Année 2020 aux USA : vers de nouvelles guerres de sécession ?
« Un battement d’ailes de papillon et une tornade s’abat à l’autre bout de la terre »… Surtout lorsque ce battement d’ailes provient des États-Unis, pourrait-on dire. Et l’année 2020 ne sera pas une année comme les autres, outre-Atlantique.
Remettons-nous cinquante ans en arrière, vers 1970. Sur la lune, Neil Armstrong avait réalisé un petit pas, mais l’humanité en avait fait un très grand. Du côté de San Francisco, on s’opposait à la guerre du Vietnam en se baladant une fleur dans les cheveux avec pour devise peace and love. Dans la littérature ou au cinéma, on envisageait difficilement l’an 2000 sans des vaisseaux et de hautes technologies.
La technologie a évolué, certes, notamment dans le domaine des communications, mais finalement moins vite que dans l’imaginaire populaire. Et la société américaine, elle ?
Le rêve américain et ses espoirs de « self-made man » (où n’importe qui peut devenir quelqu’un grâce au travail et aux dollars gagnés) semblent, d’une certaine façon, toujours exister. Une forme d’homogénéité chrétienne règne, ce qui évite au pays les tensions religieuses que connaissent d’autres nations, notamment européennes ou asiatiques. La consommation de nourriture, de produits manufacturés et de spectacles rassemble, apparemment, indifféremment la population, notamment lors des grands moments rituels que sont les fêtes nationales et les grandes compétitions sportives. Mais derrière tout cela ?
La ségrégation et l’esclavagisme des champs de coton ont certes disparu, pourtant la société américaine semble toujours aussi morcelée ; « en archipels », pourrait dire Jérôme Fourquet.
Cette année 2020, tout le monde parlera de l’élection présidentielle. Une opposition qui sera résolument manichéenne entre Donald Trump et un candidat démocrate. Cette élection se jouera peut-être sur des détails de campagne, sur un scandale aussi, ou sur le mode de scrutin, mais au final ? Même si Trump venait à être réélu, quand bien même bâtirait-il tous les murs possibles à la frontière mexicaine pour arrêter totalement l’immigration sous toutes ses formes, la démographie des populations en présence sur le sol américain ferait que le WASP (White Anglo-Saxon Protestant) devrait y être minoritaire d’ici 2050.
Une autre fracture, idéologique, entre alors en considération : celle des côtes universitaires et celle de l’Amérique profonde. Sur les campus de Boston comme sur ceux de Californie, les gender studies et minority studies semblent avoir triomphé idéologiquement et donner le la. À l’intérieur des terres, au contraire, les communautés se resserrent, que ce soit au Texas ou dans les grandes plaines pour les communautés blanches, comme autour de certaines villes ou bourgades pour la communauté latino. La communauté afro-américaine durcit également le ton par une affirmation identitaire de plus en plus décomplexée, comme avec le phénomène du « Buy Black » qui consiste à acheter des produits uniquement fabriqués et issus de la communauté noire. Des quartiers entiers se replient autour de ce phénomène économique, social et identitaire. Il est régulièrement redynamisé par les activistes et ravivé à chaque « bavure » d’un policier blanc sur un citoyen noir.
Effet papillon ou simple brise dans le désert ? Peut-être plus qu’ailleurs, l’avenir américain, à long terme, semble impossible à prédire (tout particulièrement dans un pays où plus de 60 millions d’adultes possèdent une arme à feu). Vers quel horizon se dirigera l’Amérique de la nouvelle décennie ? Vers un maintien pragmatique et globalement fonctionnel du modèle multiculturel ? Vers une lutte des communautés qui se substituerait à l’ancienne lutte des classes et qui déboucherait sur une nouvelle guerre de sécession ? Ou vers une lente agonie du visage pâle noyé dans une démographie dynamique ?
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