il y a, visiblement, un problème d'offre, autant dans les personnalités que dans les programmes : jamais le total des voix de droite n'a été aussi bas : 24 + 8 + 3 = 35 %, alors qu'il dépassait les 45 % à la présidentielle, il y a deux ans ! La question s'adresse, d'ailleurs, à ces trois formations, RN compris, avec la responsabilité supplémentaire qui échoit au premier de cordée qui ne peut se contenter de camper sur ses 23 % sans réserve ni allié. Avec un score aussi bas du total des droites, la perspective de l'alternance n'est qu'un rêve.

2019 : droite, année zéro.

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