A Trèbes comme à Paris, la colère a parlé : « Ce sont eux, le terreau du terrorisme ! »
Entre mercredi et jeudi, entre l'hommage national au colonel Beltrame à Paris et celui des funérailles à Trèbes et Carcassonne, nous avons tous été émus par les images et les éléments de langage attendus en pareilles circonstances : cercueils, cérémonies, "Marseillaise", témoignages, tous pleins d'émotion et de dignité.
Aux Invalides, avec la perfection de l'architecture, de la musique militaire et du discours, l'hommage fut à l'unisson de l'héroïsme du colonel Beltrame, et à son exigence d'excellence (pour ses hommes et lui-même) et d'absolu. Une seule fausse note : le Président donnant la main à son épouse pour suivre le cercueil. En ces circonstances, il n'était pas en couple à l'enterrement d'un ami. Il était le chef de l’État, chef des armées rendant solennellement hommage à un « héros français », comme il venait de le dire lui-même.
À l'extérieur des Invalides, BFM TV était allé recueillir les réactions des anonymes venus, eux aussi, rendre hommage, sous la pluie, au colonel Beltrame. Disons-le d'emblée : des Parisiens, d'un certain âge, bourgeois, cultivés et, pour l'essentiel, de la France de droite – et pas de la droite qui ne sait pas où elle est. Avec cette France bien élevée (qui a toujours quelque utilité pour les médias "mainstream" qui la détestent pourtant), BFM TV était assuré d'obtenir des phrases claires avec les mots attendus, et de la mesure : « héros », « patrie », etc. Tous y étaient. Mais n'étaient-ils pas assez explicites pour qu'ils soient si mal traduits par la journaliste et sur le plateau en « fierté », « dignité » ? Les Français parlent aux Français, mais BFM TV et Ruth Elkrief ont un drôle de logiciel de traduction qui n'arrive pas à rendre ces mots pourtant « transparents », comme l'on dit à nos élèves... Il faudra nous expliquer. Mais il y eut un autre mot que le logiciel BFM n'admit pas : celui d'un monsieur au langage toujours aussi châtié, portant une petite médaille, clairement articulé : « colère ». Je ne sais comment ce mot avait réussi à se glisser en direct. Mais il était bien présent sur le parcours du convoi funèbre, lui aussi, le mot « colère », tout aussi recueilli, ordonné et au garde-à-vous que les pierres et les soldats de la cour d'honneur.
Jeudi, dans l'Aude : autres places, autres églises, autres pierres de ces villages qui nous sont tellement familiers. Des larmes encore. MM. Collomb, Philippe et Mme Belloubet ont pris le relais du Président Macron, et la presse locale celui de BFM TV. Et une France plus populaire est là, avec son accent à elle, et ses fulgurances. Et, malgré son « journalistiquement correct » habituel, même La Dépêche n'a pu éviter, à Trèbes, de recueillir celle-ci, d'une jeune femme devant l'église :
“Cette cérémonie, juste avant la messe, mais de qui se moque-t-on ?” Et de dénoncer “l'indécence” du monde politique. “Ils nous expliquent qu'il était fiché S mais qu'il ne devait jamais passer à l'acte. Nous, on voit le résultat. Ce sont eux qui se sont fait buter” (Elle montre du doigt deux gendarmes en faction près de l'église), “et c'est nous qui enterrons nos morts. Ils [les membres du gouvernement et le Premier ministre, NDLR] devraient avoir honte d'être là, ce sont eux, le terreau du terrorisme.
Colère. À Paris comme à Trèbes, et partout dans le pays, la colère avait tenu à être là.
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