Grégoire XI, le dernier pape français

Un honneur qui n'est plus arrivé à un fils de France depuis 647 ans.
Grégoire XI en route pour Rome
Grégoire XI en route pour Rome

Alors que va bientôt s’ouvrir un nouveau conclave, le monde catholique suit avec attention et passion ces grandes heures de l’Histoire que nous vivons. Les spéculations vont également bon train sur l’identité du futur pontife, et certains esprits chauvins ne cachent pas qu’ils aimeraient voir un pape issu de leur propre pays. Pour la France, cela serait enfin le retour, sur le trône de saint Pierre, de l’un de ses fils, un fait qui n'est plus arrivé depuis 647 ans. En effet, le dernier en date ayant eu cet honneur fut le pape Grégoire XI, l’ultime souverain pontife ayant régné depuis Avignon. Dans une époque troublée par la guerre et les hérésies, il incarna une volonté de réforme, mais fut aussi, bien malgré lui, à l’origine d’une des plus graves crises de l’Église : le grand schisme d’Occident.

Pape avant même d'être prêtre

Grégoire XI, de son vrai nom Pierre Roger de Beaufort, vit le jour vers 1329 en Corrèze, à Rosiers-d'Égletons. Il est le fils d’un puissant seigneur, Guillaume Roger, comte de Beaufort, mais aussi le neveu du pape Clément VI. Cette belle parenté lui permet ainsi de suivre facilement des études de théologie et de philosophie, mais aussi de devenir cardinal alors qu’il est à peine âgé de 18 ans et qu’il n’est même pas prêtre. Une situation qui lui posera quelques problèmes lorsque, le 30 décembre 1370, il est élu pape. Pour résoudre cela, les cardinaux se chargent de l’ordonner rapidement puis de le sacrer évêque afin qu’il puisse recevoir officiellement la tiare pontificale en janvier 1371.

Désormais à la tête de l’Église, Grégoire XI s’installe, comme ses prédécesseurs depuis Clément V en 1309, à Avignon. Cependant, le nouveau pape hérite d’une charge bien lourde et doit s’occuper de nombreux problèmes : le prestige pontifical est terni, son autorité est souvent bafouée par des hérésies et l’Europe est ravagée par la guerre de Cent Ans depuis 1337. Grégoire XI engage alors une politique de réformes en tentant de pacifier l’Italie, qui rejette le pouvoir temporel de ce souverain pontife exilé, d’endiguer les hérésies qui fleurissent dans ce chaos ambiant et de réconcilier en vain les monarchies française et anglaise.

Le retour de la papauté à Rome

Cependant, le principal acte du pontificat de Grégoire XI reste le retour de la papauté à Rome en 1376, après 60 ans d’exil avignonnais. Ce choix vise alors à restaurer le prestige romain de la papauté, à apaiser les soulèvements des villes italiennes comme Florence et à réduire l’influence française sur le trône de Pierre. Ce retour, mûrement réfléchi, fut également encouragé par une femme au rôle déterminant : sainte Catherine de Sienne. Cette dernière exhorte ainsi le Saint-Père à revenir à Rome par des lettres ardentes et pieuses : « Mon doux Père, vous me demandez mon avis sur votre retour, et je vous réponds je vous dis de la part de Jésus crucifié. Venez le plus tôt que vous pourrez […] venez en homme courageux et sans crainte […] venez la Croix à la main, comme le doux Agneau. » Confiant et se sentant soutenu, Grégoire XI quitte ainsi Avignon en septembre 1376 et fait une entrée solennelle à Rome en janvier 1377, renouant avec la tradition millénaire de la papauté romaine.

Une mort prématurée, un héritage empoisonné

Malheureusement, la situation à Rome est explosive. La ville est politiquement instable, le clergé divisé et les tensions entre factions italiennes et françaises s’exacerbent. La santé du pape, déjà fragile, se détériore également rapidement. Ainsi, moins de deux ans après son retour, Grégoire XI meurt le 27 mars 1378. Son décès précipité plonge alors l’Église dans l’une des périodes les plus chaotiques de son Histoire.

En effet, sous la pression du peuple romain, les cardinaux élisent un Italien, Urbain VI, mais son caractère jugé trop autoritaire et son mépris pour les cardinaux français provoquent une crise. Une partie du Sacré Collège, contestant ainsi la légitimité de son élection, élit Clément VII, qui s’installe à nouveau à Avignon et sera désigné à jamais comme un antipape. Le grand schisme d’Occident commence ainsi en divisant la chrétienté entre deux obédiences pendant près de quarante ans. Bien qu’il ne l’ait pas voulu, Grégoire XI aura été, par sa mort prématurée et son retour précipité, l’un des déclencheurs involontaires de cette fracture historique, triste héritage légué par le dernier pape français.

Picture of Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

Vos commentaires

18 commentaires

  1. N’oublions pas que bien des papes qui n’étaient pas Français,
    ont néanmoins œuvré pour la France, comme le montrent les
    Mémoires de Chateaubriand… qui est allé lui-même à Rome,
    pour que le nouveau pape soit des nôtres…

  2. Si le pouvoir divin est vraiment présent à Rome, c’est Mgr Sahra qui devrait être élu pape. Le seul à défendre les chrétiens d’Orient et à mettre en garde contre l’Islam, depuis des décennies !

    • Un pape français pourquoi pas, mais qui ? Les cardinaux sont tous anti-français, pro-immigrationniste, de gauche (extrême), et surtout trés égocentriques !
      Quant à ulrich, l’évêque des riches (épisode de ND de la Treille), non merci, son nombril est plus large que la place de la concorde !

      • Si j’en crois certaines prédictions sur une papauté limitée dans le temps, Benoit XVI était l’ultime . Un coup d’État a écarté ce Saint homme.

Laisser un commentaire

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

La grève des trains prend les Français en otage
Gabrielle Cluzel sur CNews
Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois